«Lever l’anonymat sur la toile» - Par Luc Ferry


Faute d’avoir le courage de lever l’anonymat sur les réseaux sociaux, je crains que la régulation de Twitter et des Gafam qu’envisage à juste titre l’Union européenne avec son «Digital Service Act» soit au final peu efficace. Voici pourquoi.

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Au cours des dernières semaines, Twitter a non seulement fermé le compte de Donald Trump, mais aussi celui de 70.000 de ses partisans les plus violents, ceux qui appartiennent au groupe QAnon. Si, dans une enquête d’opinion, on pose la question sous la forme suivante: «Êtes-vous satisfait que Twitter empêche des complotistes délirants d’appeler à des mouvements insurrectionnels violents?», il est évident qu’on aura toutes les chances d’obtenir une réponse positive. Le problème, c’est que la question, ainsi formulée de manière biaisée, passe totalement à côté du sujet qui devrait être en substance le suivant: «Trouvez-vous normal que des entreprises privées pilotent le débat public, censurent un président démocratiquement élu alors qu’elles donnent la parole à des islamistes qui appellent au meurtre et ne censurent ni les contenus haineux, ni les insultes racistes, antisémites, ni les menaces de viol et de mort?» Là, j’ai bon espoir que la réponse serait différente, comme quoi dans les sondages, la formulation d’une question est parfois plus importante que les réponses.