La Ve République se suicide sous nos yeux - Par Nicolas Baverez
Réindustrialisation, armement, dette, éducation… l’inertie touche tous les domaines de l’action publique, alors que l’histoire bascule.
Plus l'histoire accélère, plus la France est immobile. L'âge des empires succède à l'après-guerre froide. Les États-Unis basculent dans l'illibéralisme et s'alignent sur les autocraties, qui désignent la démocratie comme ennemie. La mondialisation se referme et cède la place à des blocs économiques obéissant à une logique de protection et d'arsenal. La guerre de haute intensité effectue un retour en force et la violence sort de tout contrôle. L'Europe se trouve dans une position critique, prise sous le feu croisé du protectionnisme et du retrait de la garantie de sécurité des États-Unis, de la menace militaire de la Russie et du dumping industriel de la Chine.
Face à ce maelström sans précédent depuis les années 1930, l'Union européenne s'active pour répondre à la guerre commerciale de Washington et pour financer l'industrie de défense. L'Allemagne de Friedrich Merz rompt avec la déflation, le sous-investissement chronique, le désarmement unilatéral et l'atlantisme en révisant sa Constitution avant même l'entrée en fonction du nouveau gouvernement de coalition. L'Europe du Nord réarme à marche forcée. L'Europe du Sud se mobilise pour préserver sa dynamique de relance. Seule la France fait exception, qui demeure à l'arrêt, figée dans le déni du basculement du monde, réduite à l'inaction par l'impuissance de l'État, enfermée dans des postures et des débats déconnectés de toute réalité.
La Ve République se suicide sous nos yeux