La Cour pénale internationale, une justice impartiale ? - Par Renée Fregosi

Le mandat d’arrêt de la CPI contre le Premier ministre israélien serait-il « équilibré » par celui contre les dirigeants du Hamas ? s’interroge la philosophe et politologue Renée Fregosi.

Renée Fregosi, philosophe et politologue. Dernier ouvrage paru : Cinquante Nuances de dictature. Tentations et emprises autoritaires en France et ailleurs (Éditions de l'Aube, 2023).

Lundi 20 mai, le procureur de la Cour pénale internationale a demandé des mandats d'arrêt contre le Premier ministre Netanyahou et le ministre de la Défense israélien Yoav Gallant notamment pour « le fait d'affamer délibérément des civils », « homicide intentionnel » et « extermination et/ou meurtre », portant supposément « la responsabilité pénale de crimes de guerre et crimes contre humanité commis sur le territoire de l'État de Palestine [sic] à partir du 8 octobre 2023 au moins ».

Parallèlement, Ismaïl Haniyeh, chef du bureau politique du Hamas, Mohammed Diab Ibrahim al-Masri, commandant des Brigades al-Qassam, la branche armée du Hamas, et Yahya Sinwar, chef du Hamas dans la bande de Gaza, sont accusés de porter « la responsabilité pénale des crimes de guerre et crimes contre l'humanité commis sur le territoire d'Israël et de l'État de Palestine [sic] à compter du 7 octobre 2023 ». Pourrait-on considérer que ces mandats symétriques relèvent d'une justice impartiale tandis que l'antisionisme se déchaîne depuis des mois tous azimuts ?

Rhétorique de la culpabilité d'Israël

Dès le 8 octobre en effet, avant même la riposte israélienne sur la bande de Gaza, « la rue arabe » mais également les grandes villes occidentales, et tout particulièrement les campus universitaires, se mobilisaient contre Israël et les propos comme les actes antisémites se multipliaient de façon exponentielle. Le Hamas étant considéré comme l'expression de « la résistance palestinienne » et ses actions terroristes seraient justifiées (même lorsqu'elles atteignent le niveau d'horreur du 7 octobre 2023) par les prétendues exactions des prétendus « colons israéliens ». Une rhétorique de la culpabilité d'Israël utilisant les hyperboles les plus délirantes fonde en effet ce genre de prise de position depuis plusieurs décennies.

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Puis, avec l'offensive de Tsahal sur la bande de Gaza, au rythme des images et des chiffres fournis en majeure partie par le Hamas lui-même (dont on a pu douter de la fiabilité ne serait-ce qu'après les fakes autour de l'explosion dans la cour de l'hôpital Al-Ahli de Gaza le 17 octobre), on a rapidement commencé à pointer « l'inhumanité des bombardements massifs » des Israéliens sur « la population civile de Gaza », puis les dénonciations d'empêchement de l'acheminement des convois humanitaires se sont succédé.

En revanche, quasiment aucune mention n'est jamais faite des tirs incessants de roquettes du Hamas sur Israël avant le 7 octobre, et sans trêve depuis lors, que les tirs de missiles du Hezbollah lancés sur le nord d'Israël sont à peine évoqués, et que l'attaque massive iranienne des 13 et 14 avril derniers a bien vite été oubliée. Par ailleurs, on peut constater un silence systématique des avertissements de la part de Tsahal avant de lancer leurs bombardements (contrairement à toute logique de tactique militaire) et des délais laissés aux Gazaouis pour évacuer les zones visées, assurant même leur protection contre les snipers du Hamas.

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Dans ce contexte, plutôt que de ne reconnaître aucune faute au Hamas ainsi que le font les islamogauchistes patentés, renvoyer dos à dos Israël et le Hamas comme le manifeste cette décision du procureur de la CPI, Karim Khan, est-ce la position « équilibrée » qui convient ? Cela correspond en tous les cas à la posture qu'ont adoptée les bonnes âmes qui prétendent hypocritement ou croient naïvement « œuvrer pour la paix ».

Une position « équilibrée » ?

Toutefois, ne peut-on voir en la personne de monsieur Khan un acteur rien moins que neutre dans ce conflit et qui ferait là d'une pierre deux coups ? Pakistanais d'origine par son père, ce brillant avocat britannique appartiendrait en effet à un courant fondamentaliste de l'islam, minoritaire et persécuté par les autorités musulmanes, les ahmadis. À travers ces mandats d'arrêt symétriques, le procureur de la CPI satisferait ainsi à la fois une constante « antisioniste » commune à tous les courants de l'islam, et un ressentiment plus spécifique contre différentes branches du sunnisme (comme lors des poursuites contre Daech en Irak en 2018, ou contre les talibans en Afghanistan en 2021). Mais cette hypothèse ne serait qu'anecdotique si la mise en équivalence d'Israël et du Hamas n'était pas une des versions les plus perverses de l'antisémitisme antisioniste.

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Les exactions du Hamas, même lorsqu'elles sont reconnues, sont en effet minimisées par un propalestinisme généralisé notamment dans tous les secteurs de la gauche, mais pas seulement. Son but stratégique vise à la disparition de l'État d'Israël, car c'est l'ensemble du territoire de la Palestine britannique mandataire qui est considéré comme devant demeurer arabe et musulman. Ainsi, on entend la revendication de plus en plus ouvertement proclamée d'un État palestinien « de la rivière à la mer », c'est-à-dire du Jourdain à la Méditerranée, effaçant Israël de la carte.

Sortir de l'ambiguïté

Les Palestiniens demeurent ces victimes éternelles à défendre à tout prix, et Israël cet éternel coupable, y compris des maux qui l'accablent. Si certains se présentent comme magnanimes en reconnaissant des responsabilités du côté palestinien, celles-ci ne sont trouvées que chez de « mauvais dirigeants » portant préjudice à leur propre peuple innocent. Or, c'est l'antisémitisme antisioniste de combat qu'il faut dénoncer et contrer. Ce n'est pas face à des postures prétendument équilibrées que le propalestinisme reculera. Et il est urgent de sortir de l'ambiguïté, car Israël se trouve manifestement à une nouvelle croisée des chemins dans son histoire.

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Faute de perspectives enthousiasmantes et réalistes du côté de la gauche notamment, pour la persévérance d'Israël dans son être, la convergence de ses ennemis aura encore de beaux jours devant elle. L'État juif ne doit donc plus être soumis aux pressions et aux injonctions des religieux de plus en plus radicalisés et l'opposition laïque dans sa pluralité politique doit impérativement s'emparer de l'opportunité dramatique de l'affrontement actuel avec le Hamas pour engager un grand débat démocratique de fond et reprendre les rênes du pays.

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