Et au fait, que pense le reste du monde arabe du conflit israélo-irano-palestinien depuis un an ? - Par Alexandre del Valle et Pierre Berthelot

Le monde arabe est extrêmement divisé sur la question du conflit israélo-irano-palestinien, avec des divergences notables entre les élites dirigeantes et les populations.


Atlantico : Mohammed ben Salmane, le prince héritier saoudien, aurait déclaré à Antony Blinken que s'il n'était pas préoccupé par « la question palestinienne », la jeune population saoudienne l’était. Que pense le monde arabe du conflit israélo-irano-palestinien depuis un an ? Dans quelle mesure est-il divisé sur cet enjeu ?

Alexandre del Valle :
Le monde arabe est extrêmement divisé sur la question du conflit israélo-irano-palestinien, avec des divergences notables entre les élites dirigeantes et les populations. Mohammed ben Salmane (MBS) incarne cette fracture : lui-même n’est pas vraiment concerné par la question palestinienne, car il priorise la modernisation et les intérêts stratégiques de l'Arabie saoudite. Les monarchies du Golfe, à l'exception du Qatar, sont globalement plus pragmatiques et se montrent ouvertes à la normalisation avec Israël, car elles perçoivent peu de bénéfices à soutenir la cause palestinienne d’un point de vue national. Cela dit, ces régimes sont conscients que la rue arabe, influencée par des décennies de discours religieux sur l’importance de Jérusalem et la lutte palestinienne, reste en majorité pro-palestinienne.

La Turquie joue elle aussi un rôle ambigu, oscillant entre soutien affiché aux Palestiniens et coopération pragmatique avec Israël. Bien qu'elle soit membre de l'OTAN et alliée d'Israël sur le papier, la Turquie adopte un discours fort contre l’État hébreu, en particulier lorsque la situation à Gaza se détériore. Le président turc, Recep Tayyip Erdoğan, utilise souvent la question palestinienne pour renforcer sa position sur la scène internationale et pour mobiliser le soutien de la population turque et arabe, qui est largement pro-palestinienne. Cependant, la Turquie maintient des relations diplomatiques avec Israël. Avant la récente escalade de tensions, Erdoğan était en train de rétablir une relation plus cordiale avec le gouvernement israélien…

En outre, certains pays comme l'Algérie, la Tunisie et la Syrie se positionnent contre Israël et restent fermement ancrés dans l’axe de la « résistance » pro-iranien, adoptant une posture anti-occidentale et pro-palestinienne qui séduit leur population, tout en renforçant leur alignement stratégique avec l’Iran et la Russie.

Pierre Berthelot : Lorsque l’on compare les réactions des populations et de leurs dirigeants, il est possible de découvrir que les populations des pays du monde arabe ne sont pas toujours libres d’exprimer ce qu’elles pensent. Ce n’est pas du tout la même logique que celle qui existe dans nos sociétés occidentales où les gens peuvent exprimer leur opinion, éventuellement peser politiquement sur ce sujet.

Les dirigeants savent que les populations arabes, dans l'ensemble, sont souvent sensibles à la cause palestinienne par attachement aux Palestiniens.

La question de Jérusalem est aussi centrale car il s’agit du troisième lieu saint de l'Islam. Il faut bien distinguer également cet attachement aux lieux saints de l'islam.

Les dirigeants des pays du monde arabe ne peuvent pas ignorer, comme l'a rappelé Mohammed ben Salmane, que leurs populations sont souvent sensibles à cette cause. Mais dans le même temps, ces dirigeants ne peuvent pas forcément être le relais des aspirations de leurs populations, parce que cela pourrait être en contradiction avec leurs propres intérêts politiques. Dans le cas de Mohammed ben Salmane, son objectif est d’intégrer les accords d'Abraham qu'avait proposé Donald Trump et de procéder à une normalisation avec Israël. Mais Mohammed ben Salmane sait qu'il est bloqué parce que son opinion publique est sensible à cette cause. Il est aussi bloqué par le fait que le souverain saoudien a le titre officiel de gardien des lieux saints de l'Islam.

La cause palestinienne qui avait été en partie oubliée ou négligée par beaucoup de gouvernements arabes, et aussi auprès d'une partie de leur base, a ressurgi au premier plan. La population gazaouie subit des dizaines de milliers de morts. La situation n’est pas comparable avec la première Intifada. Les images de la situation à Gaza sur les réseaux sociaux et les chaînes d'information ont un impact émotionnel renforcé. Certains peuples arabes s’identifient aux Palestiniens qui, en miroir, représentent un peu leur propre impuissance par rapport à leurs gouvernements soit autoritaires, soit kleptocratiques.

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