1er octobre 1938 : « Ah les cons, s'ils savaient... » (qui était Edouard Daladier ?)
C’est certainement avec la gueule de bois que se lève ce matin du 1er octobre 1938, le président du Conseil, Édouard Daladier. La veille, il a signé, à Munich, avec le chancelier Hitler un « compromis » sur le sort de la communauté allemande en Tchécoslovaquie.
Anglais et Italiens se sont joints à la signature. A peine les délégations franco-britanniques ont quitté l’Allemagne que les troupes du Reich annexent les Sudètes. Les Tchécoslovaques n'ont pas eu leur mot à dire et n’ont même pas été pas conviés à la conférence. La France et la Grande-Bretagne avaient abandonné l'Autriche à Hitler au printemps. L'Europe craint la guerre. À Paris, le soulagement domine. Daladier est acclamé à sa descente d'avion. Il ne s'en réjouit pas, soufflant à son conseiller : « Ah les cons, s'ils savaient… ».
En effet, six mois après les accords de Munich, l'Allemagne nazie s'est étendue à toute la Tchécoslovaquie, et malgré cette violation des accords, Britanniques et Français ne réagissent pas. Les divergences sont nombreuses au sein du gouvernement français, certains souhaitent conserver cette ligne d'apaisement et d'autres, comme Daladier, s'activent pour encourager le redressement économique et militaire de la France. Face aux hésitations des signataires de Munich et à la suite de la signature du pacte de non-agression, Hitler respire la sérénité et envahit la Pologne le 1er septembre 1939.
Cette fois-ci, l'Allemagne n'envisage pas le moindre accord pour entreprendre l'invasion de la Pologne, la France et la Grande-Bretagne avaient pourtant garanti l'intégrité de la Pologne à la suite du démantèlement de la Tchécoslovaquie et, cette fois-ci, l'Ouest ne peut pas fermer les yeux comme en 1938. La France déclare la guerre à l'Allemagne le 3 septembre 1939, mais ne fournit aucune aide militaire significative à la Pologne. La France s'enlise dans un gouffre dont la brèche s'est ouverte à Munich en 1938.
Combattant de Verdun, il fait donc partie de la "génération du feu" et est élu en novembre 1919 député radical du Vaucluse et le demeure jusqu'à la guerre. En juin 1924, il entre dans le premier ministère Herriot. Ses orientations prises dans le domaine de la politique extérieures seront poursuivies sous l'autorité d'Aristide Briand jusqu'en 1932.
Dès 1927, Daladier conquiert la présidence du Parti radical. Rénovateur, il appartient à l'aile gauche du parti et est proche du courant "jeune turc". En 1928, il somme les ministres radicaux de quitter le gouvernement Poincaré. Cette rupture donne une indication claire sur ses positions. Les élections du printemps 1932 permettent le retour au pouvoir des radicaux. Daladier retrouve un poste ministériel mais la conjoncture internationale est très différente. Le 30 janvier 1933, tandis qu'Edouard Daladier, pressenti par Lebrun, consulte pour former un gouvernement, Paris apprend qu'Hitler vient d'être désigné à la Chancellerie allemande.
Le président du Conseil français choisit une ligne dure à la Conférence du désarmement de 1932, mais Hitler la quitte en 1933. Daladier, qui a déjà fait adopter plusieurs mesures favorables au réarmement français, ne réussit pas à imposer ses vues en matière financière. Il est temporairement évincé.
De retour en janvier 1934 pour assainir la situation après le scandale de l'affaire Stavisky, Daladier s'oppose à l'action des ligues. Le 6 février, alors qu'il bénéficie de la confiance des parlementaires, l'épreuve de force engagée dans la rue le conduit à la démission.
Le député du Vaucluse, retourné à l'opposition cherche à rallier les radicaux à la politique antifasciste. Il participe en juillet 1935 au rassemblement pour le Front populaire et, à l'automne, concourt à l'élaboration du programme électoral du Front populaire.
En juin 1936, Léon Blum forme son premier gouvernement. Edouard Daladier prend le portefeuille de ministre de la Défense nationale et de la Guerre. De l'été 1936 à l'entrée en guerre, le nouveau ministre engage la bataille du réarmement et du renforcement de l'artillerie lourde. Mais de nouveaux obstacles freinent cet effort.
