"La paix des sexes" par Tristane Banon & "Les hommes et les femmes: Notes sur l'esprit du temps" par Jean-Michel Delacomptée
La journaliste Tristane Banon et l’universitaire Jean-Michel Delacomptée étudient les conséquences de la révolution néoféministe déclenchée par le mouvement #MeToo dans leur essai sur le sujet. Chacun à sa manière redoute que celle-ci conduise à opposer les hommes et les femmes.
"La paix des sexes" par Tristane Banon
"Les hommes et les femmes: Notes sur l'esprit du temps" par Jean-Michel Delacomptée
Avec son esprit pénétrant et sa plume inspirée, Jean-Michel Delacomptée examine la révolution des mœurs en cours, amplement importée des États-Unis, où s’invente une modernité aveugle aux conséquences de ses choix. Devant l’avenir qu’obscurcit le sectarisme de revendications sans limites, il se livre à une ardente défense de notre souveraineté morale, clé d’une indispensable préservation de l’humanisme et de la haute culture sur lesquels repose la fragile grandeur de notre civilisation.
Tristane Banon et Jean-Michel Delacomptée: «La Guerre des sexes aura-t-elle lieu?»
Pour Le Figaro Magazine, ils confrontent leurs points de vue, prouvant ainsi que les deux sexes peuvent continuer à se parler.
Tristane Banon, vous vous inscrivez dans un féminisme traditionnel, dans la filiation de Simone de Beauvoir. Jean-Michel Delacomptée, vous décririez-vous comme féministe ou pensez-vous que les dérives actuelles s’inscrivent dans l’héritage des premiers auteurs féministes?
Jean-Michel Delacomptée - Je comprends tout à fait le combat féministe sous l’angle de l’égalité des droits, qui, pour l’essentiel, me paraît acquise.
Les féministes se chargent de cette tâche et sont dans leur rôle. Je suis évidemment en plein accord sur l’égalité de droit, contre les violences, pour le respect des femmes. J’ai été éduqué comme cela, ma mère étant elle-même féministe, sans nécessairement se qualifier ainsi. Depuis tout petit, je baigne dans cet idéal.
En revanche, je ne me déclare pas féministe. C’est un combat que je respecte, dont je ne récuse nullement les bienfaits, mais qui me paraît aujourd’hui envahissant, écrasant, en ce que les hommes sont désormais suspectés a priori d’être sinon des monstres, du moins des oppresseurs. Ajoutées à la propagande gouvernementale, cette suspicion, ces accusations, ces critiques permanentes deviennent franchement pénibles. En tant qu’homme, j’en éprouve l’injustice, et en tant que père, je me sens profondément blessé.
Jean-Michel Delacomptée - Je comprends tout à fait le combat féministe sous l’angle de l’égalité des droits, qui, pour l’essentiel, me paraît acquise.
Les féministes se chargent de cette tâche et sont dans leur rôle. Je suis évidemment en plein accord sur l’égalité de droit, contre les violences, pour le respect des femmes. J’ai été éduqué comme cela, ma mère étant elle-même féministe, sans nécessairement se qualifier ainsi. Depuis tout petit, je baigne dans cet idéal.
En revanche, je ne me déclare pas féministe. C’est un combat que je respecte, dont je ne récuse nullement les bienfaits, mais qui me paraît aujourd’hui envahissant, écrasant, en ce que les hommes sont désormais suspectés a priori d’être sinon des monstres, du moins des oppresseurs. Ajoutées à la propagande gouvernementale, cette suspicion, ces accusations, ces critiques permanentes deviennent franchement pénibles. En tant qu’homme, j’en éprouve l’injustice, et en tant que père, je me sens profondément blessé.
J’ai deux grandes filles que j’aime infiniment et dont je suis très proche. Et je peux vous assurer que je ne connais aucun homme qui se comporte mal avec ses filles, avec les femmes de sa vie. Je suis fatigué des attaques contre le patriarcat. Comme si en France, nous vivions dans une société telle que l’Afghanistan. Ces dénonciations du patriarcat qui prévaudrait aujourd’hui chez nous ont quelque chose d’abusif, et même de délirant.
