Renaud Girard : «Le grand retour des rapports de force dans les relations internationales»
Lors de ses vœux de Noël, Donald Trump a laissé entendre qu’il souhaiterait intégrer le canal de Panama ou le Canada à son pays — montrant ainsi à un retour de la politique impériale américaine. Avec une nouveauté : il n’hésite pas à tordre le bras de ses alliés.
Au-delà du goût avéré du président élu pour les boutades – dont raffole son électorat –, nous assistons là à un retour de la politique impériale américaine classique. En ce qui concerne le Panama, on revient à la doctrine Monroe du XIXe siècle, qui disait que les puissances étrangères au continent américain – jadis européennes, aujourd’hui la Chine – n’ont rien à y faire.
En souhaitant dans son tweet un joyeux Noël aux « soldats chinois » installés « illégalement » à Panama, Donald Trump ne rapporte pas une situation avec exactitude, mais il exprime une réelle inquiétude stratégique des États-Unis. Il n’y a pas de base militaire chinoise à Panama, mais il y a de très importants investissements chinois de modernisation du canal. Le Pentagone redoute que cela ne donne un jour la possibilité à la Chine de fermer le canal de Panama, en cas de tension autour de l’île de Taïwan.
Une telle fermeture retarderait considérablement l’éventuel déplacement dans le détroit de Formose de la deuxième flotte américaine (celle de l’Atlantique, basée en Virginie), qui viendrait en renforcement de la septième (celle du Pacifique, basée au Japon), afin de sauvegarder la liberté des Taïwanais face à une imminente entreprise d’invasion de leur île par l’Armée populaire de libération de la Chine communiste.
En vertu d’un traité de 1903, les États-Unis bénéficiaient d’une souveraineté perpétuelle sur la zone du canal de Panama, ainsi que d’un droit de regard sur les affaires intérieures de la République hispanophone de Panama. Le président Carter avait renoncé à ce privilège en septembre 1977. « L’équité et non la force doit être au cœur de nos relations avec les nations du monde », avait-il expliqué.
Renaud Girard: «Le grand retour des rapports de force dans les relations internationales»