La méchante semaine n°2020-16
Cette semaine, Méchant Réac a sélectionné 25 textes pour un thème unique :
la crise sanitaire du Covid-19.
Ont été retenues les analyses de Nicolas Baverez, Florent Guénard,
Christophe de Voogd, Régis Debray, Denis Tillinac, Philippe Bilger, Paul-Marie
Couteaux, Marcel Gauchet, Alain Laurent, Cécile Philippe, Maxime Tandonnet,
Olivier Babeau, Jean-Philippe Delsol, Chantal Delsol, Raphaël Enthoven, Ivan
Rioufol, André Comte-Sponville, Eric Zemmour, Guy Millière, Roger-Pol Droit,
Frédéric Mas, Pascal Salin, Robert Koop, ainsi qu’une vidéo de Régis de
Castelnau dans le cadre des entretiens menée par le Cercle Aristote.
Liberté, Liberté chérie !
LE POINT/EDITO – Depuis un mois la
justice n'est plus rendue, des ordonnances viennent entraver nos libertés et
les contre-pouvoirs sont abolis.
La justice st en sommeil
pendant la durée du confinement. Un danger pour nos libertés ?
La pandémie de coronavirus
constitue un test impitoyable pour les dirigeants comme pour les institutions
des nations. En France, la faillite de la stratégie sanitaire de l’Etat s’accompagne
d’un krach des libertés publiques qui touvhe tous les pouvoirs et fragilise un
peu plus notre démocratie.
La vie nationale doit
reprendre son cours le plus rapidement possible.
L’OPINION/ENTRETIEN - Agrégé
et docteur en philosophie, Florent Guénard est maître de conférences à l’Ecole
normale supérieure. Celui qui dirige par ailleurs la revue La Vie des idées analyse les conséquences que la crise du Covid-19
pourrait avoir sur notre conception de la démocratie.
Nous vivons une
situation inédite : des libertés, celles de se rassembler ou de se déplacer,
menacent notre sécurité. On ne les suspend pas parce qu’elles menacent le
pouvoir mais parce qu’elles menacent nos conditions de vie.
La différence ne se
situe pas entre les différents types de régime mais dans l’état de préparation
des Etats. Nous n’avons pas pris au sérieux l’expérience asiatique des précédentes
épidémies.
Le fait que nous soyons
aujourd’hui tous confinés ne doit pas faire illusion : il n’y a pas ici une
communauté d’expérience.
Responsable mais pas coupable ?
LE POINT/ÉDITO. La crise
sanitaire a montré les incohérences de notre politique de santé.
Il est urgent
de tout repenser et sans doute de revenir sur la gratuité.
Faiblesses
d’une organisation centrée autour de l’hôpital public.
Des choix
stratégiques incohérents et irresponsables.
Casser l’opposition
absurde entre hôpitaux et cliniques.
LA TRIBUNE/IDEES - L'ancienne
ministre de la Santé Roselyne Bachelot, après avoir été fortement critiquée
pour sa gestion de la crise contre le virus H1N1 en 2009, est récemment devenue
la personnalité préférée des Français, érigée en modèle à suivre en ces temps
de crise. Or, si les émotions passent, les faits ont la peau dure. Ils
indiquent que la gestion de la crise H1N1 reste un modèle à ne pas suivre. A
l'époque, les autorités ont commis nombre d'erreurs, notamment l'importance
d'associer les praticiens de ville à la lutte contre la pandémie. Nous aurions
pu tirer de cet échec des leçons utiles pour la crise que nous traversons
actuellement.
MON BLOG PERSONNEL – Il est essentiel de rappeler
que le pouvoir politique ne se conçoit pas en dehors de la responsabilité.
« Chez moi… »
FIGAROVOX/TRIBUNE -
Gare à une victoire à la Pyrrhus, prévient l’essayiste et chroniqueur. L’effet
du confinement n’est pas seulement de provoquer une crise : celui-ci menace
directement les plus fragiles, et son bilan pourrait être humain en plus d’être
économique.
Les autres affections
médicales sont actuellement moins bien prises en charge.
Le coût du confinement
actuel fait également des dégâts en vies humaines qu’il est difficile de
quantifier.
