Liberté chrétienne et culture européenne - Par Philippe Nemo

On peut poser en thèse que ce sont la Bible et l’Évangile qui ont apporté au monde — et d’abord au monde chrétien, donc à l’Europe — la liberté telle que nous la comprenons aujourd’hui. Bien entendu, dans les époques antérieures, l’homme a été largement libre en pratique. Qui pouvait imposer au chasseur-cueilleur de la préhistoire de suivre le chemin de droite plutôt que de gauche ? Qui pouvait dire au paysan mésopotamien ou égyptien à quel moment semer ou récolter ? Eux seuls en jugeaient d’après les circonstances et l’expérience. Le problème est que ces hommes étaient étroitement intégrés à leurs groupes, prisonniers des mythes et des rites de ceux-ci. L’individu ne pouvait ni penser ni agir librement sans s’attirer l’hostilité du groupe craignant de mécontenter les puissances sacrées. Aujourd’hui, en Europe, nous concevons bien autrement la liberté. Nous pensons être libres de faire tout ce que les règles de juste conduite morales et juridiques n’interdisent pas de faire, c’est-à-dire tout ce qui ne nuit pas directement à autrui. Nous pensons n’être soumis à la volonté arbitraire de personne, que ce soient des personnes privées ou l’État ; l’État de droit est censé nous garantir de toute coercition arbitraire. Nous estimons avoir le droit de faire, non pas « n’importe quoi », arbitrairement, mais ce que nous pensons devoir faire. Nous pouvons choisir notre travail, notre employé, notre employeur, créer des entreprises, des associations, même si cela déplaît à tel ou tel ; concevoir et exprimer publiquement des pensées différentes de celles du groupe ; choisir une voie, nous y engager, nous y tenir. En un mot, nous pensons être libres d’utiliser nos idées et nos ressources pour poursuivre les objectifs que nous choisissons nous-mêmes et qui nous semblent légitimes, et non ceux imposés par autrui ou par une autorité sociale. Mais il y a plus. Nous savons intimement que si nous pouvons être libres en tous ces sens psychologiques, sociaux et juridiques, c’est parce que, plus fondamentalement, nous le sommes en un sens ontologique. Nous croyons qu’il dépend de nous d’être ce que nous voulons être, que nous pouvons donc changer, s’il le faut, notre condition individuelle et collective. Cette forme ontologique radicale de la liberté humaine, c’est elle que nous devons à la Bible et plus spécialement au christianisme.


Pendant des siècles, les chrétiens ont répété chaque dimanche au début de la messe les mots : mea culpa, mea maxima culpa. Si l’on y réfléchit bien, ces mots sont le strict équivalent de ceux-ci : je suis libre. En effet, il ne saurait y avoir de culpabilité là où il n’y a pas de liberté. Si je peux me reprocher mon péché et plus généralement l’état désastreux du monde et de l’humanité, si tout cela est, à quelque degré, « ma faute », c’est que j’aurais pu faire en sorte qu’il en allât autrement, c’est que je n’étais pas soumis à une nécessité implacable. Autrement l’imputation de responsabilité n’aurait aucun sens. Or les chrétiens, pendant des siècles, ont prononcé leur mea culpa. La liberté est donc devenue pour eux comme l’air qu’on respire, une seconde nature.

Les patrimoines théologique, philosophique, littéraire et artistique de l’Europe nous offrent de quoi étayer abondamment cette thèse. Mais je voudrais attirer l’attention sur la formulation qui en a été donnée par deux penseurs originaux du XXe siècle, Emmanuel Levinas et René Girard.

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