«Sans un revirement complet de notre politique climatique, le cauchemar mahorais risque de se reproduire en France» - Par Philippe Charlez

Le cyclone Chido qui a dévasté Mayotte a principalement touché les populations immigrées des bidonvilles. Pour éviter que pareil désastre ne se reproduise, il faudra revoir notre politique climatique et construire des logements viables, explique l’expert en questions énergétiques Philippe Charlez.


En moins de temps qu’il ne faut le dire, le cyclone Chido a ravagé Mayotte laissant derrière lui victimes et désolation. Des centaines voire des milliers de morts selon les autorités, sans compter la crise sanitaire qui se profile par manque d’eau et de nourriture. Toujours très difficile à prévoir, la trajectoire de ce «monstre tourbillonnaire» n’avait qu’une faible probabilité de se centrer sur une île aussi petite. Malchance ou réchauffement climatique, chacun ira de ses raccourcis didactiques. Au-delà de notre compassion vis-à-vis d’une population mahoraise brisée dans sa chair, ce drame inspire deux grandes réflexions.

À la Réunion, où de tels phénomènes extrêmes peuvent aussi se manifester, la plupart des bâtiments sont construits avec des normes anticyclones. À Mayotte, les nombreuses victimes vivaient dans un bidonville à ciel ouvert. Dans une île où 45% des habitants sont des illégaux venus des Comores et des côtes africaines, les victimes seront avant tout la conséquence d’un urbanisme précaire lui-même résultat d’une immigration incontrôlée. Espérant trouver le paradis à Mayotte, ces migrants y auront découvert l’enfer en terminant ensevelis sous un enchevêtrement de tôles et de boue. En revanche, les locaux qui avaient la chance de vivre dans des bâtiments en dur auront à quelques exceptions près eu la vie sauve.

C’est en construisant une maison en briques que le plus courageux des trois petits cochons a pu protéger ses deux frères de la fureur du loup qui avait soufflé celle en paille du premier et celle en bois du second. Au-delà du problème migratoire, cet évènement dramatique prouve une nouvelle fois que le développement humain, la croissance économique et la production de richesses sont nos meilleurs atouts pour lutter contre les aléas météorologiques et climatiques. La dernière enquête de l’ONU publiée en 2023 montre que depuis 1970, grâce au développement économique, le nombre de victimes climatiques a été divisé par trois. Sans surprise, 90% d’entre elles se trouvent dans les pays émergents.

Un constat évident que refusent pourtant de reconnaître la plupart des écologistes, qui pour des raisons purement idéologiques prônent une décroissance mortifère. Ne leur en déplaise, c’est en construisant du dur qu’on se protège des fureurs de la nature. Et, pour construire du dur il faut du béton et de l’acier et donc… de la richesse, celle qu’apporte la croissance. Je doute que la vision rousseauiste de la «hutte en paille» des Barreau, Servigne ou autres Stevens soit partagée post mortem par les malheureux immigrés ensevelis sous les décombres.

Le drame de Mayotte est aussi un signal fort nous incitant à revoir de fond en comble notre politique climatique aujourd’hui totalement (et stupidement !) carbo-centrée. Le Pacte vert européen est à la fois économiquement dévastateur et socialement explosif. Il conduit la France à projeter des sommes stratosphériques (180 milliards d’euros par an soit 6,2% du PIB 2023) dans une transition énergétique à la fois irréaliste, injuste, insoutenable et surtout inutile dans la mesure où elle n’aura qu’un impact insignifiant sur le réchauffement climatique. Un suicide en bonne et due forme sur l’autel de la «vertu vonderleyenne » !

Parallèlement aux budgets stratosphériques dédiés à l’atténuation, le Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC) est un catalogue des bonnes intentions assorti d’une coquille vide. S’il détaille les mesures dans des domaines cruciaux comme l’agriculture, la gestion de l’eau ou l’aménagement du territoire, le PNACC n’est associé à aucun budget.

La lointaine décarbonation mondiale, bien au-delà de la chimère 2050, nous amène inexorablement vers un monde à +3°C. Ce constat change totalement l’ordre des priorités par rapport à un accord de Paris devenu obsolète. La primauté n’est plus de mettre en œuvre des éoliennes et des panneaux solaires voire de remplacer les voitures thermiques par des véhicules électriques mais de désartificialiser les sols, de construire des digues et un habitat adapté. Sans cette prise de conscience et un revirement complet de notre politique climatique, dans dix ans le cauchemar mahorais risque de se reproduire dans l’Hexagone.