« Guerre froide 2.0 » : Influences étrangères, conclusions de la commission d'enquête sénatoriale – Par Laurent Sailly


Le rapport de la commission d’enquête sénatoriale, présenté fin juillet 2024, expose une quarantaine de propositions contre la désinformation. Parmi elles : le renforcement des capacités de veille du service Viginum ainsi qu’une meilleure transparence concernant les sources utilisées pour la rédaction des amendements déposés par les élus et des liens avec les ministres.


Au terme de 6 mois d'auditions et de déplacements en France et à l'étranger, la commission d'enquête, présidée par Dominique de Legge (Les Républicains, Ille-et-Vilaine) et rapportée par Rachid Temal (Parti socialiste, Val-d’Oise), a rendu publique ses constats sur l'état des menaces hybrides pesant sur la France et l'organisation du dispositif français de lutte contre les influences étrangères malveillantes, ce jeudi 25 juillet 2024.

Le rapport sénatorial est sans ambiguïté : il y a urgence pour la France à s'armer davantage dans cette guerre froide 2.0. Il préconise une « révolution » profonde des mentalités en France face aux « influences étrangères malveillantes » et face à une « néo-guerre froide », prônant une mobilisation de toute la nation pour amplifier la lutte. Comme d'autres démocraties, le pays est dans le viseur d'états autoritaires disposant de moyens colossaux.

Lutte contre les influences étrangères malveillantes. Pour une mobilisation de toute la Nation face à la néo-guerre froide - Comptes rendus - Sénat (senat.fr)

Le contexte…

Depuis le référendum britannique sur le Brexit et les élections américaines de 2016, il est avéré que des opérations de manipulation de l’information en provenance notamment de Russie ont cherché à altérer les processus démocratiques. La France est devenue la cible de la guerre hybride que des puissances étrangères utilisent pour nuire très concrètement à ses intérêts sur le territoire national et à l’étranger.

L’influence et la guerre informationnelle sont de nouveaux instruments de puissance décuplés par l’usage du cyberespace et de l’intelligence artificielle (IA) : campagnes de dénigrement de la France en Afrique, tentatives de manipulation du débat public en période électorale, remise en cause de la légitimité de la France dans les Outre-mer, opération de désinformation sur l’action de la France en Ukraine, sur ses positions relatives au conflit Israël-Hamas ou à l’Azerbaïdjan, etc.

Face à ce nouveau champ de la conflictualité, les outils traditionnels de la guerre conventionnelle ou de la contre-ingérence des services de renseignement sont-ils adaptés ? La France dispose-t-elle de moyens et d’outils de contre-influence efficaces ?

Dans un contexte marqué par un durcissement des opérations d’influences étrangères et à l’orée des élections européennes et des Jeux olympiques de Paris 2024 qui placent la France dans le viseur des puissances étrangères, une prise de conscience de la guerre informationnelle comme fonction stratégique est nécessaire.

Les conclusions…

La commission d'enquête appelle une politique publique fondée en trois piliers pour sortir de la naïveté par la résilience de la population, sortir de la passivité en assumant une communication sur les valeurs de la France dans la bataille des narratifs, enfin, sortir de l'empirisme en se dotant d'une stratégie globale pour élargir l'action des services régaliens de l'État à la société civile.

La commission est revenue sur les campagnes de manipulation de l'information (faux charnier de Gossi au Mali, étoiles de David, fausse nouvelle sur l'envoi de militaires français en Ukraine, etc.) et appelle à un engagement collectif de la Nation : il n'y a pas de trêve olympique dans la guerre informationnelle.

Rachid Temal fait état des attaques à l’encontre du pays, et des moyens de les contrer. Selon l’auteur, il est impératif de s’armer davantage dans cette « néo guerre froide » qui nécessite une « mobilisation de toute la nation ». Plusieurs compétiteurs sont déjà engagés dans une guerre d’influence contre les pays occidentaux et en particulier contre la France. « A côté de la Russie – de loin l’acteur le plus agressif et ce dès avant l’invasion de l’Ukraine – et de la Chine, qui s’efforcent de promouvoir leur modèle autoritaire en décrédibilisant la démocratie, des menaces « tous azimuts » se font jour, émanant de compétiteurs étatiques émergents, tels que la Turquie ou l’Azerbaïdjan », affirme le rapport.

Contre les ingérences

Le rapport pointe une « archipélisation » de nos capacités, alors qu’il est nécessaire d’élaborer une « stratégie globale » qui mobiliserait l’ensemble du gouvernement. Malgré le déploiement du Service de vigilance et protection contre les ingérences numériques étrangères (Viginum), tous les services de l’Etat n’agissent pas de la même manière. L’auteur du rapport relève que du côté du ministère des Armées, de l’Intérieur et des Affaires étrangères, la mobilisation est réelle. Mais il est beaucoup plus sceptique quant à la prise de conscience du ministère de l’Enseignement supérieur, pourtant très ciblé par les puissances étrangères. Sur un plan stratégique, l’Etat ne dispose d’aucune vision unifiée sur la question des influences étrangères malveillantes.

Contre les influences

C’est notamment pour cette raison que les sénateurs recommandent de faire de Viginum une véritable agence d’Etat. A ce jour, la structure, qui emploie une cinquantaine de personnes, dépend du secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale (SGDSN). Ils préconisent de conforter son « rôle » de chef de file dans la veille sur les ingérences numériques étrangères, mais aussi de lui conférer un statut d’agence de l’État dotée d’une autonomie de gestion. Et, également, de renforcer ses moyens matériels, humains et juridiques, tout en le laissant placé sous la tutelle du SGDSN.

Pour une politique d’influence offensive « positive »

Au-delà d’une politique d’influence défensive pour répondre aux actions d’influence malveillantes menées par des États compétiteurs, les sénateurs estiment « indispensable » de disposer d’une politique d’influence plus offensive. « Une puissance comme la France doit disposer de moyens de promotion de ses valeurs, de son action et de sa vision du monde sur la scène internationale » pour « offrir un modèle alternatif aux principes mis en œuvre par les régimes autoritaires et illibéraux ».

Pour une politique de transparence

Il s’agit de faire preuve de plus de transparence concernant les représentants d’intérêts ou personnes (notamment les élus) pouvant agir pour des intérêts étrangers ayant influé sur une intervention politique. Le rapport ne propose cependant pas de rendre cette pratique obligatoire. De plus, les sénateurs recommandent des enquêtes approfondies sur les risques d’ingérence lors de nominations de nouveaux ministres.
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