26 septembre 46 av. J.-C.: "Ainsi périt Vercingétorix..." (ou l'histoire du premier gaulois réfractaire)


« ll se lève enfin, le jour qui devait mettre un terme aux outrages dont ce grand homme était abreuvé depuis 5 ans, et où César allait étaler aux regards des Romains les dépouilles de l'univers (An de R. 706. - Av. J.-C. 46). Dans ce triomphe, d'une magnificence inouïe, Rome, à laquelle le dictateur avait ravi sa liberté, n'était pas moins humiliée que les nations vaincues.

En avant du char du triomphateur marchaient tous ces braves chefs gaulois victimes de leur amour pour la patrie ; au milieu d'eux attirait tous les regards, par la majesté de sa taille, Vercingétorix, les bras chargés de fers, mais le front rayonnant de la triple auréole d'une gloire sans tache, du génie et du malheur…

César était parvenu à l’endroit du Forum où s’éleva plus tard et où paraît encore, après tant de siècles l’arc de triomphe de Septime-Sévère. La Voie Sacrée se divise : l’embranchement de gauche serpente sur les flancs du Capitole et va aboutir au temple de Jupiter. Le dictateur y pénètre, la couronne de lauriers sur la tête ; l’encens des sacrifices fume en l'honneur des dieux , et des coupes d'or et de porphyre s'épanchent les libations sur le parvis du sanctuaire. Au même instant, Vercingétorix, qui a suivi l’autre côté de la Voie sacrée, franchit le seuil de la prison Mamertine creusée dans le roc vif du Capitole, et y est étranglé par l'ordre de César. Le choix de ce supplice, réputé ignominieux chez les Romains, nous fait assez connaître de quelle haine terrible il était animé contre le héros gaulois.

Ainsi périt Vercingétorix…

M. Girard, Histoire de Vercingétorix, Clermont-Ferrand, 1863.

Les Historiens du 19ème siècle ont souvent dramatisé la mort de Vercingétorix. Ce que l’on sait, c’est que "le grand roi des guerriers" demeura plusieurs années à Rome, emprisonné vraisemblablement dans les geôles du Tullianum (plus connue sous le nom de prison Mamertine). Après le triomphe de César, en 46 av. notre ère (entre août et septembre), il fut étranglé dans sa prison.


Depuis deux siècles, Vercingétorix est un personnage important de la vie politique et culturelle de notre pays : héros de romans et de drames, sujet de peintures et de sculptures, invoqué pour la défense de causes souvent contradictoires, mais avant tout symbole du patriote, de celui qui se sacrifie après avoir lutté les armes à la main pour la liberté de la Gaule. Dans la galerie des grands hommes de notre histoire, les manuels scolaires lui ont accordé la première place. Aujourd'hui, si son rang est moindre dans les discours politiques, la bande dessinée continue de lui assurer une large popularité.

Le Second Empire a été le véritable créateur de la légende de Vercingétorix. Napoléon III écrit dans son Histoire de Jules César (1865–1866) – ouvrage où il entendait justifier l'exercice du pouvoir autoritaire : « Tout en honorant la mémoire de Vercingétorix, il ne nous est pas permis de déplorer sa défaite. Admirons l'amour sincère de ce chef gaulois pour l'indépendance de son pays. Mais n'oublions pas que c'est au triomphe des armées romaines qu'est due notre civilisation : institutions, mœurs, langue, tout nous vient de la conquête. Aussi sommes-nous bien plus des fils des vainqueurs que ceux des vaincus ».La statue du chef gaulois, dominant la plaine d'Alésia (Alise-Sainte-Reine - Côte d'Or) et édifiée à l'initiative de Napoléon III en1865 par le sculpteur Aimé Millet (1819-91), en témoigne pendant plus de dix-huit siècles, il n'y a pas de représentations de celui-ci dans la statuaire ou la peinture). Sur le socle, dessiné par l'architecte Eugène Viollet-le-Duc, on peut lire :

« La Gaule unie
Formant une seule nation
Animée d'un même esprit,
Peut défier l'Univers. »

