"Un désastre militaire" par le général (2S) Vincent DESPORTES (extraits)







S’il est un domaine de l’action régalienne où la logique de résultat doit l’emporter sur celle des moyens, un domaine où il est dangereux de sacrifier le futur au présent, c’est bien celui de la défense. Et pourtant, c’est aussi celui où ces règles élémentaires ont été ignorées depuis cinq ans, au mépris du premier des principes stratégiques : proportionner les moyens à l’enjeu. L’impossible a été demandé aux armées : elles l’ont fait, mais à quel prix ? 

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Que les armées soient engagées, c’est normal. Mais qu’elles le soient aujourd’hui au détriment de notre défense de demain, c’est dangereux. La dégradation des armées ne date pas de cette mandature, mais la faute nouvelle est que, malgré l’explosion des interventions militaires, jamais n’ont été attribués aux armées les moyens leur permettant de conduire leurs missions tout en préservant les capacités de le faire à l’avenir. Les promesses ont remplacé le courage ; peu importe, cela tiendra bien jusqu’en 2017 ! D’ailleurs le militaire, à la silencieuse obéissance statutaire, fait toujours … au mieux, ce qui est à la fois sa grandeur et sa faiblesse. Jusqu’à l’usure. 

(...)  Ainsi, malgré les demandes pressantes des hauts responsables, malgré leurs auditions très franches devant la représentation nationale, nos armées, asphyxiées chaque jour davantage, se sont usées en se consommant plus vite qu’elles ne pouvaient se régénérer.

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Nos matériels en service affichent un taux de disponibilité dangereusement bas. (...)

La préparation opérationnelle – modulable à la baisse instantanément – a de fait servi de deuxième variable d’ajustement budgétaire : nos forces sont aujourd’hui globalement sous-entraînées. (...)

A force de suremploi, les munitions sont venues à manquer, avec aujourd’hui une nécessité urgente de remonter le stock des munitions critiques, missiles et roquettes notamment.

Les « réductions temporaires de capacité », autre fallacieux concept, sont devenues des trous béants où se détruit l’autonomie stratégique de la France et se dégradent ses atouts : ainsi, notre Marine Nationale n’est plus capable de patrouiller notre Zone Economique Exclusive, la 2ème au monde, pourtant l’une de nos grandes richesses.

En aval, les hommes souffrent : la surchauffe opérationnelle, les tensions sur les effectifs affectent aussi les temps de repos. Ainsi, en 2016, plus de la moitié de la force terrestre a exécuté 150 jours de mission hors garnison. (...)

Le Maréchal Foch rappelait dans son discours de réception au Palais Mazarin : « Un gouvernement ne peut avoir que la politique de son état militaire ». L’évident précepte est ignoré depuis cinq ans. (...)

En cause, l’extravagante contradiction entre la surintensité de l’emploi des forces, la surexposition stratégique de la Nation et l’absence de mesures à la hauteur de cette démesure. Une faute stratégique et politique que la France paiera longtemps.


Général (2S) Vincent DESPORTES

Professeur des universités associé à Sciences Po


Dernier ouvrage : La dernière bataille de France
Gallimard, Grand Prix 2016 de l’Académie Française
Source : Général (2s) Vincent DESPORTES

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