7 décembre 1815 : le « Brave des braves », le maréchal Ney, est fusillé


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«Accusé de haute trahison et d’attentat contre la sûreté de l’Etat», une ordonnance royale confie à la Chambre des Pairs le soin de juger le maréchal Ney : l’acte d’accusation est rédigé en cinq jours, et les débats commencent dès le 21 novembre, au Palais du Luxembourg, en présence de nombreux représentants des puissances étrangères.

Une écrasante majorité se prononce le 6 décembre 1815 pour la peine de mort. Il est exécuté avenue de l’Observatoire à Paris, le 7 décembre 1815.
Cette matinée du jeudi 7 décembre 1815 est humide et brumeuse.

Le maréchal est vêtu d’une redingote bleue, d’un gilet noir, d’une culotte courte et de bas de soie noire, et ne porte aucune décoration : il n’est donc pas nécessaire de le faire dégrader.

Le lieutenant-général de l’Espinois charge le général comte de Rochechouart d’exécuter l’arrêt de la Chambre des pairs. Le départ du palais du Luxembourg a lieu à 8h30. Faisant encore preuve d’humour et sang-froid, le maréchal dit au curé lorsqu’il monte dans la voiture : « Montez, je vous prie, monsieur le curé. Tout à l’heure, je passerai le premier. »

Deux lieutenants de gendarmerie montent avec eux. La voiture est encadrée par cent trente gendarmes formant une file de chaque côté, suivis de Rochechouart et La Rochejaquelein, d’une compagnie de vétérans sous-officiers, du peloton d’exécution et d’un escadron de la garde nationale. Les mesures de sécurité sont appliquées tout au long du parcours jusqu’au lieu de l’exécution, gardé secret, tant l’on craint des troubles.

Le trajet est très court (trois cents pas de la grille du jardin du Luxembourg). Le lieu de l’exécution n’est pas le lieu habituel, la plaine de Grenelle, où fut exécuté Charles de La Bédoyère, ce qui ne manque pas d’étonner le maréchal.

Il est situé entre l’entrée de l’avenue de l’Observatoire et la grille du jardin du Luxembourg, le long du mur d’un enclos. Dans le Paris d’aujourd’hui, le lieu de l’exécution est situé à l’emplacement de la station RER Port-Royal.

Ney remet au curé une tabatière pour son épouse et quelques louis pour les pauvres de Saint-Sulpice. Les troupes sont rassemblées et formées en bataillon carré, un public de curieux est également présent (environ deux cents personnes dont des pairs de France, des généraux, des officiers de toutes nations, et une majorité constituée d’ouvriers…) Rochechouart désigne M. de Saint-Bias, officier d’origine piémontaise, pour commander le feu. Ney refuse de se mettre à genoux et d’avoir les yeux bandés, et déclare ainsi : « Ignorez-vous que depuis vingt-cinq ans, j’ai l’habitude de regarder en face les boulets et les balles. » Restant très calme et digne, plaçant la main sur son cœur, il dit : « Français, je proteste contre mon jugement… mon honneur… »

Celui qui a passé sa vie sur les champs de bataille et qui n’a pas réussi à se faire tuer à Waterloo meurt de onze balles françaises dont six dans la poitrine. On entend alors un roulement de tambour et les cris de « Vive le Roi ! »

Rochechouart commentant l’exécution à La Rochejaquelein dit : « Voilà, mon cher ami, une grande leçon pour apprendre à bien mourir. » Au même moment, la maréchale est toujours en train d’attendre son audience auprès du roi aux Tuileries, pour obtenir sa grâce. Elle n’obtient ni l’une ni l’autre et le duc de Duras, premier gentilhomme du roi, vient lui annoncer après l’exécution : « Madame, l’audience que vous sollicitez serait maintenant sans objet. »

Le corps reste exposé pendant quinze minutes sur le terrain, pendant lesquelles deux incidents se produisent : le premier est dû à un Anglais à cheval qui a sauté par-dessus le cadavre puis s’est enfui ; le second vient d’un général russe en uniforme et à cheval qui est venu contempler l’exécution du maréchal.

