Royaume-Uni : quand la courbe de LAFFER devient RÉALITÉ sous nos yeux - Par Nathalie MP Meyer


Comparé à la France, le Royaume-Uni pourrait presque passer pour un as du sérieux budgétaire : sa dette publique tourne autour de 100 % du PIB quand nous sommes déjà à 113 % et en très bonne voie de dépasser les 115 % dès la fin de l’année. Il n’empêche que pour l’organisme britannique en charge de la « responsabilité budgétaire » (ou OBR), un tel niveau ne sera pas soutenable éternellement.

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C’est ainsi qu’à l’automne 2024, le nouveau Premier ministre travailliste Keir Starmer et sa ministre des Finances Rachel Reeves présentaient un budget « douloureux » comprenant à la fois des hausses d’impôts, des investissements dans les services publics et des coupes dans les dépenses.

Quelques explications s’imposent.

Dans l’esprit de la gauche, courant auquel appartient l’actuel gouvernement britannique, la dette publique n’est pas vraiment un problème. Soit, comme le suggère fortement Jean-Luc Mélenchon, on se « libère du boulet de la dette » par annulation de la part détenue par la banque centrale et l’on se retrouve avec de la capacité d’endettement pour lancer des investissements en faveur de la justice sociale et climatique. Soit, comme le préconise de son côté Thomas Piketty, on lève de nouveaux impôts en taxant, retaxant et surtaxant encore plus les multinationales et les contribuables les plus riches.

Eh bien, disons que M. Starmer et Mme Reeves ont construit leur budget en combinant des caractéristiques empruntées à ces deux écoles socialistes du traitement de la dette. Conformément à l’esprit Piketty, les hausses d’impôts prévues à hauteur de 40 milliards de livres se concentrent essentiellement sur les entreprises et sur les revenus du capital des contribuables les plus aisés, tandis que, dans une forme de mélenchonisme atténué, le taux de dette publique sur PIB sera dorénavant évalué en sortant du calcul les emprunts effectués pour financer les investissements de 20 milliards de livres par an (100 milliards sur cinq ans) dans les infrastructures et les services publics comme la santé (National Health Service ou NHS) et les écoles.

Quand on sait cependant que le NHS, tout comme notre système de santé français, a le chic pour engloutir année après année des milliards de livres sterling sans améliorer le moins du monde son fonctionnement essentiellement bureaucratique et désorganisé, il y a fort à parier que les « investissements » le concernant ne seront en fait que de simples dépenses à fonds perdus peu susceptibles de changer fondamentalement la face radicalement décrépie de la santé britannique, mais opportunément exclues de l’endettement affiché. Et dire qu’il est des personnes, parfois même des économistes, pour s’extasier devant ce tour de passe-passe grossier…

C’était un petit aparté, car le point que je voudrais souligner ici concerne le traitement de la dette par les hausses d’impôts ciblées sur les entreprises et les revenus du capital. Dès l’automne dernier, les principaux taux d’imposition des plus-values sont passés de 10 à 18 % pour les contribuables à taux de base, et de 20 à 24 % pour les contribuables à taux plus élevé. De plus, divers abattements accordés précédemment ont été considérablement réduits.