Édouard Tétreau: «Enfant tué à Nîmes, où sont passés les indignés?»

Après le décès par balle de Fayed, un enfant de 10 ans, à Nîmes, lors d’un règlement de comptes entre trafiquants, l’essayiste regrette que cette tragédie ne suscite pas une réaction politique forte et appelle à faire de la lutte contre la drogue la priorité nationale.

Le 27 juin dernier, Nahel Merzouk, 17 ans, inscrit au fichier TAJ (traitement des antécédents judiciaires), est tué par un policier après avoir refusé d’obtempérer, au volant d’une Mercedes Classe A jaune immatriculée en Pologne. La suite est connue: l’indignation présidentielle pour une mort «inexplicable, inexcusable». La minute de silence exigée par Yaël Braun-Pivet à l’Assemblée nationale le lendemain matin. Le tweet au «petit ange parti trop tôt» de Kylian Mbappé. Jean-Luc Mélenchon appelant à «ne pas toucher aux écoles», mais pour le reste, l’absence de consignes a été bien reçue. Résultat: des nuits de pillages, d’émeutes et de violences firent brûler immeubles, voitures, commerces, blessèrent 737 policiers. Et une tentative d’assassinat sur la famille de Vincent Jeanbrun, maire de L’Haÿ-les-Roses, emblème d’une République assiégée mais qui ne se laisse pas faire.

Lundi dernier, un militaire français originaire de Mayotte, en permission chez sa sœur à Nîmes, raccompagne ses neveux en voiture. Prise dans les tirs croisés d’un règlement de comptes de trafiquants de drogue, la voiture devient une cible. Fayed, 10 ans, touché par des tirs de kalachnikov, meurt sous les yeux de son petit frère. L’oncle, criblé de chevrotine, réussit à conduire la voiture jusqu’aux urgences, où il sera sauvé. Où est l’indignation présidentielle? Où sont les tweets des stars du foot, les «pensées et prières» depuis Los Angeles de la star franco-hollywoodienne Omar Sy? La minute de silence? La colère face à ces assassinats à l’arme de guerre, en pleine ville? (38 à Marseille en huit mois)

Deux poids, deux mesures. La colère, les hommages, l’insurrection pour Nahel. Le «silence, on tue» pour un enfant de 10 ans, tué non pas pour un refus d’obtempérer, mais parce que sa famille vit en France dans un quartier tenu par les trafiquants. «On fait tout pour se trouver toujours aux bons endroits aux bons moments (…) on prie que le mauvais moment n’arrive pas à nous», a dit avec force et simplicité le père croyant, Français musulman, de l’enfant assassiné. «Un de mes meilleurs élèves», ajoutera son institutrice, Marie-Laure.