Au lendemain de l'Anschluss, après la remilitarisation de la Rhénanie, Daladier est appelé à Matignon. Jusqu'en mars 1940, il cherche alors à opérer le redressement économique pour accélérer son réarmement et à sceller une véritable alliance entre Paris et Londres face à l'axe Rome-Berlin et au Pacte d'Acier en mai 1939. Soutenu par Paul Reynaud à partir de novembre 1938, il gouverne par décrets-lois et obtient un aménagement de la loi des quarante heures. Les résultats obtenus sont significatifs. Le retour des capitaux exilés et la reprise des investissements expliquent en partie la reprise de la croissance et la montée en puissance des industries de défense.
Sur le plan extérieur, Edouard Daladier est placé, en septembre 1938, devant un terrible dilemme. Faut-il résister à toute solution de compromis et envisager le risque d'une guerre avec l'Allemagne? Ou envisager une politique d'apaisement?
Il choisit de se rendre à la conférence de Munich qui fait à l'Allemagne des concessions beaucoup plus importantes que celles qui avaient été envisagées au début de la crise des Sudètes. Les accords du 30 septembre 1938 sont bientôt interprétés comme une véritable capitulation franco-britannique. Après le démantèlement de la Tchécoslovaquie en mars 1939, Paris et Londres tentent d'organiser un véritable front de résistance à l'Allemagne. Deux jours après l'invasion de la Pologne, Londres et Paris déclarent le 3 septembre 1939 la guerre à l'Allemagne.
Daladier, qui dès mars 1940 a quitté l'Hôtel Matignon mais a conservé son portefeuille de la Défense nationale, est contraint à y renoncer le 19 mai, mais ne quittera le gouvernement Paul Reynaud que le 6 juin. Quand survient la nouvelle de la demande d'armistice, il vient de s'embarquer à destination de l'Afrique du Nord sur le Massilia.
En septembre 1940, il est arrêté par le gouvernement de Vichy et comparaît devant la cour de Riom. Sa défense est si brillante devant les juges que le procès tourne court. Il est déporté en Allemagne de 1943 à 1945.
Au lendemain de la guerre, il retrouve son siège de député du Vaucluse dans l'assemblée législative et il sera réélu jusqu'en 1958. Président du Rassemblement des gauches républicaines, il sera un adversaire résolu de la Communauté européenne de défense. Il s'éteint en 1970. »
Éditeur : Fayard (27 mai 1993)
Langue : Français
Broché : 588 pages
ISBN-10 : 2213027269
ISBN-13 : 978-2213027265
Poids de l'article : 900 g
Dimensions : 15.3 x 3 x 23.5 cm
En effet, six mois après les accords de Munich, l'Allemagne nazie s'est étendue à toute la Tchécoslovaquie, et malgré cette violation des accords, Britanniques et Français ne réagissent pas. Les divergences sont nombreuses au sein du gouvernement français, certains souhaitent conserver cette ligne d'apaisement et d'autres, comme Daladier, s'activent pour encourager le redressement économique et militaire de la France. Face aux hésitations des signataires de Munich et à la suite de la signature du pacte de non-agression, Hitler respire la sérénité et envahit la Pologne le 1er septembre 1939.
Cette fois-ci, l'Allemagne n'envisage pas le moindre accord pour entreprendre l'invasion de la Pologne, la France et la Grande-Bretagne avaient pourtant garanti l'intégrité de la Pologne à la suite du démantèlement de la Tchécoslovaquie et, cette fois-ci, l'Ouest ne peut pas fermer les yeux comme en 1938. La France déclare la guerre à l'Allemagne le 3 septembre 1939, mais ne fournit aucune aide militaire significative à la Pologne. La France s'enlise dans un gouffre dont la brèche s'est ouverte à Munich en 1938.
Qui était Edouard Daladier ?
« Originaire du Vaucluse, Edouard Daladier est né en 1884, à Carpentras. Ce fils de boulanger est un "boursier de la République". Elève d'Edouard Herriot à Lyon, il poursuit des études littéraires qui le conduisent à l'agrégation d'histoire. A la veille de la guerre, il est maire de Carpentras mais a échoué aux élections législatives du printemps 1914.Combattant de Verdun, il fait donc partie de la "génération du feu" et est élu en novembre 1919 député radical du Vaucluse et le demeure jusqu'à la guerre. En juin 1924, il entre dans le premier ministère Herriot. Ses orientations prises dans le domaine de la politique extérieures seront poursuivies sous l'autorité d'Aristide Briand jusqu'en 1932.
