Réforme des retraites, la vérité n’est pas toujours bonne à dire - Par Maxime Tandonnet
Eric Ciotti, Bruno Retailleau et Olivier Marleix ont estimé que les "bases d’un accord sont posées" sur la réforme des retraites, en sortant de leur entretien avec Elisabeth Borne à Matignon. Mais en soutenant la réforme des retraites, Les Républicains font un cadeau au gouvernement, estime l'essayiste Maxime Tandonnet, qui risque selon lui d'être perçu par une partie de l'électorat comme un abandon de la France éloignée des métropoles.
Ci-dessous une tribune pour le Figaro Vox et un entretien pour Atlantico précisant la position que j’ai exprimée sur la réforme des retraites. Au vu des commentaires qui me parviennent et de nombreuses réactions en privé, ma position est largement incomprise. On me dit: comment peux-tu être opposé à une mesure (les 64 ans) préconisée par la droite LR depuis longtemps et que le gouvernement a accepté de prendre en compte? A mes yeux cet argument ne tient pas la rampe. Il faut aller plus loin et réfléchir, penser à ce qu’il y a derrière les 64 ans. J’y vois avant tout une mesure totémique, un attrape-mouches. La durée de cotisation est porté à 43 ans ce qui soulève moins de contestation dans le pays. L’âge du premier emploi est selon l’INSEE à 22 ans et 5 mois en moyenne. Les 64 ans sont de fait largement atteints sans qu’il soit besoin d’agiter un chiffon rouge. Et s’il s’agit de faire payer ceux qui justement sont entrés plus tôt sur le marché de l’emploi avant 21 ans (ayant fait moins d’études) en les obligeant à cotiser plus de 43 années pour atteindre les 64 ans, alors la mesure est injuste et donc mauvaise (dégueulasse en terme vulgaire…). C’est mon droit de penser cela. J’ajoute qu’il est de mon point de vue absurde de prendre la réforme des retraites isolée d’une politique d’ensemble (explosion de la dette publique, quoi qu’il en coûte, atteintes aux libertés, effondrement industriel, sanitaire et scolaire, régalien). Les 64 ans sont avant tout un emblème macroniste destiné à se présenter en réformateur. Ils vont plonger le pays dans une nouvelle crise sociale et affaiblir encore davantage son tissu des petites entreprises. Je trouve tout cela bien répugnant de cynisme d’une part, de bêtise d’autre part. Merci à Figaro Vox et à Atlantico avec Bruno Jeanbart, d’avoir bien voulu solliciter mon point de vue sur le sujet.
Réforme des retraites, la vérité n’est pas toujours bonne à dire | Maxime Tandonnet – Mon blog personnel (wordpress.com)
Retraites: «LR a choisi de se ranger derrière la majorité présidentielle, contre la France périphérique»
Par Maxime Tandonnet
L'argument donné par la droite LR pour soutenir la réforme des retraites est que le report du départ à la retraite à 64 ans est une de ses préconisations anciennes. De fait, le président de la République et sa majorité, eux, n'ont pas le même scrupule de changer d'avis. Lors du projet de réforme des retraites de 2020 avorté, ils excluaient catégoriquement un rallongement de l'âge du départ à la retraite qualifié à l'époque «d'hypocrisie».
Alors pourquoi 64 ans aujourd'hui ? C'est une réponse politique à la promesse de campagne du président Macron de porter l'âge du départ à la retraite à 65 ans, dont l'objectif était de couper l'herbe sous le pied de la candidate LR. Ce choix est avant tout politique. Il vise à montrer l'occupant de l'Élysée en réformateur, à donner un contenu à son bilan dans la perspective de 2027 et de l'élection de son successeur. Certes les arguments de bon sens en faveur des 64 ans ne manquent pas : rallongement de l'espérance de vie, baisse du rapport entre retraités et cotisants, nécessité de combler les déficits. Cependant, il est absolument mensonger de prétendre que ce report de deux ans de l'âge de départ constitue une sorte de remède miracle ou de solution unique et inévitable.
Non seulement LR soutient cette réforme mais il en revendique l'inspiration.
Par des manœuvres politiciennes en coulisse, ils reconstituent la majorité absolue que le peuple a clairement et sans la moindre ambiguïté refusée lors des législatives au président Macron.
Retraites : LR pris au piège d’un réduit sociologique ?
Avec Maxime Tandonnet
Maxime Tandonnet : Ce sont les officiels de LR qui se sont exprimés en faveur de ce soutien, le cœur de l’état-major ou « l’établissement » de LR, les présidents de groupes parlementaires et le président du parti. Dans ce choix, il y a un souci de cohérence et de continuité avec la position que le parti a toujours préconisée depuis 2012 en faveur d’un report de l’âge de la retraite. Et sans doute aussi une part de conviction libérale : reporter l’âge de la retraite dans un objectif d’équilibre des comptes à long terme compte tenu des évolutions démographiques. C’est aussi un choix politique qui consiste à montrer que LR est un parti de gouvernement privilégiant l’intérêt du pays sur les clivages politiques dans une optique d’opposition constructive. En revanche le refus de cette réforme par une minorité de LR montre qu’il existe un noyau d’irréductibles, qui considère que la réforme des retraites ne peut pas être considérée isolément d’une politique d’ensemble et qui n’accepte pas de se soumettre au macronisme.