Le Cens de l'État : Comprendre la crise du politique par la modernité fiscale - De Hubert Etienne (Editions Les Belles Lettres)

Dans son essai Le Cens de l'État, Hubert Etienne analyse les mutations de l'impôt et ce qu'elles révèlent de l'évolution du lien entre l'État et le citoyen. Le prélèvement à la source illustre par exemple l'érosion du consentement, explique-t-il.


Depuis 2019, l’impôt sur le revenu des Français est prélevé à la source. Ce qui pourrait passer pour une réforme mineure d’ordre pratique marque en fait l’aboutissement d’une longue évolution de la théorie de l’impôt débouchant sur une doctrine contraire aux principes mêmes qui le légitiment. Cette relecture raisonnée de l’évolution de l’impôt en France dans ses théories, ses modalités et son acceptation populaire, conduit le lecteur des origines mythiques de l’impôt-sacrifice au sein des sociétés tribales à l’impôt instrument de gouvernance en passant par l’impôt servitude des seigneurs féodaux, l’impôt-échange des libéraux révolutionnaires et l’impôt-solidarité des économistes de l’État providence.

L’auteur s’y propose de pointer dans des réformes telles que l’introduction d’un impôt sur les grandes fortunes, le prélèvement à la source ou les procédures de saisie sur salaire, la profondeur des mutations sociales qui en découlent et la manière dont elles redéfinissent le rapport entre le citoyen et l’État. Détaillant comment l’économie a imposé dans la pratique du pouvoir et la théorie du droit sa rationalité statistique, il dresse le saisissant portrait d’une époque où le consentement est mort, les droits fondamentaux bafoués et la responsabilité politique vidée. Une telle entreprise globale de rationalisation de la société ne saurait alors accoucher que d’agents économiques à l’amoralité glaçante.

Cette réflexion de grande ampleur s’achève sur une critique approfondie de l’allocation universelle, présentée comme fausse solution au problème politique et moral auquel la société doit aujourd’hui faire face. A ce leurre, une alternative audacieuse est suggérée : le retour d’une société de la responsabilité individuelle et de l’honneur, où l’impôt volontaire se présente comme vecteur fondamental de toute distinction sociale et moteur démocratique d’empathie entre les citoyens.^

«Aujourd'hui, l'impôt n'est plus vraiment consenti, et cela explique la crise politique que nous traversons»


FIGAROVOX. - Votre livre ambitionne de comprendre la « crise du politique » en analysant l'évolution de notre rapport à l'impôt. En quoi la fiscalité permet-elle de comprendre les métamorphoses de notre société ?

Hubert ETIENNE. -
L'impôt est l'expression la plus directe du rapport entre l'individu et l'État. Les manières de le calculer, de le collecter et de l'utiliser ont changé au cours des siècles mais il y a toujours eu une forme d'impôt dans les sociétés structurées autour d'une organisation publique. C'était déjà le cas chez les Grecs et les Romains et on peut considérer que ça l'était aussi chez les sociétés dites archaïques.

Tel qu'il avait été pensé à la Révolution, en opposition à la fiscalité médiévale, l'impôt était un sacrifice consenti par chacun pour financer l'action de l'État en vue de certains buts communs que sont la sécurité des biens et des personnes. Dans leur évolution, les règles d'imposition témoignent d'une certaine idée de justice sociale dans laquelle une population se reconnaît. Par les objets qu'il frappe, l'impôt illustre des choix de société à l'instar des taxes sur le tabac et l'alcool qui frappent des comportements que l'on cherche à décourager. Mais plus encore, par la manière dont cet impôt est décidé, mis en œuvre, et par le niveau de consentement de la population, il nous renseigne sur la relation entre un État et ses citoyens.

Ce que je montre dans ce livre, c'est que des choix qui peuvent sembler anodins comme la retenue à la source ou la saisie sur salaire sont en fait lourds de sens. Ils témoignent de changements profonds dans la manière dont l'État perçoit son action et le rôle qu'il assigne aux citoyens.


Impôts, taxes, don... : pour une redéfinition du lien fiscal entre l’individu et l’Etat

Hubert Etienne : «La fiscalité volontaire permettrait à la fois un consentement véritable à l’impôt, une réduction forte des disparités de fortune, le renforcement de la cohésion nationale et une justice fiscale et sociale inespérée»

C’est à une vraie déconstruction des pratiques fiscales de l’Etat français que se livre Hubert Etienne dans Le Cens de l’Etat. Avec brio, ce spécialiste en philosophie politique et morale remet en question présupposés et biais idéologiques. L’Opinion publie en exclusivité les synthèses des trois parties de l’ouvrage.

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