Pierre Razoux : « Au Moyen-Orient, Donald Trump a partiellement appris de ses erreurs »
Historien et spécialiste des conflits contemporains, Pierre Razoux est directeur académique de la Fondation méditerranéenne d’études stratégiques (FMES). Il était auparavant directeur de recherche à l’IRSEM et chercheur au Collège de défense de l’OTAN. Spécialiste des conflits du Moyen-Orient, il est l’auteur d’une dizaine d’ouvrages de référence dont Tsahal, histoire de l’armée israélienne (Perrin) et a contribué au documentaire Daguet, l’opération qui a transformé l’armée française réalisé par l’ECPAD en 2021.
Il reste l’un des meilleurs analystes français sur le Moyen-Orient et il revient pour Le Diplomate sur la situation actuelle dans la région au prisme du retour de Donald Trump dans le Bureau ovale…
Propos recueillis par Roland Lombardi
Le Diplomate : Depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche en janvier 2025, quels changements majeurs observez-vous dans la politique américaine au Moyen-Orient, et en quoi diffèrent-ils de sa première mandature ? S’agit-il d’une politique essentiellement sécuritaire, d’une volonté d’endiguement d’influences rivales (Iran, Russie, Chine) ou d’une démarche plus large de “deal-making” économique ?
Pierre Razoux : La nouvelle administration Trump ne semble se préoccuper que de trois sujets :
1) garantir la sécurité d’Israël pour que celui-ci continue d’acheter massivement des armes américaines et que les hommes d’affaires israéliens continuent d’investir massivement aux États-Unis et soutiennent le parti républicain (et non plus démocrate comme dans le passé) ;
2) trouver un « grand accord » avec l’Iran pour apparaître comme un « faiseur de deal » qui lui permette d’obtenir le prix Nobel de la Paix et rester dans les livres d’histoire, de manière à stabiliser la région pour que les entreprises américaines puissent investir massivement en Iran ;
3) aboutir à une normalisation des relations entre l’Arabie Saoudite et Israël, afin de renforcer les accords d’Abraham qui sont le seul succès dont Donald Trump peut se prévaloir au Moyen-Orient durant son premier mandat. Je dirai donc que les priorités de la nouvelle administration américaine au Moyen-Orient sont d’abord et avant tout l’ego, le business et les affaires, la sécurité et la géopolitique ne venant qu’au second rang.
Donald Trump a partiellement appris de ses erreurs. La première fois, il avait donné de nombreux gages à Benyamin Netanyahou, espérant que cela rehausserait le prestige des États-Unis dans la région et lui apporterait le soutien de la communauté juive aux États-Unis. Il avait appliqué une stratégie de pressions maximales contre l’Iran pour contraindre Téhéran à changer de stratégie, en refusant tout dialogue avec le pouvoir iranien mais en écartant paradoxalement l’option militaire. A l’époque, il pensait enfin pouvoir reprendre la main en Arabie Saoudite et aux Emirats Arabes Unis pour éloigner ses deux monarchies de la Chine et de la Russie et les inciter à normaliser leurs relations avec Israël. Il cherchait surtout à détricoter tout ce qu’avait mis en place son prédécesseur Barack Obama.
Les évènements ont montré que Donald Trump s’était trompé sur presque tous les points, sauf sur les accords d’Abraham. Il cherche désormais à promouvoir des « deals », et non plus à les défaire, et il manie à la fois la carotte diplomatique et le bâton militaire, notamment au Yémen qui lui permet de montrer aux Iraniens ce qui pourrait leur arriver s’ils s’évertuaient à refuser une négociation directe que Donald Trump appelle de ses vœux et qu’il dit pour l’instant privilégier.
Donald Trump a partiellement appris de ses erreurs. La première fois, il avait donné de nombreux gages à Benyamin Netanyahou, espérant que cela rehausserait le prestige des États-Unis dans la région et lui apporterait le soutien de la communauté juive aux États-Unis. Il avait appliqué une stratégie de pressions maximales contre l’Iran pour contraindre Téhéran à changer de stratégie, en refusant tout dialogue avec le pouvoir iranien mais en écartant paradoxalement l’option militaire. A l’époque, il pensait enfin pouvoir reprendre la main en Arabie Saoudite et aux Emirats Arabes Unis pour éloigner ses deux monarchies de la Chine et de la Russie et les inciter à normaliser leurs relations avec Israël. Il cherchait surtout à détricoter tout ce qu’avait mis en place son prédécesseur Barack Obama.
Les évènements ont montré que Donald Trump s’était trompé sur presque tous les points, sauf sur les accords d’Abraham. Il cherche désormais à promouvoir des « deals », et non plus à les défaire, et il manie à la fois la carotte diplomatique et le bâton militaire, notamment au Yémen qui lui permet de montrer aux Iraniens ce qui pourrait leur arriver s’ils s’évertuaient à refuser une négociation directe que Donald Trump appelle de ses vœux et qu’il dit pour l’instant privilégier.
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