Réindustrialisation : un impératif stratégique pour la France et l’Europe - Par Paulin de Rosny
L’industrialisation de l’Europe est une nécessité si elle veut peser face à la Chine et aux Etats-Unis. Mais avec un manque de main d’œuvre qualifiée, trop peu d’investissements dans les secteurs stratégiques et une culture de la réglementation et du principe de précaution, les Européens limitent leurs ambitions.
Face à des crises globales qui mettent en lumière la fragilité des chaînes d’approvisionnement, la dépendance énergétique et le recul de sa compétitivité, l’Europe doit engager une réindustrialisation ambitieuse et coordonnée. Alors que les États-Unis et la Chine rivalisent de protectionnisme et d’investissements massifs dans les technologies stratégiques, le continent européen peine à harmoniser ses politiques industrielles. La réindustrialisation n’est pas seulement une réponse aux défis géopolitiques et politiques : elle est un impératif pour restaurer la souveraineté économique et revitaliser les territoires. Mais pour réussir, l’Europe devra surmonter des obstacles majeurs : un défaut de financement, une pénurie de main-d’œuvre qualifiée, et une gouvernance fragmentée.
La concurrence des grandes puissances, comme les États-Unis avec l’Inflation Reduction Act, ou de la Chine, soutenue par des subventions massives, accentue la pression sur les industries européennes. On pense notamment à l’industrie automobile en difficulté face à la concurrence chinoise sur les voitures électriques.
Mario Draghi, dans son rapport pour la Commission européenne, décrit la désindustrialisation comme un « suicide stratégique » pour l’Europe. Il met en garde contre une fragmentation des politiques industrielles européennes qui affaiblit la position du continent face à la montée des blocs économiques rivaux. Enrico Letta ajoute que « l’Europe ne peut survivre sans une base industrielle forte, capable de garantir son autonomie stratégique ». Mais à cela s’ajoute une difficulté politique majeure : le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche. Celui-ci pourrait exploiter les divergences entre les États européens, notamment sur les questions énergétiques et industrielles, pour diviser et affaiblir encore davantage le continent. Cette perspective renforce l’urgence d’une réindustrialisation coordonnée et résiliente.