Edouard Husson : Non, l’unité nationale ne peut plus être invoquée par les élites françaises pour masquer leurs faillites
C'est devenu une formule rituelle: depuis le début de la crise des coronavirus, le président nous explique que nous sommes en guerre. Et il invoque l'unité nationale. Effectivement la guerre requiert l'Union Sacrée. Elle a été rare dans notre histoire mais elle a existé, quand les Français comprenaient contre qui ils se battaient. En l'occurrence, en cette année 2020, les Français Ce n'est pas seulement qu'on leur explique qu'ils se battent actuellement contre un virus - en fait, plusieurs virus successifs nous disent de plus en plus les spécialistes. C'est qu'ils ne ressentent aucune solidarité réelle des élites envers la nation. Richard Ferrand en a fait hier l'éclatante démonstration: en expliquant aux Français que c'était de leur faute s'ils attrapaient le coronavirus, ce proche d'Emmanuel Macron résume tout le grand malentendu sur lequel repose le macronisme. La part la plus aisée de la population française a voté pour que la France se "remette en marche". Le président a été mal élu au second tour (forte abstention, un tiers des voix pour une candidate populiste) mais, lors des élections législatives, l'immense majorité acquise grâce à une abstention encore plus forte pouvait conduire à un sursaut de lucidité: les députés de LREM pouvaient devenir des "missi dominici", des ambassadeurs de la politique du président. A condition d'être consultés, associés aux décisions. Et que le président soit prêt à dialoguer avec l'opinion. Au lieu de cela, nous avons eu l'affirmation d'un "exercice solitaire du pouvoir" comme la Vè République n'en avait jamais connu, qui après une année relativement calme, enchaîne les crises: Gilets Jaunes, conflit des retraites, confinement pris dans la panique, reconfinement décidé pour masquer l'inaction. Et Monsieur Ferrand, lui-même fortement soupçonné de corruption, fait la leçon au Français pour dissimuler le fait que nous avons affaire à plus mauvais encore que les gouvernements de François Hollande.