Dès 1927, Daladier conquiert la présidence du Parti radical. Rénovateur, il appartient à l'aile gauche du parti et est proche du courant "jeune turc". En 1928, il somme les ministres radicaux de quitter le gouvernement Poincaré. Cette rupture donne une indication claire sur ses positions. Les élections du printemps 1932 permettent le retour au pouvoir des radicaux. Daladier retrouve un poste ministériel mais la conjoncture internationale est très différente. Le 30 janvier 1933, tandis qu'Edouard Daladier, pressenti par Lebrun, consulte pour former un gouvernement, Paris apprend qu'Hitler vient d'être désigné à la Chancellerie allemande.
Le président du Conseil français choisit une ligne dure à la Conférence du désarmement de 1932, mais Hitler la quitte en 1933. Daladier, qui a déjà fait adopter plusieurs mesures favorables au réarmement français, ne réussit pas à imposer ses vues en matière financière. Il est temporairement évincé.
De retour en janvier 1934 pour assainir la situation après le scandale de l'affaire Stavisky, Daladier s'oppose à l'action des ligues. Le 6 février, alors qu'il bénéficie de la confiance des parlementaires, l'épreuve de force engagée dans la rue le conduit à la démission.
Le député du Vaucluse, retourné à l'opposition cherche à rallier les radicaux à la politique antifasciste. Il participe en juillet 1935 au rassemblement pour le Front populaire et, à l'automne, concourt à l'élaboration du programme électoral du Front populaire.
En juin 1936, Léon Blum forme son premier gouvernement. Edouard Daladier prend le portefeuille de ministre de la Défense nationale et de la Guerre. De l'été 1936 à l'entrée en guerre, le nouveau ministre engage la bataille du réarmement et du renforcement de l'artillerie lourde. Mais de nouveaux obstacles freinent cet effort.
Au lendemain de l'Anschluss, après la remilitarisation de la Rhénanie, Daladier est appelé à Matignon. Jusqu'en mars 1940, il cherche alors à opérer le redressement économique pour accélérer son réarmement et à sceller une véritable alliance entre Paris et Londres face à l'axe Rome-Berlin et au Pacte d'Acier en mai 1939. Soutenu par Paul Reynaud à partir de novembre 1938, il gouverne par décrets-lois et obtient un aménagement de la loi des quarante heures. Les résultats obtenus sont significatifs. Le retour des capitaux exilés et la reprise des investissements expliquent en partie la reprise de la croissance et la montée en puissance des industries de défense.
Sur le plan extérieur, Edouard Daladier est placé, en septembre 1938, devant un terrible dilemme. Faut-il résister à toute solution de compromis et envisager le risque d'une guerre avec l'Allemagne? Ou envisager une politique d'apaisement?
Il choisit de se rendre à la conférence de Munich qui fait à l'Allemagne des concessions beaucoup plus importantes que celles qui avaient été envisagées au début de la crise des Sudètes. Les accords du 30 septembre 1938 sont bientôt interprétés comme une véritable capitulation franco-britannique. Après le démantèlement de la Tchécoslovaquie en mars 1939, Paris et Londres tentent d'organiser un véritable front de résistance à l'Allemagne. Deux jours après l'invasion de la Pologne, Londres et Paris déclarent le 3 septembre 1939 la guerre à l'Allemagne.
Daladier, qui dès mars 1940 a quitté l'Hôtel Matignon mais a conservé son portefeuille de la Défense nationale, est contraint à y renoncer le 19 mai, mais ne quittera le gouvernement Paul Reynaud que le 6 juin. Quand survient la nouvelle de la demande d'armistice, il vient de s'embarquer à destination de l'Afrique du Nord sur le Massilia.
En septembre 1940, il est arrêté par le gouvernement de Vichy et comparaît devant la cour de Riom. Sa défense est si brillante devant les juges que le procès tourne court. Il est déporté en Allemagne de 1943 à 1945.
Au lendemain de la guerre, il retrouve son siège de député du Vaucluse dans l'assemblée législative et il sera réélu jusqu'en 1958. Président du Rassemblement des gauches républicaines, il sera un adversaire résolu de la Communauté européenne de défense. Il s'éteint en 1970. »
Edouard Daladier (1884-1970)
de Elisabeth Du Réau (Auteur)
Langue : Français
Broché : 588 pages
ISBN-10 : 2213027269
ISBN-13 : 978-2213027265
Poids de l'article : 900 g
Dimensions : 15.3 x 3 x 23.5 cm