Nous devons remettre la
France au travail, et relancer autant que possible la consommation. Il est
essentiel que la victoire que nous allons remporter ne nous fasse pas pavoiser
un champ de ruines.
« Morituri te salutant »
IREF - Nous supportons aimablement les 6
millions de décès annuels dans le monde de bronchopneumopathies obstructives
chroniques et d’infections des voies respiratoires inférieures (source OMS). Et
là, tout à coup, l’univers tremble de peur, s’effondre d’anxiété, s’enferme, se
terre, refuse de travailler…parce qu’il y a un mauvais virus qu’on ne connaît
pas. Il n’a rien à voir pourtant avec nos anciennes épidémies de suette
anglaise, typhus, variole, grippe pulmonaire et autre choléra qui décimaient
parfois la moitié de la population des villes, quand pour le moment le nombre
de morts en France représente moins de 2% du nombre de morts annuels. Certes ce
chiffre augmentera. Mais comment la peur a-t-elle pu conduire aussi vite à
immobiliser le monde ?
Le règne des experts
FIGAROVOX/ENTRETIEN
- Le président du Conseil scientifique, Jean-François Delfraissy, auditionné au
Sénat, a déclaré que les personnes de 65 ou 70 ans devraient sans doute rester
confinées. Pour Christophe de Voogd, si l’avis des experts doit être pris en
compte, les bonnes décisions et la bonne communication, en démocratie, doivent
aussi tenir compte de la compétence morale du peuple.
Le Conseil scientifique et le
gouvernement auraient dû être francs dès le départ, au lieu de nier des
évidences. La technostructure n’est pas une nouveauté en France.
LE POINT/ENTRETIEN - Le philosophe, auteur du
« Petit Traité des grandes vertus », tempère l'affolement autour du
coronavirus et redoute l'avènement des experts.
Et les chômeurs, vous ne croyez pas qu'ils
méritent aussi un peu plus d'attention ?
Adorons un peu moins la nature et
félicitons un peu plus nos chercheurs.
« Ça
ira mieux demain ? »
CAUSEUR/ENTRETIEN - On nous répète que plus rien ne sera
comme avant. Le philosophe Marcel Gauchet en doute. L’exécutif ne sachant plus
à quels saints se vouer, dès que le virus aura le dos tourné, le règne des
économistes risque de succéder au gouvernement des médecins. Et le conformisme
libre-échangiste de reprendre de plus belle.
FIGAROVOX/TRIBUNE - La
véritable source d’inspiration du président n’est pas le libéralisme mais le
saint-simonisme, argumente l’historien, qui enseigne la rhétorique politique à
Sciences Po.
Organiciste, centralisateur et spiritualiste, le
saint-simonisme se distingue ainsi nettement du libéralisme, individualiste,
girondin et agnostique.
VALEURS ACTUELLES/EDITO - De nombreuses voix
évoquent un grand chamboulement après le Covid-19. Luc Ferry en doute… Je veux
croire à la possibilité offerte de revenir aux vraies valeurs !
JUSTICE
AU SINGULIER - Je ne suis pas sourd
et au fil des jours et des débats je ne peux demeurer insensible non seulement
à l'effritement de la confiance pour aujourd'hui - il s'aggrave - mais à la
montée de la défiance pour demain.
Pourquoi
attend-on d’être au fond du trou pour se demander comment on est arrivé au bord ?
Je
voudrais tellement que pour une fois le volontarisme, l’optimisme ne soient pas
déçus.
L’EXPRESS/ENTRETIEN - Le philosophe analyse l'obsession pour
le "monde d'après", raille les pseudo-prédictions scientifiques des
collapsologues et compare Trump à Jabba le Hutt...
Avant de se demander si plus rien, effectivement, ne sera
comme avant, il serait bon de se demander, en amont, à quelle pathologie correspond
une telle en vie de le croire.
Un collapsologue n’est jamais aussi clairvoyant que quand il
prédit le passé.
Il est impossible, impensable, de sacrifier les malades à l’équilibre
des comptes.
FIGAROVOX/CHRONIQUE
- Macron avait déjà annoncé que «plus rien ne serait comme avant» après la
crise des «gilets jaunes». Après le collapsus financier de 2008, son
prédécesseur Nicolas Sarkozy avait aussi prophétisé la fin du capitalisme
mondialisé.
