J'ai lu et aimé : "Le Nouveau régime ou l’Impossible parlementarisme" de Benjamin Morel

Le 9 juin 2024 le pouvoir, jadis concentré à l’Élysée, a migré vers l’Assemblée nationale. Assistons-nous à une rupture irréversible pour nos institutions ? Dans un ouvrage éclairant, original et passionnant, Le Nouveau régime ou l’Impossible parlementarisme (Passé Composé), Benjamin Morel s'interroge pour tenter de comprendre l’incompréhensible et sortir de ce bourbier politico-institutionnel. Une réflexion qui prolonge son précédent ouvrage Le Parlement, temple de la République. De 1789 à nos jours (Passés composés, 2024), rétrospective indispensable de l’histoire parlementaire française.

Le pouvoir naguère à l’Élysée est revenu à une Assemblée perçue encore récemment comme une caisse enregistreuse. Dans une chambre composée de 25 % de députés du RN et de 12,5 % de LFI, le champ des alliances possible  s’est réduit, contraignant à des accords baroques dans une configuration rappelant celle de la IVe République finissante. La Ve se révèle être un véritable régime parlementaire soumis aux mêmes difficultés que ses voisins européens. Or, l’héritage du général de Gaulle pèse de tout son poids sur notre conception du régime. Cette transformation n’est pas acceptée par des acteurs attachés au présidentialisme. Cela mène à tordre le texte, à en exploiter les failles, légitimement, pour surmonter les blocages, mais également pour maintenir un rapport de force que certains estiment plus favorable. Toutefois, les précédents ainsi créés ne sont pas sans risque. L’illibéralisme d’un régime politique provient rarement d’une nouvelle Constitution, mais de la réinterprétation d’un texte existant. La période actuelle a révélé des brèches qui, si elles peuvent être utilisées avec les meilleures intentions aujourd’hui, pourraient demain nous conduire sur une pente glissante. C’est le récit de cette transformation inédite que fait Benjamin Morel.

ISBN 979-1-0404-1078-2
Parution 19/02/2025
Pagination 144 pages
Format 14 x 20
Prix 16 €

Comment sortir de la crise politico-institutionnelle ?
Par Ronan Planchon

Benjamin Morel ? Naturellement, ce nom vous est familier. Vous lisez les journaux, vous avez l’avez même sûrement entendu à la télévision ou à la radio. Il excelle dans l’art de répondre à des questions que personne ne se posait avant la dissolution de l’Assemblée nationale, le 9 juin 2024, à part des étudiants en droit constitutionnel zélés et quelques oracles fous : « Un président qui décide d’une dissolution au lendemain d’élections européennes, (…) est-ce conforme à l’esprit de la Vᵉ République ? », ou encore : « Si Emmanuel Macron démissionne, peut-il se représenter ? ».

À la télé, le temps est l’adversaire le plus coriace de la pensée. Le maître de conférences à l’université Paris 2 a donc écrit un nouveau livre, titré Le Nouveau Régime ou l’Impossible parlementarisme et publié ce mercredi aux Éditions Passés composés. Il n’est pas un essai de circonstance, aussitôt lu, aussitôt oublié et dont les maisons d’édition débordent, ni un guide pratique du chaos politique ou une déclinaison de la collection « Pour les nuls ». C’est un ouvrage éclairant et original pour tenter de comprendre l’incompréhensible et sortir de ce bourbier politico-institutionnel. Une réflexion qui prolonge son précédent ouvrage Le Parlement, temple de la République. De 1789 à nos jours (Passés composés, 2024), rétrospective indispensable de l’histoire parlementaire française.

À lire aussi Benjamin Morel : «Après l’adoption du budget, il est temps de comprendre ce qui paralyse vraiment notre vie politique»

En observant la séquence 2024 dans le rétroviseur, le constitutionnaliste a vu une sortie de route. Car, lorsque le gaulliste Michel Debré dirige la rédaction de la Constitution de la Ve République, en 1958, le président du Conseil de l’époque a une idée derrière la tête, peu en phase avec notre Assemblée indisciplinée de 2024 : il entend mettre les députés au pas, les réduire « à l’état de chaton », soutient Benjamin Morel.
Le Nouveau régime de Benjamin Morel : comment sortir de la crise politico-institutionnelle ?