Tristane Banon- Ce n’est pas parce que vous n’avez jamais rencontré de violence qu’il n’en existe pas. Vous ne savez pas ce qu’il se passe une fois les portes fermées. Et vous ne prenez pas davantage en compte les violences psychologiques. Bien malin celui qui peut dire de toutes ses fréquentations qu’elles sont exemptes de toute violence.
Penser que le combat féministe est un problème de femmes est une erreur. Je rencontre beaucoup d’hommes gênés des dérives du néoféminisme parce que, précisément, ils considèrent que ce combat est aussi le leur. Et ils ont raison. Que le néoféminisme les en éloigne en installant un climat délétère entre les sexes est une hérésie. Je veux rallier ces hommes au combat de l’égalité.
Tristane Banon contre l’égarement néoféministe
Dans son dernier livre, Tristane Banon se dresse contre la victimisation “systémique” des néoféministes wokisées. Alors, forcément, Isabelle Marchandier – chroniqueuse anti-woke toujours à l’affût – l’a lu pour Causeur…À l’heure où les hasthag #metoo déferlent sur la toile et font tomber les puissants et les icônes d’hier, lire le dernier essai de Tristane Banon, une féministe pas comme les autres, s’avère salutaire. Derrière sa silhouette fluette, Tristane Banon est une femme forte, une amazone guerrière comme l’ont été les féministes des années 70 – lesquelles se considéraient plus comme des combattantes que comme des éternelles victimes.
En prenant la plume, Tristane Banon livre une bataille non pas sur le terrain de l’acharnement judicaire contre son ancien agresseur présumé, mais sur le plan idéologique contre toutes ces néoféministes qui ont instrumentalisé le statut de victime au détriment de l’égalité entre les sexes et du droit des femmes.
Selon Banon, le féminisme s’est perdu dans les abimes d’une victimisation qui est bien “systémique”, elle, pour le coup ! La paix des sexes, le titre de l’ouvrage, résonne comme une provocation. Provocation adressée à la face des militantes professionnelles qui préfèrent dégainer #balancetonporc dans des tribunaux populaires 2.0 au moindre dérapage verbal d’un goujat qui oublierait les codes de la galanterie, plutôt que de défendre Mila ou les femmes afghanes prisonnières de la terreur misogyne exercée par la charia talibane.
«Hommes et femmes, la grande confusion»
L’écrivain Jean-Michel Delacomptée, dans son nouvel essai, Les Hommes et les Femmes. Notes sur l’esprit du temps (Fayard), porte un regard inquiet sur l’évolution des rapports entre les sexes. Un ouvrage clair, élégant et subtil, appelé à susciter de vifs débats.LE FIGARO.- Vous analysez dans votre essai un «effondrement des piliers qui soutenaient l’évidence» d’un «ordre des choses qui, des hommes et des femmes, faisaient des êtres voués à se connaître et à se méconnaître, se disputer, se réconcilier, s’étreindre, s’aimer». Qu’entendez-vous par là?
Jean-Michel DELACOMPTÉE.- Je me place en moraliste, c’est-à-dire dans la position de qui observe les mœurs de ses contemporains pour tirer certaines leçons de ce qu’il voit et entend: une révolution des mœurs dont nous nous abstenons de mesurer les risques. Nous sommes entrainés dans un vertige de réformes réalisées au nom d’un progrès dont nous ignorons les ressorts et négligeons les conséquences. Cette révolution morale, sociétale dans le discours des experts, se déroule en Occident, où l’on en vient à se demander si l’on est un homme ou une femme et à hésiter sur son genre.
Ce chaos sans précédent ruine ce qui constituait jusqu’alors le socle de nos vies, à savoir la différence sexuelle considérée au prisme de la reproduction et de la cellule familiale. L’individualisme qui atomise le corps social se réclame des droits de chacun à être ce qu’il veut être, au prétexte d’un «ressenti» présenté comme l’alpha et l’oméga de la liberté personnelle. Le féminisme militant, rejeton difforme du très légitime désir d’émancipation féminine, s’acharne à faire table rase du passé en détruisant le «patriarcat», vu comme l’origine absolue de tous les maux de la terre.