5 et 6 octobre 1789 : les « parisiennes » ramènent le roi à Paris ou la fin d'un monde

L'opinion avait déjà manifesté son inquiétude devant le retard apporté par Louis XVI à la ratification des résolutions prises par l'assemblée dans la nuit du 4 août qui avait vu disparaître les privilèges. L'arrivée de deux régiments à Versailles ne semblait-elle pas annoncer une réaction ? Les rumeurs les plus folles courent. Pour beaucoup elles sont le fait de meneurs à la solde du duc d'Orléans, désireux de se substituer à Louis XVI, cherchant à exploiter le mécontentement.



Lire également : 
Les journées d'octobre 1789 marquent un tournant dans l'histoire de la Révolution en laissant présager la chute de la monarchie. À l'issue de ces journées, en effet, le roi s'est retrouvé prisonnier de Paris. L'opinion avait manifesté son inquiétude devant le retard apporté par Louis XVI à la ratification des résolutions prises par l'assemblée dans la nuit du 4 août qui avait vu disparaître la féodalité. L'arrivée de deux régiments à Versailles ne semblait-elle pas annoncer une réaction ? Les rumeurs les plus folles continuaient à courir, favorisées par la longueur des attentes aux portes des boulangeries. La disette était la cause essentielle de l'agitation des esprits, mais il est certain que des meneurs à la solde du duc d'Orléans, désireux de se substituer à Louis XVI, ont cherché à exploiter le mécontentement.

La nouvelle d'un banquet offert le 1er octobre à Versailles aux régiments nouvellement arrivés, et où la cocarde tricolore aurait été foulée aux pieds, suffit à mettre le feu aux poudres. Le 5 octobre dans la matinée, sept à huit mille femmes se mettent en route pour Versailles dans l'intention d'aller « chercher du pain ». Des chômeurs se joignent au cortège. Disposant de troupes sûres, le roi aurait pu faire arrêter l'émeute. Sur le conseil de Necker, il laisse la foule envahir l'Assemblée et bivouaquer devant le château. Au matin du 6, des gardes du corps sont assassinés et les émeutiers pénètrent jusque dans les appartements royaux. Pour apaiser la fureur des manifestants, Louis XVI accepte de venir à Paris avec sa famille. Au terme d'un voyage de neuf heures pour couvrir la distance de Versailles à Paris, il s'installe aux Tuileries. Dix jours plus tard, l'Assemblée décide de venir le rejoindre en faisant de la salle du Manège le lieu de ses séances.

Désormais le roi et l'Assemblée sont prisonniers de la capitale, et c'est le peuple de Paris qui dirige la Révolution.

Mardi 5 octobre 1789.

La disette fait rage. Chaque jour, les parisiennes font la queue devant les boulangeries pour avoir du pain. Les enfants ont faim. En ce 5 octobre 1789, elles se rendent à l’Hôtel de Ville, mais on ne les entend pas. Dans la foule, la nouvelle qu’un banquet aurait eu lieu le 1er octobre à l’opéra royal du château de Versailles, au cours duquel la cocarde aurait été foulée au pied et l’assemblée insultée en présence du Roi, se répand. A 10 heures, sept à huit mille femmes se mettent en route pour Versailles dans l'intention d'aller « chercher du pain ». Des chômeurs se joignent au cortège. Disposant de troupes sûres, le roi aurait pu faire arrêter l'émeute. Louis XVI défend que l'on fasse usage des armes.

Vers 16 heures, le cortège arrive à Versailles et se rend tout d'abord à l'Assemblée nationale qui siège à l'Hôtel des Menus Plaisirs. Ordre est donné de fermer les grilles du château.

Vers 17h30, une députation, envoyée par Mounier, président de l'Assemblée, est reçue par le Roi. Celui-ci accepte de signer la déclaration des droits de l'homme et d'envoyer des charrettes de farine à Paris. Sur le conseil de Necker, il laisse la foule envahir l'Assemblée et bivouaquer devant le château.

A Paris, le marquis de La Fayette et la garde nationale se rendent à leur tour à Versailles sur l'injonction du maire Bailly. Vers 22 heures, La Fayette arrive à Versailles se rend auprès du Roi. La garde nationale assure la garde du château. Tout le monde part se coucher.

Mercredi 6 octobre 1789. 

Vers 5 heures du matin. La foule arrive à pénétrer dans la cour puis se dirige vers l'appartement de la Reine. Alerté par le bruit, les femmes de chambre de la Reine la réveille, l'habille d'une redingote à rayures jaune et s'empresse de quitter la chambre. De son côté, Louis XVI décide de rejoindre la chambre de la Reine en empruntant le passage situé sous l'Œil de Bœuf. Voyant la chambre vide, il rebrousse chemin vers sa chambre où il retrouve Marie Antoinette, ses enfants que la marquise de Tourzel a fait monter et quelques courtisans qui ont veillé dans les pièces jouxtant la chambre du Roi. La foule se regroupe sur la cour de marbre et exige que le Roi paraisse au balcon, réclamant son retour à Paris.

Vers 8 heures, Louis XVI parait au balcon de la Chambre de Parades, accompagné de la Reine, du dauphin, de Monsieur et Madame, de Mme Elisabeth et de Mesdames Tantes. Après chacun regagne son appartement pour préparer le départ.

Vers 12h30, Louis XVI et sa suite traversent les différents salons, maculés du sang des gardes du corps. Le Roi et la Reine montent dans leur carrosse du Roi. Le cortège est composé du carrosse du Roi, de diverses voitures contenant des courtisans et la domesticité et de charrettes contenant de la farine, précédé des têtes, plantées sur des piques, des deux gardes du corps, de Varicourt et Miomandre de Sainte-Marie. Seul reste le comte de La Tour du Pin, secrétaire d'état à la Guerre à qui Louis XVI lui demande de protéger "son pauvre Versailles".

Le cortège arrive aux portes de Paris vers 17 heures 30 où attend le maire Bailly. Il invite le Roi et la Famille Royale à se rendre à l'Hôtel de Ville. Louis XVI demande que sa famille puisse se rendre aux Tuileries.

Vers 19 heures, le Roi arrive à l'Hôtel de Ville pour y entendre les discours des différentes autorités et réaffirme que son lieu de résidence est à Paris.

Enfin, vers 21 heures, le Roi et sa famille se rendent au château des Tuileries. De leur côté, Monsieur et Madame vont s'installer, dans leur résidence habituelle parisienne, au Palais du Luxembourg.

Dix jours plus tard, l'Assemblée décide de venir le rejoindre en faisant de la salle du Manège le lieu de ses séances. « Désormais le roi et l'Assemblée sont prisonniers de la capitale, et c'est le peuple de Paris qui dirige la Révolution » (Jean TULARD : professeur à l'université de Paris-IV-Sorbonne).