En pleine époque des nationalismes européens, la figure de Vercingétorix va ainsi jouer un rôle essentiel dans la construction des stéréotypes nationaux de la France. L’école de la Troisième République va en faire un héros national, objet de propagande. Il s’agit d’exalter le patriotisme des Français en exacerbant le sentiment de revanche après la défaite de 1870 contre l'Allemagne fraîchement unifiée. L'image du patriote gaulois résistant (« encore et toujours ») à l'envahisseur est magnifiée par les manuels scolaires, dont le Lavisse : « La Gaule fut conquise par les Romains, malgré la vaillante défense du Gaulois Vercingétorix qui est le premier héros de notre histoire ». En 1901, Camille Jullian publie son ouvrage Vercingétorix et offre enfin une image moderne du prince arverne : « Les historiens de tous les pays et de toutes les tendances, ceux qui n'ont eu que dédain pour la faiblesse des Gaulois, ceux à qui le mirage des idées fait oublier la vie des hommes, et qui se refusent à chercher des héros, Allemands acharnés à flageller la France sous le nom de Gaule, Français qui redoutent de céder à leur patriotisme, tous se sont inclinés de respect devant le sacrifice de Vercingétorix. Et s'il a échoué dans sa tâche, ce fut surtout la faute d'autres hommes. […] Entre lui et César, je n'hésite pas, il était le véritable héros, l'homme digne de commander à des hommes, et de plaire aux dieux. Mais les dieux de ce temps, comme dira le poète, n'aimaient pas les nations vaincues ».

On a cru voir, au travers de la numismatique, que les effigies de Vercingétorix reflétaient le vrai visage du chef : il n'en est rien! L'art de la numismatique cherche à donner une image idéalisée de celui qu'elle représente. Paradoxalement, le vrai visage de Vercingétorix pourrait apparaître non pas sur un denier gaulois mais sur un denier romain frappé en 48 av. J.-C. par L. Hostilius Saserna. Au moment de la réalisation de cette monnaie, Vercingétorix était le Gaulois le plus célèbre présent à Rome et ne pouvait être que le modèle par excellence pour les graveurs.

De même, la célèbre représentation de Vercingétorix jetant ses armes aux pieds de Jules César par Lionel Royer (1899), est bien entendu totalement fictive. Comment imaginer qu'un chef comme César ait laissé s'approcher si près de lui un combattant à cheval ? Tout ici est symbolique et le peintre, en dramatisant cette reddition, donne une fois encore l'image héroïque de Vercingétorix. Cette scène est fondée sur la (trop) sèche relation de César : " On lui remet les chefs, Vercingétorix est livré [ (?) se livre], les armes sont jetées. " En réalité, ce sont toutes les armes des assiégés qui sont jetées du haut des remparts d'Alésia, mais l'imagination s'est donnée libre cours…

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L'archéologue Jean-Louis Brunaux rappelle en tout cas que le portrait de Vercingétorix ne peut s'accorder avec la vision traditionnelle des Gaulois en braies, le torse nu sous leur manteau et affichant une forte pilosité (chevelure hirsute, parfois retenue en chignon, longues moustaches tombantes). Les aristocrates arvernes avaient en effet abandonnés depuis longtemps cette tenue pour adopter la mode venue de Marseille ou de Rome, celle d'arborer un visage glabre et des cheveux courts, et de porter la toge romaine.

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Selon Jacques Harmand, Vercingétorix aurait vécu ses dernières années dans une villa et non pas un cachot, pour finir exécuté sous la pression du Sénat contre la volonté de Jules César. En effet, il est important de rappeler la culture et la clairvoyance dont faisaient preuves ces deux hommes qui s'admiraient mutuellement, d’où leur probable amitié. Jean-Louis Brunaux considère que la nécessité politique a pris le pas sur tout autre considération : César aurait fait de son ennemi emblématique une victime expiatoire en laissant les geôliers de Vercingétorix l'étrangler dans sa prison, par pitié (lui évitant la multitude de tortures cruelles que subissait les prisonniers de condition inférieure), peut-être dans les heures qui ont suivi le triomphe. Par cette mort discrète, il aurait effacé le destin héroïque de l'Arverne.


Dans « Le dossier Vercingétorix, Christian Goudineau, professeur au Collège de France, titulaire de la chaire des Antiquités nationales, archéologue, historien mais aussi philologue, retrace la constitution du mythe, des débuts du XIXe siècle à nos jours, en produisant et commentant tous les textes antiques consacrés à Vercingétorix, ainsi que les monnaies qui portent son nom, et en dressant un panorama archéologique et sociologique de son époque.

