23 octobre 1812 : L'incroyable conspiration du général Mallet


Dans la nuit du 22 au 23 octobre 1812, un obscur général français, Malet, est l’auteur d’une incroyable tentative de coup d’Etat à Paris. L’Empereur Napoléon est en Russie, il a commencé sa retraite dans les immensités russes, l’évènement n’arrivera aux oreilles du chef de guerre que vers le 6 novembre… un instant son trône avait tremblé, personne n’avait pensé au petit roi de Rome...

Républicain convaincu, le général Malet avait suivi une carrière agitée dans les armées de la Révolution. Il était né en 1754 à Dôle, une région patriote, et avait été l’un des officiers de la Garde nationale de sa ville natale. C’est à ce titre qu’il avait assisté à Paris à la journée de la Fête de la Fédération, le 14 juillet 1790. Plus tard ardent républicain, il était pourtant d’origine noble et avait commencé sa carrière dans les mousquetaires gris en 1775, unité appartenant à la maison du Roi Louis XVI qui fut licenciée en 1790. Embrassant les idéaux de la Révolution, il était resté en France à un moment où des milliers d’officiers nobles émigraient. En 1791, sans emploi, il s’était alors engagé dans un régiment d’infanterie. 

D’esprit frondeur il ne tarde pas à se fâcher avec ses chefs, et il doit quitter l’armée en septembre 1793, dont il est de toute façon exclu comme noble d’après un décret montagnard. Il végète et il est même rayé des cadres en 1795, mais il réussit à reprendre du service en 1796. Il mène ensuite une carrière militaire plus honorable, il est capitaine puis chef de brigade (colonel). Au moment des troubles du Directoire, il s’essaye à la politique étant élu par la fraction dissidente du département du Jura en 1797 (jacobins), puis au Conseil des Cinq-Cents en 1798. Cette dernière élection est cassée mais sa carrière rebondie à l’Armée des Alpes en 1799 où il s’illustre à plusieurs reprises par son courage. Le général en chef, Championnet le nomme général de brigade et à cette date une grande carrière militaire pourrait l’attendre.

Seulement l’homme n’aime pas Bonaparte, et surtout le dit et ne s’en cache pas. Aussi dès la fin de 1800, il n’occupe plus de postes dans l’armée d’active, traînant son sabre dans les garnisons de l’arrière, il commande aussi un temps le département de la Vendée. Le titre de commandeur de La Légion d’Honneur que lui confère Bonaparte ne l’impressionne pas et au moment de la proclamation de l’Empire, à contrecourant il envoie sa démission. Celle-ci le place dans une situation difficile, notamment dans les premières années des victoires éclatantes de l’Empereur. Il faut bien vivre, et il accepte à nouveau des commandements subalternes dans les territoires occupés, notamment en Italie.

C’est là, qu’il est arrêté en 1807, pour « propagande républicaine » et vol, notamment confiscation illégale de navires de prise et des trafics dans des maisons de jeux. Il est conduit à Paris à la prison de la Force où il reste jusqu’en mai 1808. Il sort de prison sans jugement et est placé à la retraite d’office, avec une pension. Mais il ne peut s’empêcher, aigri, de conspirer, et élabore déjà un avant-goût de son plan final : afficher partout dans Paris la déchéance de l’Empereur, et s’emparer du pouvoir. Rien de moins ! Mais ce premier complot capote, il est à nouveau arrêté. Il échappe étrangement à la peine capitale et est enfermé de nouveau dans la prison de la Force. Indécrottable, il conspire encore en juin 1809, alors que l’Empereur est en campagne en Autriche. Il est dénoncé et transféré à la prison de Sainte-Pélagie, puis dans une simple maison de santé où il est assigné à résidence…

C’est là que durant deux ans, il élabore la trame diabolique de sa conspiration avec un autre personnage trouble, son unique véritable complice : l’abbé Lafon. De sa main, il écrit des décrets, des ordres, un sénatus-consulte et organise virtuellement un futur gouvernement pour remplacer l’Empereur. Son intention est de berner les autorités avec ses faux papiers, et de les rendre complices de son coup d’état. L’occasion se présente durant la campagne de Russie. Avec l’abbé, Malet part à la conquête du pouvoir… La suite est digne d’un roman d’Alexandre Dumas. Dans la nuit du 22 au 23 octobre, il s’échappe sans peine de sa pension et en grand uniforme se rend à la prison de la Force. Avec de faux ordres il veut faire délivrer deux généraux emprisonnés, Lahorie et Guidal.