La Commission de Bruxelles, elle, n’a
pas renoncé à son idéologie libre-échangiste : pendant la crise, elle
s’occupait avant tout d’élargir l’Union à de nouveaux États balkaniques.
Les
nouveaux conservateurs
VALEURS ACTUELLES/TRIBUNE - Retour de l'État et
des frontières, progressisme devenu une croyance surnaturelle : le monde des
Anciens ressurgit à la face des Modernes.
Ce progrès est une croyance surnaturelle qui
emprisonne les esprits depuis trois siècle dans un prêt-à-penser et des préjugés.
L’idéologie progressiste refuse qu’un
médicament ancien réponde à un défi nouveau.
La santé en France est un problème intellectuel
et idéologique.
La traduction politique est claire : usé
jusqu’à la corde, le progressisme (en gros toutes les gauches, y compris la
droite de papy) s’efface inéluctablement. L’avenir est aux forces de protection
(pour commencer, de la nature), de perpétuation et de conservation – en un mot
au conservatisme. A nous de l’instruire.
« Trop
de blabla… »
MARIANNE/OPINION
– L’inflation de la communication est peut-être un progrès, mais cela perturbe les
certitudes.
Les crises générales
sont impudiques : elles déshabillent les rois et passent les sociétés aux
rayons X, nous en montrant l’esprit.
Conséquence : plus
de lest dans le discours. La communication, dont vit la classe politique qui s’imagine
pouvoir survivre par elle à son discrédit, a tué le politique et ruiné sa
crédibilité.
L’art meurtrier du
blabla est aussi celui de ne pas répondre aux questions, mais très abondamment.
FIGAROVOX/CHRONIQUE -
Tandis que les Français cogitent sur leur sort et ruminent leur enfermement,
l’espace médiatique propose en continu un flot de mots décousus.
Comme en 40, l’absence de doctrine gouvernementale reste
cet autre écueil, visible à l’œil nu. Il révèle, au-delà des discours, une
anémie de la pensée politique.
Le nouveau monde ne peut être pensé par ceux qui l’ont mis
dans cet état.
L’EXPRESS/TRIBUNE
- Le philosophe raille la tendance
des intellectuels médiatiques à deviser, en pleine crise du coronavirus, sur le
"monde d'après" en ressassant leurs idées d'avant.
L’avenir ne dure jamais longtemps. La meilleures
leçons de l’Histoire est que personne ne retient les leçons de l’Histoire.
La mondialisation
L’INCORRECT/ENTRETIEN
- Dans Le Crépuscule de
l’universel (Le Cerf), Chantal Delsol explique que les valeurs occidentales
naguère présentées comme universelles et destinées à irriguer les cultures du
monde entier, sont de plus en plus décriées à l’extérieur comme à l’intérieur
de l’Occident. La fin d’une certaine mondialisation culturelle ?
Pour
faire simple et imagé : tant que l’Occident demandait, pour respecter les
droits de l’homme universels, d’abolir l’esclavage ou le bandage des pieds des
petites filles, cela pouvait paraitre présentable et acceptable ; mais quand l’Occident
demande, pour respecter les droits de l’homme universels, de légitimer le
mariage homosexuel et la PMA, cela devient inacceptable. Les autres cultures se
rendent compte que nous avons pété les plombs.
En
situation tragique, les théories et les habitudes s’écartent pour faire face à
la pure nécessité, mais c’est un moment unique et promis à être dépassé pour le
retour à la normale. On peut ainsi nationaliser en situation exceptionnelle
sans devenir pour autant un adepte de la nationalisation, ou bien fermer ses
frontières par nécessité tragique sans devenir un adepte des souverainetés
retrouvées…
« Nuits de Chine… »
CAUSEUR - Les opinions
occidentales sont actuellement fort timides à condamner l’abomination
communiste chinoise, laquelle est pour beaucoup dans notre malheur.
La Chine restant
un pays avec des traditions barbares, une épidémie s’y est produit.
La Chine étant
un pays communiste, elle a menti, et l’épidémie est devenue une pandémie.