Aujourd'hui, la figure de Vercingétorix reste un des puissants symboles de l'identité nationale française en s’inspirant de la tradition historiographique antérieure fossilisée dans les mémoires. Sans doute plus que le reste, l’incertitude qui règne sur la connaissance de nos origines entretient la part de mythe qu’elle recèle.

http://www.cndp.fr/archive-musagora/gaulois/fichiers/vercingetorix.htm

VERCINGÉTORIX (env. 72-46 av. J.-C.)

En langue celtique, le terme de Vercingétorix signifie à peu près : « le grand roi des héros » et n'est vraisemblablement pas un anthroponyme mais un titre. Né vers ~ 72, Vercingétorix, fils de Celtill, appartient au peuple puissant des Arvernes ; soupçonné d'avoir voulu ceindre la couronne, son père avait été mis à mort par ses compatriotes. Pendant les premières campagnes romaines en Gaule, Vercingétorix suit les armées de César par lequel il est considéré comme un allié. Il y reste six ans puis revient vers son peuple qui l'a proscrit sous l'influence du parti aristocratique. Un soulèvement populaire le porte au pouvoir et les tribus du centre de la Gaule et de l'Armorique le reconnaissent pour chef au début de ~ 52. Les Lingons et les Rèmes ne prennent pas part au soulèvement et d'autres peuples se tiennent dans l'expectative.

À l'annonce de troubles en Gaule, César accourt en Narbonnaise où il reçoit l'appui des colons romains et marche sur le pays des Arvernes pour bifurquer ensuite vers la vallée du Rhône, où il réunit le gros de son armée. Face à cette menace, le jeune chef gaulois préconise une tactique de la terre brûlée : les Romains ne doivent trouver devant eux ni armée à combattre, ni ravitaillement. Mais l'unanimité ne se fait pas à l'assemblée des chefs : les Bituriges se refusent à détruire leur belle capitale, Avaricum, qui succombe après une résistance héroïque (~ 52) ; les Romains y massacrent tout ce qui respire. Le récit de ces atrocités, la perspective de se débarrasser d'occupants trop autoritaires constituent les thèmes repris par les émissaires de Vercingétorix qui voit se ranger sous sa bannière le peuple des Éduens, ancien allié de César. Pour la première fois se dresse devant le consul romain une fronde puissante, unie sous un seul chef, et la révolte se propage dans les cités les plus soumises ; au même moment, César échoue devant Gergovie, protégée par ses fortifications et par les pentes abruptes qui l'entourent ; harcelées par la cavalerie gauloise, les légions romaines doivent battre en retraite. César et son armée se trouvent isolés et coupés de leur ravitaillement dans un pays hostile. Le général romain décide de se rabattre sur la Narbonnaise et fait escorter son infanterie par des cavaliers germains. C'est au moment où ils tiennent la victoire que les Gaulois vont commettre une erreur fatale. Ont-ils suivi ou outrepassé les ordres de leur chef ? Vercingétorix avait chargé sa cavalerie de harceler la retraite de l'ennemi et il semble que celle-ci ait voulu faire une brillante démonstration de son courage sans prévoir l'unité d'action ni la combativité de l'adversaire. Les cavaliers gaulois, acculés à une bataille rangée près de Dijon, se replient en désordre. Ils sont poursuivis jusqu'à Alésia où Vercingétorix s'est enfermé à l'annonce du désastre. C'est là qu'il est pris au piège, cerné par les tranchées et les machines de siège des Romains ; mais il a eu le temps d'envoyer des émissaires vers les cités alliées afin que chacune lui envoie une armée de secours. Cependant, en son absence, les cités discutent, tergiversent, répugnent à se séparer de leurs défenseurs. Enfin, une armée de secours paraît en vue des assiégés qui reprennent courage ; menacés par la famine, ils ont expulsé de l'oppidum les bouches inutiles : femmes, enfants, vieillards ont erré entre les deux armées avant de mourir de faim. Mais la discorde règne parmi les contingents gaulois incapables de coordonner leur action et qui se font décimer les uns après les autres. Tout espoir est désormais perdu. Se soumettant à l'arrêt des dieux et pour sauver ses compagnons, Vercingétorix se rend seul, paré comme pour le combat, au camp de son vainqueur ; à ses pieds, il jette sans un mot son épée, son javelot et son casque. Ramené à Rome....

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