La casse, radioscopie d’une névrose politique française - Par Raul Magni Berton et Luc Gras
Les festivités qui ont accompagné la victoire du PSG en Ligue des champions ont été ternies par de nombreux actes de violence, à Paris mais aussi en province. Bilan de la soirée : plus de 560 interpellations, deux décès et des dizaines de blessés. Par Raul Magni Berton et Luc Gras pour Atlantico.
Raul Magni-Berton : Les casseurs sont apolitiques. Concernant la logique des casseurs, il y a un élément important à souligner : les profils des casseurs correspondent généralement à des personnes qui ont une existence, une activité en dehors des normes légales. Ils n’ont pas de réelles motivations politiques.
Luc Gras : De manière régulière, des délinquants se manifestent et provoquent le désordre lors de fêtes, mais aussi à l’occasion de victoires sportives ou du 14 juillet, et d’autres événements censés, au contraire, rassembler les Français dans une joie collective. Ces événements et ces incidents sont spécifiquement français. En Espagne, ces dernières années, lorsqu'il y a eu des victoires sportives importantes, il n'y a jamais eu de débordements populaires. Qu’est-ce qui fait qu’en France, les choses se passent ainsi ? Le fait majeur et l’une des principales explications derrière les actes de ces casseurs concernent un sentiment d’impunité, qui se nourrit d’une perception déjà ancienne. L’autorité n’est plus respectée dans notre pays. La spécificité de la France réside dans le fait qu’il existe désormais une minorité organisée en bandes qui profite de chaque occasion, chaque mouvement de foule, pour s’immiscer dans les événements et y causer des dégradations, comme une forme de défi à l’État républicain. Cette fois, les autorités publiques avaient déployé des moyens considérables, tant en termes d’effectifs que de prévention, pour garantir la sécurité lors de la finale de la Ligue des champions. Cela n’a cependant pas empêché les délinquants de sévir. Il y a eu plus de 500 arrestations. La question qui se pose maintenant est de savoir combien de ces individus seront effectivement condamnés par la justice.
Atlantico : Les partis ou personnalités, de gauche notamment, qui donnent une signification politique à ces émeutes en leur prêtant un caractère « social » impactent-ils l’idée que s’en font les casseurs ?
Raul Magni-Berton : Les propos de la droite et de l'extrême gauche sur les casseurs sont très polarisés. Pourquoi ? Les motivations des casseurs ne sont pas politiques mais cependant, lorsque l'on examine les événements de plus près, il est possible de remarquer que les émeutes surviennent principalement lors de certains événements. Certes, la casse et les émeutes surviennent lors des jours festifs comme le 14 juillet, le premier de l'an, ou les victoires en football. Mais l'événement qui déclenche le plus d'émeutes et de casse reste les homicides policiers. Toutefois, ces émeutes éclatent principalement après des homicides concernant des personnes d'origine étrangère, généralement maghrébine ou africaine. Ces personnes sont souvent des jeunes de nationalité française. Les émeutes se déclenchent également plus fréquemment lorsque ces homicides concernent des individus non armés, plutôt que des personnes armées. En examinant ces facteurs, on peut penser qu'il y a une forme de politisation. Ces éléments sont compatibles avec une colère sociale. Cependant, lorsqu’on observe les émeutiers eux-mêmes, il est évident que cette politisation n'est pas présente. Il y a donc deux lectures possibles des émeutes : l'une concerne le déclencheur des événements, l'autre concerne les personnes qui y participent.
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