Le « sacro-saint » principe de précaution et l’apologie de la garantie en France… - Par Sébastien Lalevée
L’épreuve sanitaire extraordinaire que traverse le monde depuis 18 mois a ravivé avec fracas la réflexion autour du « sacro-saint » principe de précaution. Si, sur le plan éthique et celui de la responsabilité collective, le concept est théoriquement fondé sur des intentions louables, la portée pratique du principe et ses conséquences sont discutables. Aussi, déplorons l’absence dans le débat de la notion de coût d’opportunité qui est difficilement mesurable mais réel.
En France sans doute plus qu’ailleurs, le principe de précaution fait loi, et depuis près de deux décennies au sens propre du terme. En 2005, à l’apogée de sulfureux débats environnementaux et alimentaires concernant les OGM, initiés au cœur des années 90, le principe de précaution a été inscrit dans la Constitution française sous l’impulsion du Président Jacques Chirac. Parmi les principales critiques déjà émises à l’époque par les détracteurs du principe, l’absence de véritable définition n’offrant pas un cadre juridique assez clair selon certains juristes, tandis qu’une partie de la communauté scientifique pointait du doigt le coup porté à la liberté de la recherche. Dès son entrée en application, le principe s’est vite éloigné des notions de proportionnalité et de circonstances qui devaient le caractériser.
Seize ans plus tard, l’acuité de ces enjeux législatifs et philosophiques reste intacte. Notre industrie de la santé n’est pas aidée par cet état d’esprit. La France n’est plus une terre d’accueil naturelle pour les essais cliniques. La culture française de la centralisation et des champions nationaux n’aide pas au foisonnement d’idées quand celles-ci ne sont pas validées en amont parfois par une forme de consensus non officiel peu propice à l’innovation de rupture. Est-ce étonnant que Sanofi, leader mondial des vaccins, n’ait pas cru au potentiel de l’ARNm pour ce segment de marché alors que cette même entreprise avait accumulé du retard il y a 20 ans, lors de l’essor des biotechnologies ? La récente prix Nobel de Chimie Emmanuelle Charpentier (dont la technologie permet la réalisation d’OGM, interdits en Europe…) a clairement expliqué son départ de France par les difficultés liées aux financements de ses recherches et à la lourdeur administrative dans tous les domaines. Et que penser du financement par l’Angleterre des essais cliniques du vaccin anti-Covid de la biotech « Valneva » née à Nantes ?