Djihadistes : Ces jugements de “revenants” qui font froid dans le dos
Ce que nous avions prévu est malheureusement en train de se réaliser.
Dans une note que nous avions publiée au mois de juin de cette année, nous avions écrit :
« Les djihadistes rapatriés seront peut-être tous “ judiciarisés ”, selon l’assurance donnée par le ministre de l’Intérieur, mais cette judiciarisation ne garantit aucunement qu’ils seront condamnés, s’ils sont condamnés qu’ils le seront à de lourdes peines, et s’ils sont condamnés à de lourdes peines qu’ils resteront longtemps en prison. (…)
En fait, le risque est grand que nombre de ces “ revenants “ ne puissent être condamnés que “ par défaut “, pour des faits beaucoup moins graves que les crimes qu’ils ont réellement commis ou, pire encore, qu’ils ne puissent pas être condamnés du tout. »
Et nous avions dit que c’était une folie de ne pas avoir adapté notre droit, tant qu’il était encore temps, pour pouvoir déchoir ces individus de leur nationalité française et ainsi ne pas avoir à les rapatrier.
Il semblerait que nos craintes deviennent réalité.
Dans un article publié la semaine dernière, le journal Le Figaro révélait en effet que « depuis deux mois, la cour d’assises spécialement composée - uniquement des magistrats - pour juger les crimes terroristes de combattants de la zone irako-syrienne, inflige des peines que bon nombre de magistrats et de spécialistes de la problématique terroriste estiment insuffisantes. »
Et le journal de citer un certain nombre de cas, qui font froid dans le dos.
Par exemple Chemsedine Dinar, combattant de l’État Islamique « ayant suivi un entraînement sportif et militaire plus poussé destiné aux meilleurs éléments », puis « ayant participé aux activités djihadistes de ce groupe », mais aussi « membre de la police islamique ».
Cet homme, à l’évidence extrêmement dangereux, a été condamné le 4 décembre à onze ans de réclusion criminelle sans période de sûreté, là où les réquisitions du parquet se portaient à dix-sept ans. Étant donné qu’il est en prison depuis 2015 il devrait sortir dans quelques années à peine.
Ou encore Lahcen Zligui, « combattant et poseur de bombes, arrêté à l’été 2015. Jugé le 29 novembre dernier, il est condamné à douze ans de réclusion criminelle, là où dix-huit ans avaient été requis avec une période de sûreté. »
Bien sûr le parquet peut faire appel de ces décisions, pour essayer d’obtenir des condamnations plus protectrices des Français, mais en appel le problème existe aussi.
Les cas de Mounir Diawara et Rodrigue Quenum ont récemment provoqué de l’émoi dans les milieux antiterroristes. En première instance ils avaient été condamnés à quinze ans de réclusion. Estimant la condamnation insuffisante le parquet avait fait appel, en demandant vingt ans de réclusion. Mais la cour d’appel a prononcé une peine plus légère encore : dix ans seulement.
Tous deux venus de quartiers populaires de Toulouse, Mounir Diawara et Rodrigue Quenum avaient rejoint les rangs de groupes djihadistes, d'abord le Jabhat al-Nosra puis l'organisation État islamique (EI).
Ils apparaissaient sur des photos en tenue de combat, kalachnikov en main et, pour l'un d'eux, photographié par l’autre, brandissant une tête coupée. Outre la participation à des actions militaires et à des exactions en Syrie, la justice leur reprochait d'avoir à leur retour en France fait du prosélytisme auprès d’autres d'individus pour les convaincre de partir combattre.
Des djihadistes extrêmement déterminés donc, selon toute apparence. Mais avec leur condamnation à seulement dix ans, et compte tenu de la détention provisoire qu’ils ont effectuée, ils pourraient tous deux être libérés dans peu de temps.
Mais ce qui est encore plus inquiétant que ces peines bien plus légères que celles requises par l’accusation, ce sont les motifs avancés par les cours pour justifier leur mansuétude.
En ce qui concerne Chemsedine Dinar, le combattant d’élite de l’État Islamique, la cour argue que « l’intéressé a donné de nombreuses informations » et qu’« il s’est présenté volontairement aux services de police ».
En ce qui concerne Lahcen Zligui, le poseur de bombes, elle met en avant sa « coopération pendant l’enquête et l’instruction » et « ses regrets qui apparaissent comme sincères ».
En ce qui concerne Mounir Diawara et Rodrigue Quenum, qui se photographiaient des têtes coupées à la main, la cour d’appel parle du « jeune âge » des condamnés, de « la période assez courte du séjour », de « l’absence d’antécédent judiciaire » ou encore « du rejet de l’EI exprimé à l’audience » et de leur « évolution positive ».
On croit rêver, ou plutôt cauchemarder.
Comment des magistrats peuvent-ils se baser sur ce genre de considérations pour prendre des décisions aussi graves pour la sécurité des Français ?
Comment, aujourd’hui, est-il possible de croire à la sincérité des repentirs exprimés par des djihadistes face à la justice ?
Ce n’est pas comme si nous n’avions pas déjà des exemples de ce qui peut se passer dans ce genre de cas.
Par exemple, Adel Kermiche, qui a assassiné le Père Hamel à Saint- Etienne-du-Rouvray en 2016 avait obtenu une mesure de contrôle judiciaire sous bracelet électronique malgré l’avis défavorable du parquet. Il avait, semble-t-il, réussi à convaincre des juges qu’il avait abandonné ses opinions extrémistes…
Le 29 novembre, à Londres, deux personnes ont été tuées et trois autres blessées à coup de couteau par un homme de 28 ans nommé Usman Khan. Cet homme avait déjà été condamné en 2012 à 16 ans de prison pour son appartenance à un groupe terroriste qui avait essayé de commettre des attentats à la bombe. Il avait bénéficié d’une libération conditionnelle en 2018.
Usman Khan a commis ses meurtres lors d’une conférence sur un programme de réinsertion des détenus, auquel il participait !
Comme l’a écrit Theodore Dalrymple, l’un de nos experts :
« Imaginons un instant le mépris que M. Khan a dû ressentir - à juste titre - à l’égard d’un système qui était prêt à croire toute fausse manifestation de regret pour ses actions ou n’importe quel mensonge paresseux à propos d’un changement de ses opinions. Deux jeunes gens, aveuglés par la prétention morale, se sont offerts au sacrifice. Cela a dû renforcer son sentiment que le monde occidental était complètement décadent et dépourvu de la volonté de résister à la violence islamiste. Secouez l’arbre, et les fruits tomberont ! »
N'apprendrons-nous donc jamais de nos erreurs ?
Quand donc la justice cessera-t-elle de croire qu’elle est capable de lire dans les cœurs des criminels ou des terroristes si leur repentir est sincère ou non ?
Le travail essentiel de la justice devrait être de punir les criminels à la hauteur de leurs crimes et de protéger les innocents, et à l’Institut pour la Justice nous ne cesserons jamais de nous battre pour que la justice remplisse correctement cette mission.
Ces décisions inquiétantes ne font que confirmer la justesse de nos analyses et la nécessité de notre combat.
Plus que jamais, vous pouvez compter sur nous pour faire entendre la voix du bon sens et pour défendre les victimes.