Jean-Louis Thiériot: «Augmenter le budget de la Défense à 5% enverrait un signalement stratégique à la Russie»

La France s’est récemment dite prête à se rallier à la hausse des dépenses militaires et de sécurité discutée au sein de l’Otan. Pour Jean-Louis Thiériot, il s’agit d’un objectif réalisable, mais surtout d’un «intérêt vital».

Jean-Louis Thiériot est député LR de la 3e circonscription de Seine-et-Marne et membre de la commission de la défense nationale et des forces armées à l’Assemblée nationale. Il a été ministre délégué aux Armées et aux Anciens Combattants.


LE FIGARO. - Selon le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, la France est prête à se rallier à un objectif de 3,5 % du PIB en dépenses militaires pures d’ici 2032, contre environ 2 % actuellement. Est-ce réaliste ?

Jean-Louis Thiériot. -
La première question qu’il faut se poser est : est-ce un intérêt vital ? La réponse est clairement : oui. En 2022, juste avant le début de la guerre en Ukraine, nous avions lancé une mission parlementaire sur le retour de la guerre de haute intensité, à l’issue de laquelle j’avais dit qu’il manquait 40 à 50 milliards sur la loi de programmation militaire. Aujourd’hui, on est à 50 milliards. Si on veut arriver à ce que le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, appelle « le poids de forme » de nos armées, c’est-à-dire entre 90 et 100 milliards, on est exactement entre 3 et 3,5 % du PIB. C’est bel et bien ce dont on a besoin, en termes d’impératifs de sécurité, et pas pour faire plaisir à M. Trump !

Maintenant, ce chiffre est-il réaliste ? Il en est là comme il en est de l’assurance qu’on paye pour sa maison : tant que ça ne brûle pas, ça coûte toujours trop cher, mais une fois que ça brûle, on regrette de ne pas s’être mieux assuré. On est dans cette situation-là, qui se rapproche de ce qu’on a appelé le « quoi qu’il en coûte » pendant le Covid. Car la sécurité, c’est la condition de tout le reste, de la durabilité dans tous les domaines, y compris de notre modèle social et de nos libertés, avec les incertitudes sur l’engagement américain au sein de l’Otan et la perte potentielle des capacités spatiales et de communication qui y sont liées.

Comment finance-t-on cela ?

Il n’y a pas de réponse unique. Cette montée en puissance passe nécessairement par une réallocation des ressources. Dépenser mieux, dépenser moins, en assumant de réexaminer toutes nos politiques publiques, bref : faire des économies. Mais aussi par un financement européen pour une part. On l’a fait pour le Covid. Pour moi, le péril est beaucoup plus existentiel que pendant la pandémie. Je serais en revanche hostile à une hausse d’impôts liée à la défense. Il faut voir qu’un point de croissance, c’est 20 ou 30 milliards de plus chaque année dans le budget de l’État. Donc si on parvient à augmenter la croissance et le taux d’emploi, on a une partie de notre problème qui est réglé.

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