Jean-Éric Schoettl : « La justice des mineurs, encore une loi régalienne mise en pièces par le Conseil constitutionnel »
L’ancien secrétaire général du Conseil constitutionnel, Jean-Éric Schoettl, analyse la décision rendue le 19 juin par les « Sages » sur cette réforme de la justice des mineurs qui se trouve impitoyablement censurée.
Voici encore une loi régalienne que le Conseil constitutionnel s’est employé à dépecer. Depuis son renouvellement partiel (intervenu en mars dernier), un troisième texte régalien vient en effet de subir les foudres du contrôle de constitutionnalité. Après la loi relative au renforcement de la sûreté dans les transports (24 avril) et la loi « visant à sortir la France du piège du narcotrafic » (12 juin), c’est la réforme de la justice des mineurs, qui, le 19 juin, se trouve impitoyablement censurée.
Adoptée ces derniers mois au grand dam de la gauche et d’une partie du centre, la loi dite Attal n’est pourtant pas révolutionnaire.
Renversement de l’excuse de minorité (sauf motivation spéciale du juge) pour les crimes et délits punis de plus de cinq ans de prison ; responsabilité pénale des parents lorsque la délinquance de leur enfant a été induite par leur carence éducative ; comparution immédiate (sous réserve de leur accord) des mineurs d’au moins 16 ans « réitérants » s’ils encourent une peine supérieure ou égale à trois ans d’emprisonnement ; remise en cause, pour les délits les plus graves, de la « césure » (délai d’un an entre le procès sur la culpabilité et le jugement sur la peine); extension de deux mois à un an de la durée maximale de la détention provisoire, pour les moins de 16 ans ; possibilité de rétention du mineur ne respectant pas les obligations de son contrôle judiciaire (tels les meurtriers d’Elias) : le projet de loi Attal, élaboré après les émeutes de l’été 2023, se contentait de serrer quelques écrous après de tragiques affaires. Pensons à Nogent, à Dax ou au meurtre du jeune Élias. Ce dernier drame à lui seul a jeté une lumière crue sur les dysfonctionnements de la justice des mineurs, qui tiennent en bonne partie aux dispositions mêmes de cette législation, comme l’explique en connaissance de cause Béatrice Brugère, présidente du syndicat Unité Magistrats.
Le Conseil constitutionnel, qui statue au nom du peuple français, persiste à méconnaître l’aspiration croissante et pressante d’une majorité de nos compatriotes au réarmement de l’État contre l’insécurité