Voir : La mort du maréchal Ney en 1815 | RetroNews - Le site de presse de la BnF

Son avocat, Pierre-Nicolas Berryer, relate dans ses Souvenirs de M. Berryer que : « Le mur qui était en construction et ses débris furent bientôt recouverts de son sang ; la foule empressée se précipita pour en recueillir les moindres traces, avec la même ardeur que s’il se fût agi des morceaux de la vraie croix (…) »

Le corps est ensuite transporté dans un hospice proche, l’hospice de la Maternité, où il est remis aux sœurs de la Charité. Selon un rapport de police, de nombreuses personnalités sont venues le voir : pairs de France, généraux, officiers, ambassadeurs… Dès le lendemain matin, son corps est déposé dans un cercueil de plomb et un de chêne. Il est ensuite enterré au cimetière du Père-Lachaise dans une tombe très simple (une dalle posée au sol).

Symboliquement, cette exécution met un terme définitif à la Révolution, l’Empire et la période des Cent-Jours, mais pas au souvenir du maréchal Ney.
NEY (Michel, duc d’Elchingen, prince de la Moskowa), 1769-1815, maréchal

Il naquit le 10 janvier 1769 à Sarrelouis, avant-poste français en Lorraine allemande. Il était d’origine modeste : son père, artisan tonnelier, avait été soldat et fait la guerre de Sept Ans. Michel aura une formation première insuffisante. Attiré par l’armée, le jeune homme s’engage à l’âge de dix-neuf ans dans le 5e hussards à Metz. Il sera sous-lieutenant en 1792 à l’armée Sambre-et-Meuse où il sera remarqué par un grand chef, Kléber. Cavalier et chef de partisans, il est général en 1796. Comme il est roux, ses hommes l’appellent le « rougeaud » ; il n’est pas facile, orgueilleux, susceptible mais n’a peur de rien.

Auteur : François-Guy Hourtoulle. Article du Dictionnaire Napoléon, dirigé par Jean Tulard, Éditions Fayard. Lire la suite en accès libre : NEY (Michel, duc d'Elchingen, prince de la Moskowa), 1769-1815, maréchal - napoleon.org

Le maréchal Ney
de Franck Favier (Auteur)

Le " Lion rouge " de l'Empire.
Qui ne connaît pas le maréchal Ney ? Il figure avec Murat, Lannes ou encore Davout, parmi les maréchaux d'Empire les plus connus et les plus populaires. De fait, rien ne lui a manqué pour lui assurer une place prédominante dans l'épopée napoléonienne, ni la bravoure, ni les victoires, ni les malheurs... Sa popularité, le maréchal la gagna d'abord lors des guerres de la Révolution en s'illustrant au sein de l'armée de Sambre-et-Meuse. Avant que sa bravoure à Friedland, à la Moskova – dans une carrière héroïque comptant près de 300 combats et de 50 batailles rangées – n'emporte l'adhésion de ses contemporains. Pourtant, l'homme n'est pas d'un bloc et a eu de nombreux détracteurs ; sa susceptibilité envers ses condisciples ternit son image, également écornée par son inconstance politique notamment manifeste lors de la campagne de France puis durant les Cent-Jours. Sa mort, face à un peloton d'exécution, le 7 décembre 1815, fit cependant de lui un martyr.
Cette belle biographie met en scène ce personnage de légende en s'appuyant sur de nombreuses archives, qu'elles soient privées ou publiques, sans oublier les Mémoires de contemporains. Lesquels se sont souvent interrogés sur cet homme qui mêla étroitement, au point de les confondre, tant la franchise et la susceptibilité que le courage et l'inconstance.

Éditeur ‏ : ‎ Perrin (16 mars 2023)
Langue ‏ : ‎ Français
Broché ‏ : ‎ 400 pages
ISBN-10 ‏ : ‎ 2262079943
ISBN-13 ‏ : ‎ 978-2262079949
Poids de l'article ‏ : ‎ 487 g
Dimensions ‏ : ‎ 14.1 x 3.5 x 21.2 cm

Le maréchal Ney
de Eric Perrin (Auteur)

