Armement de la police à Bordeaux: «Puisse la vérité révélée à Pierre Hurmic apparaître à ses coreligionnaires!» - Par Florian Bachelier

Le maire écologiste de Bordeaux a annoncé mardi 12 novembre qu’il équiperait une brigade d’appui d’armes de poing. Ses confrères de Nantes, Rennes et Grenoble seraient bien inspirés d’imiter son revirement en regardant le réel en face, estime l’avocat Florian Bachelier.


Florian Bachelier est avocat et ancien député LREM de la 8e circonscription d’Ille-et-Vilaine. Il a été premier questeur de l’Assemblée nationale.


La réalité a-t-elle conscience de contredire publiquement chaque jour nos grands maires nupo-melenchonistes ? La question se pose quand nous apprenons que le maire de Bordeaux change son fusil d’épaule en déclarant désormais comprendre l’intérêt d’armer sa police municipale. Par dogmatisme, par clientélisme, par naïveté, par snobisme, par méconnaissance, par lâcheté ou par angélisme, un quarteron d’irréductibles maires de métropoles refuse depuis des années de prendre à bras-le-corps les enjeux de sécurité et d’ordre publics dans leurs villes.

D’aucuns inventent une forme d’incompétence statutaire, la sécurité des habitants ne serait que du domaine de l’État voire du seul ressort de la police nationale. D’autres psalmodient un catéchisme cryptolibertaire mêlé de culpabilité postcoloniale. D’autres enfin sont passés par calcul ou inculture de la gauche des Badinter à la gauche des Boyard-Mesmeur. Tous en chaires dans les tribunes d’un journal jadis de référence, éructant leur foi moribonde en un viatique improbable : la sécurité est un sujet d’extrême droite ! Tout comme d’ailleurs celui de la maîtrise de nos frontières nationales - démontrant au passage à leurs corps défendant qu’il puisse parfois y avoir un lien entre les deux sujets.

Plus de dix années que cette procession de jeunes maires désarmés par les Instituts d’études politiques locaux ont hérité de leurs prédécesseurs à défaut de réflexion des réflexes ne correspondant plus ni au présent ni au réel. Rennes, Nantes, Grenoble voient leurs rues chaque semaine ensanglantées. Au couteau, au sabre, à la kalash, à la hache, au parpaing. Sur fond de trafics mafieux de stupéfiants de plus en plus dosés, d’armes de plus en plus guerrières et d’êtres humains de plus en plus instrumentalisés. Tous ceux qui travaillent sur ces enjeux - de gauche, de droite ou du terrain - le savent : ce n’est qu’une seule et même réalité.

Envisager ne serait-ce que de le dire pour éventuellement pouvoir commencer à travailler sérieusement à lutter contre ces trafics vous condamnait jusqu’à aujourd’hui à porter dans le dos la lettre écarlate du facho. Le facho. Ce fameux électeur du RN, puis des LR, puis de LREM et dès demain du PS. Le facho, c’est en vérité celui qui ose ne pas voter pour LFI-EELV et qui ne déteste ni la police ni les juifs. Le facho c’est désormais celui qui se plaint parfois d’avoir peur et souvent d’en avoir marre de voir la ville qu’il aime sombrer. Mais ça, c’était avant ! Avant que le maire de Bordeaux n’avoue sa faute, ne confesse son péché. Avant qu’il ne se soumette à la tentation du réel.

Le réel, c’est quand on se cogne disait Lacan. Eh oui, par-delà les salons municipaux, le niveau de violence est monté de plusieurs crans ces dernières années. Et c’est pourquoi tous les responsables politiques de tous bords, préfets, magistrats, policiers, gendarmes, douaniers doivent travailler alignés sans se cacher derrière leurs petites doxas. Les policiers sur le terrain doivent être en nombre, armés, équipés et soutenus et la vidéoprotection généralisée. Les sanctions doivent être rapides, réelles et publiques et les journaux - publics et privés - doivent témoigner de ce qu’ils voient en commençant par voir ce qu’ils voient.

Et oui, les maires doivent travailler avec les ministres et tous les élus municipaux même quand ils ont l’outrecuidance de ne pas être socialistes. Les maires doivent assumer leurs responsabilités, rendre des comptes chaque mois et se soumettre au débat public devant leurs concitoyens plutôt que d’organiser des conférences stupéfiantes sur la police qui tue. Et cessons de nous raconter des fables. Ce néozadisme d’atmosphère n’est pas une fatalité. Ce n’est pas à l’extrême droite qu’il faut reprocher de dénoncer parfois des évidences mais c’est à nous autres qu’il faut reprocher de ne pas avoir eu le courage de regarder en face, d’écouter et de faire autre chose que ce qui ne fonctionnait plus. Mais ça, c’était avant ! Ad majorem Hurmic gloriam..

Le maire de Bordeaux a eu le courage de changer d’avis. Seuls les imbéciles ne le font pas. D’aucuns diront qu’il s’est converti au réel, d’autres qu’il est devenu un facho comme les autres. Il a justifié ce revirement par un «changement de contexte». L’autre nom du réel, ricaneront certains. Ne l’accablons pas car lui au moins a reconnu son erreur. Une erreur qui coûte très cher aux villes dont ces maires ont, pour la plupart, hérité. Il est encore temps pour ses coreligionnaires de le suivre. La pénitence groupée est moins accablante. Puissent les maires de Rennes, Nantes et Grenoble en cette semaine post Toussaint être à leur tour touchés par la grâce bordelaise. Puisse la vérité révélée à Pierre Hurmic apparaître enfin aux siens et jaillir en une épiphanie du réel. Ensemble prions !