Alain Bauer : Insécurité... mais pourquoi l'Etat s'apprête-t-il à tuer le seul outil statistique un peu fiable ?

Atlantico.fr : Comment les imprécisions statistiques peuvent-elles provoquer une faillite de l’Etat français?


Alain Bauer :
Pendant longtemps on a cru que l’absence de statistiques constituait une défaillance majeure pour l’administration de l’Etat. Compter les recettes, les dépenses, recenser la population, les naissances, les malades, les morts et les blessés, les électeurs, permettaient de définir des politiques publiques, de répartir les impôts, de justifier des investissements, d’être comptable de l’usage du denier public ou de comparer des performances pour les travailleurs ou les investisseurs.

Le ministère du chiffre, devenu ministère des comptes, a peu à peu remplacé tous les autres étalons de mesure par celui de la dette ou du retour sur investissement. Les sondages d’opinion définissent pour leur part en grande partie les politiques publiques, le chiffre magique des 3% de déficit public, inventés sur un coin de table et au doigt mouillé, cornaquent la gestion des Etats, chacun ou chacune dispose de son outil de référence permettant d’affirmer sa compétence ou d’être jugé comme incapable par son opposition ou son opinion publique. Ainsi, l’appareil statistique a depuis longtemps cessé d’être un dispositif scientifique pour se transformer en outil politique.

Mark Twain disait qu’il existe trois sortes de mensonges : “Les mensonges, les sacrées mensonges et les statistiques”, les frères Goncourt ajoutaient que “la statistique est la première des sciences inexactes”.

Mais on ne pouvait s’en passer et on considérait généralement que disposer d’un outil fiable permettait de gouverner honorablement. Ainsi, en matière de criminalité, l’Etat s’était doté en 1539 d’un Etat Civil, puis en 1827 d’un compte général de l’administration de la justice criminelle, enfin après 1972 d’un dispositif national dit “4001” de recueil des faits enregistrés par les services de police et de gendarmerie et depuis 2003 d’une enquête nationale de victimation régulière mise en place par l’ONDRP et l’INSEE.

L’outil administratif policier est resté, volontairement le plus souvent, partiel, parcellaire et partial. Il a surtout servi à définir une politique légitime du résultat, rapidement transformée en politique du chiffre en application de la mode comptable du moment,

Pourtant, grâce au dispositif de victimation, on a pu voir apparaitre des écarts de prise en compte de phénomènes majeurs (violences intrafamiliales, violences contre les femmes, les mineurs, des curiosités en termes d’ élucidation, de réponse publique, de confiance aux institutions, …).

Au fil du temps, en s’appuyant sur ces outils, lentement, progressivement, des évolutions importantes se sont dessinées. La statistique a trouvé son utilité de manière paradoxale. Elle a servi à la société pour imposer une évolution des politiques de l’Etat.

Hélas, cette mutation imposée de l’extérieur a rencontré des résistances féroces, à tel point que le seul outil à peu près fiable mis en place par Nicolas Sarkozy en 2003 va bientôt disparaitre (l’ONDRP) et que l’enquête de victimation semble condamnée…
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