Le monde
occidental subit à présent les milliers de mort de la pandémie. La Chine essaie
maintenant de voir comment elle pourrait tirer avantage du désastre. Il est
impératif de regarder la réalité en face : le désastre est un désastre communiste
chinois. La Chine devra en subir toutes les conséquences.
CONTREPOING.ORG - La crise sanitaire est en effet devenue
une bataille géopolitique. En Europe et aux États-Unis, la Chine de Xi Jinping
inquiète par sa volonté de puissance.
Les dirigeants des régimes autoritaires se servent de la
pandémie du Covid-19 comme prétexte pour renforcer et étendre des pouvoirs
injustifiés. En Chine, où l’autoritarisme a attisé la propagation du virus en
réduisant notamment au silence et en punissant les médecins qui tentaient d’avertir
la population, le Parti communiste (PCC) se vante que ses pouvoirs sans limites
et sans justification ont en réalité sauvé la Chine.
« Money,
money, money… »
CONTRIBUABLES ASS. - « Contre la
crise, nous avons choisi la dette, le seul choix responsable », a affirmé Bruno
Le Maire, ministre de l’Économie et des Finances, le 10 avril dernier, sur
Europe 1. Mais ce n'est pas un choix efficace. Ce n'est pas non plus un choix
responsable. Il serait préférable de diminuer les impôts et de réduire les
dépenses publiques simultanément.
Il est
utile de comparer le comportement de l’Etat à celui des citoyens, qu’ils soient
salariés, entrepreneurs ou travailleurs indépendants.
L’Etat n’est
pas un producteur de biens et de services. Son activité consiste
essentiellement à faire des transferts de ressources entre citoyens. Ces
transferts de ressources ne se voient pas directement car ils sont, comme dans
l’échange, pratiqués par l’intermédiaire de la monnaie.
Ce que l’on
devrait donc souhaiter c’est non pas que l’Etat emprunte davantage, mais qu’il
diminue ses dépenses publiques pour un montant égal à la diminution des
ressources fiscales (ce que feraient normalement tout individu).
Le financement
de ce déficit supplémentaire par l’emprunt implique une diminution des ressources
disponibles des prêteurs, mais il n’y a pas de raison pour que cela augmente la
production, alors que, précisément, la crise économique provient d’une
diminution des possibilités de production.
Cette
diminution de la fiscalité a toujours un effet positif sur l’activité économique,
de telle sorte qu’il peut arriver que les recettes fiscales soient stables ou
même en augmentation, comme cela a été démontré par la courbe de Laffer.
L’Etat ne
pratique pas une politique de sauvetage des entreprises, mais il s’impose
seulement comme intermédiaire entre les bénéficiaires des emprunts et les
prêteurs.
Fondamentalement ceci implique qu’il n’y a pas de gain du fait de l’intervention
étatique.
Par
ailleurs la politique de chômage partiel aide utilement les salariés à franchir
la période de récession actuelle. Mais il sera important de faciliter le retour
à une situation productive normale, d’autant plus que des entreprises auront à
rembourser leurs emprunts et qu’il faudra rembourser la dette due à l’augmentation
du chômage. Pour cela la diminution des impôts (ou, tout au moins, de certains
d’entre eux) et la diminution des réglementations joueraient un rôle essentiel.
Ainsi, le
déficit public ne permet pas d’améliorer la croissance économique en France ce
n’est pas Bruno Le Maire qui en supportera les conséquences, ni ses collègues.
« Cogito
ergo sum »
CONTREPOINTS.ORG - En
s’alliant libéralisme et individualisme peuvent donner chacun le meilleur de
lui-même, se corrigeant réciproquement de leurs insuffisances potentielles et
s’enrichissant mutuellement.
« Autre
temps… »
REVUE DES
DEUX MONDES – Boccace est un moraliste optimiste, mais qui ne se fait pas beaucoup
d’illusions sur le genre humain.
Contentement ne signifie
évidemment pas autosatisfaction, mais respect de soi. C’est bien à ce niveau
que s’est élevé Boccace et qu’il nous invite à nous élever. Que cette relecture
du premier de ses contes puisse inciter les uns et les autres à poursuivre
l’exploration de cet absolu chef-d’œuvre né d’un confinement.