Elections législatives : il faut améliorer la représentativité des députés
L’éloignement
des élites et la défiance envers les institutions sont parmi les causes
essentielles de l’échec de la Vème République. Les citoyens se reconnaissent de
moins en moins dans leurs représentants.
Selon Pierre Rosanvallon (Le Parlement des invisibles, Éditions du
Seuil), la démocratie souffre ainsi des dysfonctionnements des mécanismes de représentation,
maladie qu’il
nomme « mal-représentation » : surreprésentation des diplômés du
supérieur, des fonctionnaires et des catégories dirigeantes au détriment des
populaires, des inégalités entre jeunes et personnes âgées ou entre hommes et
femmes.
Pour Jean-Jacques Rousseau (in Du
Contrat social), la démocratie ne se conçoit que « directe ». La « démocratie
représentative » est par construction une trahison : « La souveraineté ne peut
être représentée pour la même raison qu’elle ne peut être aliénée ; elle
consiste essentiellement dans la volonté générale, et la volonté ne se
représente point. (...) Les députés du peuple ne sont donc ni ne peuvent être
ses représentants, ils ne sont que ses commissaires ; ils ne peuvent rien
conclure définitivement ». L’interdiction du mandat impératif, qui figure à
l’article 27 de la Constitution de 1958 et répond à la préoccupation de faire
de l’élu un représentant de la Nation et non d’intérêts catégoriels, accentue
le caractère ambigu de la démocratie représentative : « Mandataire du peuple,
je ferai ce que je croirai le plus conforme à ses intérêts. Il m’a envoyé pour
exposer mes idées, non les siennes : l’indépendance absolue de mes opinions est
le premier de mes devoirs envers lui. » (Condorcet).
Pourtant, le premier argument, admis
par Rousseau lui-même, est d’ordre pratique : les grands États, qui comptent
une population nombreuse, ne peuvent la rassembler en une même assemblée et
sont donc contraints de renoncer aux principes de la démocratie directe. Le
second argument faisait de la représentation une nécessité pour assurer la
direction des affaires par les plus compétents. Dans l’Esprit des lois,
Montesquieu écrivait ainsi : « Le grand avantage des représentants, c’est
qu’ils sont capables de discuter les affaires ». Enfin, la représentation
démocratique assure la stabilité politique et permet de dépasser l’intérêt
privé.
Le contexte politique et les «
affaires » de quelques-uns, l’accroissement des inégalités sociales et la crise
économique rendent plus difficile le fonctionnement de la démocratie
représentative, les citoyens ne se reconnaissent plus dans leurs représentants
– qui se traduit par une forte abstention et par une moindre adhésion des citoyens
aux partis politiques.
Or, s’il faut accroître la
représentativité du système français, on ne peut espérer réconcilier
représentants et représentés et restaurer la confiance qu’en revivifiant la
démocratie française dans son ensemble. La similarité sociale ne peut, ni d’un
point de vue normatif ni d’un point de vue pratique, constituer le principe de
base de la représentation, ne serait-ce que parce que chaque électeur
appartient à plusieurs catégories à la fois et se définit par un ensemble d’attributs
– sexe, profession, origines.
Le
principal avantage du scrutin majoritaire réside dans le fait qu'il assure une
grande stabilité gouvernementale parce qu'il parvient à dégager une véritable
majorité soudée échappant aux fluctuations politiques. On peut ainsi affirmer
que le retour à la stabilité gouvernementale sous la Ve République est dû pour une large part à
l'instauration du scrutin majoritaire en
1958.
Le reproche principal que l'on fait
au scrutin majoritaire réside dans son manque de représentativité. Tout
d'abord, en effet, en amplifiant la victoire du vainqueur, il déforme le
résultat obtenu en voix au moment de sa transformation en nombre de sièges.
Ensuite, le scrutin majoritaire élimine de la représentation parlementaire un
grand nombre de formations politiques
Le principal avantage du scrutin à
la représentation proportionnelle réside dans sa représentativité. Avec un tel
système les formations minoritaires peuvent être plus facilement représentées.
On considère également qu'il est plus juste que le scrutin majoritaire parce
qu'il reflète mieux l'état réel des forces politiques. Mais ce système aboutit
à un émiettement du nombre de sièges, ce qui rend difficile la constitution
d'une majorité politique et qui débouche le plus souvent sur l'instabilité
gouvernementale (ex : La IVe République
ou l'Italie jusqu'à une date récente).
Le système mixte s'applique pour les
élections municipales pour les communes de plus de 3500 habitants et depuis la loi du 11 avril
2003 aux élections régionales. Nous préconisons son extension
aux élections législatives, celles-ci se déroulant dans le cadre d’un scrutin
de liste paritaire homme-femme dans les limites d’une circonscription
correspondant à la région.
La circonscription électorale
L'enjeu démocratique du découpage
électoral est particulièrement important, car il s'agit d'éviter l'arbitraire
et donc la manipulation destinée à obtenir de façon déloyale un certain
résultat politique par un regroupement artificiel d'électeurs.
