18 septembre 1180 : Louis VII est mort.
En 1179, Louis VII va sur ses soixante ans. Malade, fatigué et vieilli, il se résout à associer au trône son fils unique, le futur Philippe II Auguste, et à le faire solennellement couronner à Reims. Soucieux de l'avenir du royaume, le souverain pressent qu'il ne lui reste plus longtemps à vivre. Il va être rappelé à Dieu le 18 septembre 1180.
LIRE EGALEMENT : LOUIS VII LE JEUNE, roi de France (1.8.1137 au 18.9.1180 associé au trône depuis le 25.10.1131) (grandeschroniquesdefrance.blogspot.com)Le pape Alexandre III conseille à Louis VII d'associer son fils au trône, de le faire couronner et d'astreindre les grands du royaume à lui prêter serment. Le roi n'est pas pressé, bien que depuis qu'il a passé la cinquantaine il se sente fatigué et vieilli, et qu'il ait été victime, en 1177, d'une première attaque de paralysie. Il ne s'y résout qu'en 1179, l'année de la majorité de son fils, le futur Philippe II Auguste, qui doit fêter ses quatorze ans le 21 août. Le souverain convoque les grands seigneurs ecclésiastiques et laïques au palais épiscopal de Paris et "leur annonce qu'il veut, avec leur conseil et leur assentiment, faire couronner son très cher fils, Philippe, le jour de la prochaine fête de l'Assomption. Après avoir entendu la volonté royale, tous s'écrient d'une voix unanime : 'Soit! Soit!' Et sur cette acclamation fut prononcée la clôture de l'assemblée", rapporte le chroniqueur Rigord de Saint Denis.
Quelques jours avant la date prévue du sacre, le souverain et son fils se rendent à Compiègne, étape sur la route de Reims et séjour apprécié des Capétiens, tous grands chasseurs. C'est là qu'un événement insolite va empêcher les cérémonies de se dérouler le 15 août.
Alors qu'il poursuit un sanglier dans le bois de Cuisse la Motte, le prince Philippe s'éloigne de ses compagnons. Surpris par la nuit, il se perd et erre prendant trente six heures. Il est enfin retrouvé par un voyageur et ramené à sa famille, bouleversé par cette aventure, mourant de faim et de fatigue. Au cours des semaines suivantes, il reste prostré, tant le choc nerveux a été violent, et tous le croient perdu. Pour l'heure, il n'est plus question de sacre. Est-ce un funeste présage? Est-ce l'oeuvre de Satan, "cet ennemi qui se complaît à corrompre les bonnes semences", comme l'affirmera plus tard Guillaume le Breton, auteur de la Laus Philippi?
Au désespoir, le roi songe à se rendre sur la tombe de Thomas Becket, le martyr de Cantorbéry canonisé en 1173, où se sont produits bien des miracles. Seul l'archevêque, à qui il a apporté soutien et protection lors du conflit l'opposant au roi d'Angleterre Henry II Plantagenêt, lui semble pouvoir intercéder en faveur de son fils. Il se met aussitôt en marche, accompagné de quelques fidèles, dont le parrain du jeune malade, le comte Philippe de Flandre. A la fin du mois d'août, foulant pour la première fois le sol de la Grande Ile, il est accueilli à Douvres par son vieil adversaire le roi Henry II dans une grande magnificence. Ensemble, les souverains se rendent à Cantorbéry, où, pendant deux jours, ils se recueillent longuement pour demander la guérison de l'héritier de la Couronne de France. Curieusement, le Plantagenêt prie pour le fils de son ennemi d'hier, qui plus est sur la tombe d'un saint dont on l'accuse d'avoir commandité l'assassinat! Avant de partir, Louis VII fait don au monastère de Cantorbéry de sa coupe d'or personnelle et attribue aux moines le revenu annuel de cent muids de vin du domaine royal.
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En septembre, le roi est de retour à Paris, après avoir fait étape à l'abbaye de Saint Denis pour se recueillir devant les reliques. Brisé par l'émotion et épuisé par le voyage, il est pris d'un refroidissement qui provoque une hémiplégie droite et le prive de la parole. Mais il n'a pas souffert en vain : le prince Philippe est rétabli! Le souverain a surtout eu le temps de donner des ordres de célébration du sacre et de faire rédiger l'édit convoquant les grands du royaume à Reims pour la Toussaint 1179. Ce jour-là, il ne peut assister aux cérémonies. Désormais cloué au lit, il devient le spectateur de la dernière année de son règne; pendant que Philippe Auguste agit en souverain, rompant dans plusieurs domaines avec sa politique. Au printemps 1180, le jeune roi enlève le sceau royal à son père; afin "que Louis ne pût, à l'insu de son fils décréter qoui que ce fût dans le royaume", précise un chroniqueur anglais. En avril, il épouse sans le consentement paternel Isabelle de Hainaut, la nièce du comte de Flandre.
Souverain privé de tout pouvoir, Louis VII s'éteint le 18 septembre 1180, en son palais parisien de l'Ile de la Cité, à l'âge de soixante ans et après quarante trois ans de règne. Pieux et simple jusqu'au bout, il a dédaigné la nécropole royale de Saint Denis, préférant être inhumé dans l'église de l'abbaye cistercienne Notre Dame du Barbeau, qu'il a fondée près de Fontainebleau. Gravée sur sa tombe, son épitaphe sonne comme une dernière recommandation à son fils : "Celui à qui tu survis, tu lui survis successeur de sa dignité. Tu manques à la lignée si tu manques à sa renommée".