Sous la fausse identité, du général « Lamotte », il annonce aux gardiens la mort de l’Empereur le 7 octobre devant Moscou, et que le Sénat a rétabli la République. Son autorité d’officier général fait d’abord merveille, les prisonniers qu’ils demandent sont libérés. Ils sont à leur tour bernés et ensembles se rendent dans la caserne de Popincourt où se trouve la Garde de Paris. Le commandant Soulier qui s’y trouve n’en croit pas non plus ses oreilles, mais crédule il tombe dans le panneau. Il met ses forces à la disposition du conspirateur. Un détachement commandé par Lahorie arrive à l’hôtel de Savary qui est aussi ministre de la Police et l’un des plus fidèles compagnons de l’Empereur Napoléon.

En quelques minutes, le ministre est arrêté et conduit à la prison de la Force, il a reçu la veille une lettre de l’Empereur mais Lahorie le fait arrêter sans coup férir. Le préfet de Paris Frochot ne résiste pas non plus, il doit faire préparer dans la hâte une salle pour le futur gouvernement provisoire à l’hôtel de ville de Paris et il est envoyé à son tour à la prison de la Force. Une autre institution toutefois fait barrage au conspirateur génial : le gouverneur de Paris. Il s’agit du général Hulin, qui comme Savary est surpris dans son lit. Mais Hulin est plus méfiant, il perçoit quelques incohérences dans l’affaire, surtout à propos de la mort de Napoléon, et de cet étrange général « Lamotte ». Hulin objectant, Malet sort un pistolet et lui fracasse la mâchoire, ce sera un geste fatal, la violence de l’acte le désigne justement comme conspirateur. Reconnu par un membre de l’Etat-major de la place de Paris, il est démasqué et aussitôt arrêté.

En quelques heures le complot avait été déjoué, et les fils démêlés. Interrogé, Malet se paye le luxe à la question de savoir qui étaient ses complices de répondre « Mais vous Monsieur, et la France entière si j’avais réussi ! ». La justice militaire sera expéditive, dans la crainte de la réaction de Napoléon. Car en apprenant la nouvelle, mis à part Hulin dubitatif, aucun des fonctionnaires que Malet avait berné, n’avait pensé à la dynastie… à Napoléon II. Le 28 octobre 1812, les généraux Malet, Guidal et Lahorie étaient traduits devant un conseil de guerre avec 11 autres personnes. 12 sont condamnés à mort. Le 29 octobre ils sont fusillés à 4 heures du soir dans la plaine de Grenelle.

Deux hommes, un général en retraite avec son uniforme et un abbé avaient fait trembler l’Empire de Napoléon 1er … du fond d’une prison.

La conspiration du général Malet

de Thierry Lentz (Auteur)

Éditeur ‏ : ‎ Perrin (12 janvier 2012)
Langue ‏ : ‎ Français
Broché ‏ : ‎ 348 pages
ISBN-10 ‏ : ‎ 2262032386
ISBN-13 ‏ : ‎ 978-2262032388
Poids de l'article ‏ : ‎ 400 g
Dimensions ‏ : ‎ 14.2 x 2.8 x 21.1 cm
https://pourunenouvellerepubliquefrancaise.blogspot.com/https://grandeschroniquesdefrance.blogspot.com/https://parolesdevangiles.blogspot.com/https://raymondaronaujourdhui.blogspot.com/

#JeSoutiensNosForcesDeLOrdre par le Collectif Les Citoyens Avec La Police