La région pourrait devenir la
circonscription électorale du député. Il existerait dès lors 18
circonscriptions (13 régions métropolitaines et 5 régions d’outre-mer).
Je propose que les circonscriptions
correspondent aux actuelles régions. La région forme un ensemble géographique
stable et reconnu par tous.
La répartition des sièges sur le
territoire national
Ce changement de scrutin pour les 18
circonscriptions régionales est l’occasion de revoir le nombre de députés par
circonscription pour respecter le ratio : 1 député pour 100.000 électeurs
inscrits.
Le nombre de représentants des
Français de l’étranger, bien que non concernés par la proposition, doit être
revue (tableau ci-dessous).
Les limites de la portée de la
révision
Ma proposition de révision du mode de
scrutin ne concerne pas les circonscriptions de Nouvelle-Calédonie et des
collectivités d’outre-mer régies par l’article 74 de la Constitution et les 11
circonscriptions des Français de l’étranger, compte-tenu de la variété des
accords qui nous lie à ces territoires et la spécificité de la représentation
des Français de l’étranger.
TABLEAU
1 : Ce tableau présente pour chaque région métropolitaine et d’outre-mer, ainsi
que pour les Français établis à l’étranger et les collectivités à statuts
spéciaux :
1. D’abord le
nombre d’inscrits sur les listes électorales en 2015 dans chaque région et le
poids de la région par rapport au total des inscrits.
2. Ensuite, le
nombre de sièges à l’Assemblée nationale, d’une part dans le cas de l’adoption
de la proposition présentée (ainsi que le poids du nombre de sièges par région
sur le nombre total de sièges) et d’autre part dans la situation actuelle de la
15ème législature (id.).
EXEMPLE (Points1 et 2) : Le Grand Est et la
Nouvelle Aquitaine disposent chacune de 49 sièges alors que leur poids
respectif (en nb d’inscrits) est 8,3% et 9,1%. La simulation propose alors
d’affecter 39 sièges pour la première et 43 sièges pour la seconde.
3. Enfin, le
nombre d’électeurs par député dans le cas de l’adoption de la proposition présentée
et d’autre part dans la situation actuelle de la 15ème législature.
EXEMPLE
(Point 3) : Dans la situation de la 15ème législature, un député
d’Ile-de-France représente 73.053 électeurs contre 88.820 pour un député des
Pays de la Loire. Avec la révision proposée, un député Ile-de-France
représenterait 99.805 électeurs et un député des Pays de la Loire 98.688.
Le mode de scrutin
Votre groupe de travail aborde la
question des droits de l’opposition. S’il s’agit des droits de l’opposition
parlementaire, beaucoup déjà a été fait par la réforme de 2008. J’envisage dans
cette contribution, les droits « des » oppositions non représentées,
sous représentées ou sur représentées, en abordant la question du scrutin.
Le principal avantage du scrutin
majoritaire réside dans le fait qu'il assure une grande stabilité
gouvernementale parce qu'il parvient à dégager une véritable majorité soudée
échappant aux fluctuations politiques. Le reproche principal réside dans son
manque de représentativité.
Le principal avantage du scrutin à
la représentation proportionnelle réside dans sa représentativité, il reflète
mieux l'état réel des forces politiques. Mais ce système aboutit à un
émiettement du nombre de sièges, ce qui rend difficile la constitution d'une
majorité politique et qui débouche le plus souvent sur l'instabilité
gouvernementale.
Je propose un système mixte tel que
celui appliqué depuis la loi du 11 avril 2003 aux élections régionales.
Le scrutin proportionnel à deux
tours avec prime majoritaire.
C’est le mode de scrutin retenu pour
l’élection des conseillers régionaux. Dans ce mode de scrutin, au premier tour,
il n’y a répartition des sièges que dans l’hypothèse où une liste obtiendrait
la majorité absolue des suffrages exprimés. Les sièges sont alors attribués à
chaque liste en fonction du nombre de voix obtenues par chacune d’entre elles à
l’échelon régional. La liste qui recueille la majorité absolue des suffrages
exprimés obtient une prime majoritaire de 25% du nombre de sièges à pourvoir.
Les autres sièges sont attribués à la représentation proportionnelle selon la
règle de la plus forte moyenne, à toutes les listes qui ont obtenu au moins 5 %
des suffrages exprimés.
Si aucune liste n’obtient la
majorité absolue des suffrages exprimés, il est procédé à un second tour de
scrutin. Seules peuvent se présenter les listes qui ont obtenu au moins 10% des
suffrages exprimés. Au second tour, la liste qui a obtenu le plus grand nombre
de voix obtient une prime majoritaire de 25% du nombre de sièges à pourvoir.
Les autres sièges sont répartis à la proportionnelle à la plus forte moyenne
entre toutes les listes qui ont obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés. La
liste arrivée en tête reçoit donc le plus grand nombre de sièges qu’elle ajoute
à ceux obtenus par la prime majoritaire. Elle est ainsi quasiment assurée de
détenir la majorité au sein de l’Assemblée nationale. Ce système favorise les coalitions d’entre deux tours permettant d’éclairer l’électeur sur son vote.