La bataille des mers : les États-Unis contre la Chine dans la construction navale et la puissance navale - Par Antonio Graceffo

Le Congrès des États-Unis avertit que la Chine dépasse les États-Unis en matière de construction navale et maritime, incitant le président Donald Trump à lancer une nouvelle initiative de construction navale.


Depuis plus d’un siècle, les dirigeants militaires et politiques reconnaissent l’importance de la suprématie maritime et navale.

« Notre programme de construction navale – non seulement celui de la Commission maritime, mais aussi celui de la marine – est l’une de nos réponses aux agresseurs qui voudraient porter atteinte à notre liberté », a déclaré Franklin Delano Roosevelt, qui a été secrétaire adjoint à la marine (1913-1920), puis 32e président des États-Unis (1933-1945), dirigeant la nation pendant la Seconde Guerre mondiale.


Malgré cette reconnaissance de longue date, les États-Unis ont pris du retard sur leur principal rival, le Parti communiste chinois (PCC), dans le domaine de la construction navale. La flotte marchande chinoise, qui compte plus de 5500 navires, dépasse largement la marine marchande américaine, qui comprend entre 80 et 179 navires privés battant pavillon américain, selon les critères utilisés pour définir la flotte.

En outre, la flotte de l’Armée populaire de libération possède désormais plus de navires que la marine américaine, avec un total de 405 navires, dont 234 navires de guerre. À titre de comparaison, la marine américaine exploite 296 navires de combat habités, dont des navires de soutien et de logistique de combat, mais seulement 219 sont classés comme navires de guerre. Toutefois, les États-Unis conservent un avantage en termes de puissance de feu grâce à leur technologie et à leurs capacités supérieures.

Au cours des deux dernières décennies, la Chine s’est imposée comme le leader mondial de la construction navale, contrôlant désormais plus de la moitié du marché mondial de la construction navale commerciale, tandis que la part des États-Unis est tombée à un niveau négligeable. En 2023, les chantiers navals américains ont produit environ 64.809 tonnes brutes de navires marchands, soit environ 0,1 % du total mondial de 64.774.769 tonnes brutes.

Rien qu’en 2024, un seul constructeur naval chinois a produit plus de tonnage que l’ensemble de l’industrie navale américaine depuis la Seconde Guerre mondiale. La domination de la Chine sur la construction navale repose principalement sur sa société d’État China State Shipbuilding Corporation (CSSC), qui bénéficie de la fusion entre le militaire et le civil, permettant ainsi aux ventes commerciales de soutenir directement l’expansion navale. De nombreux alliés des États-Unis, dont la France, le Japon et la Corée du Sud, continuent d’acheter auprès de la CSSC, renforçant ainsi indirectement la croissance militaire chinoise.

Récemment, un consortium dirigé par BlackRock a pris le contrôle de ports clés présentant des intérêts liés à la Chine, notamment à proximité du canal de Panama, première étape pour contrer la domination maritime croissante du régime chinois. En outre, le président Trump s’est engagé à revitaliser la construction navale américaine en créant le Bureau de la construction navale de la Maison-Blanche, dédié à ce secteur, et en imposant des droits de douane et des taxes d’amarrage sur les navires de construction chinoise.

Dans le cadre de cet effort, le bureau du représentant américain au commerce (USTR) a proposé de nouvelles taxes et des mesures de préférence pour le fret afin de contrer la domination de la Chine dans la logistique et le commerce maritime. Le plan prévoit des redevances pouvant atteindre 1,5 million de dollars par escale aux États-Unis pour les navires construits en Chine et 1 million de dollars pour les navires exploités par la Chine, ainsi que des frais supplémentaires pour les entreprises qui commandent des navires à des chantiers navals chinois.

Une autre mesure clé est la mise en place progressive d’une politique de préférence pour les cargaisons commerciales, exigeant qu’un pourcentage croissant des exportations américaines soit transporté sur des navires battant pavillon américain, en commençant par 1 % et en atteignant 15 % sur une période de sept ans. Toutefois, il n’est pas certain que les navires américains construits en Chine ou les navires battant pavillon étranger et comportant des équipements chinois soient soumis à ces nouvelles taxes.

La décision de l’USTR, basée sur une pétition des syndicats nationaux, a conclu que la domination de la Chine dans l’industrie maritime constitue une charge injuste pour le commerce américain en déplaçant les entreprises à l’étranger, en réduisant la concurrence et en créant des vulnérabilités au niveau de la chaîne d’approvisionnement. En outre, les partisans des nouvelles taxes affirment qu’il est essentiel de contrer la domination chinoise en matière de construction navale pour empêcher le PCC de tirer parti de sa supériorité navale et de sa flotte marchande afin d’intimider ses alliés et de perturber le commerce mondial.

Au Capitole, les représentants Mark Green (Parti républicain du Tennessee), Jen Kiggans (Parti républicain de Virginie) et Don Davis (Parti démocrate de Caroline du Nord) ont présenté un projet de loi bipartisan visant à créer une commission nationale sur le tissu industriel maritime chargée d’évaluer l’état de la construction navale américaine et de recommander des politiques pour restaurer la compétitivité de ce secteur. MM. Kiggans et Davis soulignent la nécessité d’une collaboration entre les secteurs public et privé pour relever les défis liés à la main-d’œuvre et à la chaîne d’approvisionnement dans un secteur en difficulté, la construction navale.

Entre-temps, le programme Base industrielle maritime (MIB), lancé en septembre 2024 pour reconstruire les capacités de construction et de réparation navales des États-Unis, a géré 1100 initiatives d’investissement dans 37 États, soutenant la construction navale, les porte-avions et la production de sous-marins – la plus importante revitalisation de l’industrie de la défense des États-Unis depuis la Seconde Guerre mondiale. Le programme sera désormais dirigé par Matthew D. Sermon, nommé par M. Trump et ancien responsable de la base industrielle sous-marine, qui devrait faire avancer les objectifs de production du président américain.

Malgré le soutien ferme de ce dernier et de nombreux membres du Congrès, des inquiétudes subsistent quant à la faisabilité de la stratégie de construction navale de M. Trump. La marine américaine prévoit de faire passer sa flotte de 296 à 381 navires de combat, ce qui nécessitera des dizaines de milliards par an au cours des trois prochaines décennies. Dans le même temps, la production de navires marchands a un besoin urgent de financement, puisqu’elle est passée de 15 à 25 navires par an dans les années 1970 à seulement 5 ou moins aujourd’hui.

Compte tenu des limites actuelles de la construction navale américaine, notamment son incapacité à produire efficacement de grands navires marchands, certains sénateurs préconisent d’externaliser la construction de navires de guerre auprès de l’OTAN et des alliés de l’Indo-Pacifique, comme le Japon et la Corée du Sud. Parallèlement, les principales entreprises de construction navale, dont l’entreprise italienne Fincantieri, ont accueilli favorablement le plan, soulignant son potentiel de création d’emplois et de revitalisation du tissu industriel.

Indépendamment des limitations financières et logistiques, l’expansion de la capacité de construction navale nationale des États-Unis, la reconstruction de la flotte marchande et le renforcement de la marine sont essentiels pour contrer les ambitions du PCC quant à sa domination économique et maritime au niveau mondial.
https://grandeschroniquesdefrance.blogspot.com/https://parolesdevangiles.blogspot.com/https://raymondaronaujourdhui.blogspot.com/