Dans le cycle de l'épopée napoléonienne, le maréchal Ney (1769-1815) occupe la place d'un Roland ou d'un Bayard. Duc d'Elchingen et prince de la Moskowa par la grâce de l'Empereur, surnommé le " brave des braves ", il s'illustre par sa vaillance et par une audace pas toujours réfléchie. Déifié par la légende, Ney l'a été aussi en raison de sa fin tragique. Il est fusillé au début de la seconde Restauration pour s'être rallié à Napoléon pendant les Cent Jours, au lieu de le ramener dans une " cage de fer ", ainsi qu'il l'avait promis à Louis XVIII. Le maréchal Ney rejoint, à la barre des grands procès de l'histoire de France, Louis XVI, Bazaine, Dreyfus, Pétain. Cassure politique, le procès Ney a suscité une vive polémique, habilement exploitée par les bonapartistes, les orléanistes et les républicains. L'exécution du " brave des braves ", un matin gris du mois de décembre 1815, au carrefour de l'Observatoire, fait oublier l'irritabilité de ce " mauvais coucheur", sa nature mobile, et cette opinion sévère de Napoléon : " Il était bon sur un champ de bataille, mais je n'aurais pas dû le nommer maréchal. " L'exploration du fonds Ney aux Archives nationales met en lumière, à côté de sa vaillance, les contradictions et les faiblesses du plus célèbre maréchal de Napoléon qui, à défaut d'avoir été " un esprit ", fut incontestablement un " caractère ". Fils d'un modeste artisan de Sarrelouis, il manifeste de l'orgueil pour ce qu'il est et du mépris pour ce qu'il a été. Le " Lion rouge ", comme on le baptisa, rugira de colère, une ultime fois, à Waterloo, avant de faire face au peloton d'exécution.

Éditeur ‏ : ‎ PERRIN (1 août 1993)
Langue ‏ : ‎ Français
Broché ‏ : ‎ 378 pages
ISBN-10 ‏ : ‎ 2262008922
ISBN-13 ‏ : ‎ 978-2262008925
Poids de l'article ‏ : ‎ 540 g
Dimensions ‏ : ‎ 14.1 x 3.1 x 22.6 cm


NEY MICHEL (1769-1815) maréchal d'Empire (1804) duc d'Elchingen (1808) prince de la Moskowa (1812)

« Le Brave des braves ». Fils d'un tonnelier de Sarrelouis, d'abord petit clerc de notaire, puis soldat dès 1787. Avance avec une relative lenteur au cours des guerres de la Révolution ; quand Napoléon en fait un de ses premiers maréchaux, Ney a déjà une grande réputation d'héroïsme, mais n'a encore jamais exercé que de petits commandements ; par contre, il s'est signalé par son ostentatoire loyalisme envers Bonaparte lors du procès de Moreau, son ancien chef. À la Grande Armée, de 1805 à 1807, il tiendra indiscutablement l'un des premiers rôles. Mais son étoile pâlit dès qu'il n'est plus sous le commandement direct de l'Empereur ; peu manœuvrier, bourru, mauvais coucheur, jaloux de ses pairs, il ne réussit guère en Espagne de 1808 à 1811. C'est pendant la campagne et surtout pendant la retraite de Russie que les exploits de Ney forceront l'admiration de tous et le feront entrer vivant dans la légende. Durant la campagne d'Allemagne de 1813, son chef d'état-major, Jomini, déserte ; privé des savants conseils de Jomini, Ney laissera encore mieux voir, tout en demeurant un prestigieux entraîneur d'hommes, son inaptitude aux grands commandements. À Fontainebleau, en 1814, il est l'un de ceux qui exigent le plus vite et le plus brutalement l'abdication de l'Empereur, pour se rallier aux Bourbons avec toutes les effusions du dévouement. Le 5 mars 1815, Louis XVIII le charge de barrer la route de Paris à l'usurpateur et Ney promet à son roi de lui « ramener Buonaparte dans une cage de fer » ; le 12, Ney se déclare pour l'Empereur et lui amène ses troupes. On peut se demander si, dès lors, il ne vit pas dans une confusion psychologique qui le prive d'une partie de ses moyens ; on s'expliquerait mieux ainsi sa conduite héroïque, mais incohérente, en juin 1815, ses tergiversations coupées de coups de boutoir et, à Waterloo, sa désastreuse obstination à épuiser ses troupes en attaques frontales répétées sans tenter la moindre manœuvre. Arrêté en août (il avait refusé d'utiliser le passeport dont Fouché l'avait muni pour tenter de lui éviter le pire), traduit devant un conseil de guerre qui se déclare incompétent, ensuite devant la Chambre des pairs, il est condamné à mort le 6 décembre et fusillé le lendemain. La duchesse d'Angoulême avait refusé de demander la grâce de Ney au roi ; beaucoup plus tard, lisant le livre de Ségur sur la campagne de Russie, elle s'écriera : « Mon Dieu, que d'héroïsme ! Pourquoi ignorions-nous tout cela ? »

Jean MASSIN : écrivain - Biographie de MICHEL NEY (1769-1815) maréchal d'Empire (1804) duc d'Elchingen (1808) prince de la Moskowa (1812) - Encyclopædia Universalis
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