Notre conscience nous appartient - Par Thierry Godefridi


Dans l’introduction de son essai, Bertrand Marie Flourez cite, extrait de La légende des siècles, le poème « La Conscience », racontant la fuite de devant Jéhovah d’un Caïn échevelé, livide au milieu des tempêtes, qu’un oeil ne cessa de poursuivre au cours de ses pérégrinations et jusque dans sa tombe. Mieux que quiconque Victor Hugo saisit le sens du mot conscience dont il est question ici. Il est de comprendre et inclut une dimension morale ou éthique qui implique que cette compréhension est de nature à changer notre comportement. L’enjeu est de savoir si nous avons la totale maîtrise de cette conscience ou s’il y a un risque que nous l’externalisions.

de Bertrand Marie FLOUREZ

Clairement cette conscience ne se réduit pas à des raisonnements intellectuels ; elle en sera l’arbitre. Elle ne se réduit pas non plus à des phénomènes électriques, physiques et chimiques à l’intérieur du cerveau ; elle n’est donc ni observable, ni mesurable. Rien ne dit même que le cerveau soit le siège de la conscience. Flourez s’appuie ici sur Antonio Damasio, le médecin, professeur de neurologie, neurosciences et psychologie luso-américain, qui déclara à la sortie de son ouvrage L’Ordre étrange des choses en 2017 : « […] le cerveau et le corps sont étroitement liés et ce que l’on appelle l’esprit n’est pas le produit du seul cerveau, mais bien de son interaction avec le corps. »

Flourez en prend comme exemple concret ce propos de Xavier Gorce dans L’Express au moment où s’ouvrait le procès des complices des auteurs de l’attentat de Charlie Hebdo : « Je ne suis pas Charlie, aujourd’hui, c’est accepter que soient grignotés par petits morceaux textiles ou grosses tranches sanglantes l’espace laïc et les libertés de conscience, d’expression, d’ironie… pour préserver une paix illusoire. » Comment penser que la liberté de conscience dont il est fait état dans ce propos soit un produit électro-chimique du cerveau ?