Maurice Berger : «Il y a une volonté de détruire les moments de plaisir partagés de la société occidentale»

Les débordements qui ont accompagné la victoire du PSG en Ligue des champions ne sont qu’un exemple de célébrations collectives perturbées par des jeunes violents, souligne le pédopsychiatre Maurice Berger


J'ai lu et aimé : "Mineurs violents, Etat inconsistant" - Par Mauirce Berger


Les émeutes qui ont suivi la victoire du PSG étaient prévisibles : 5400 policiers étaient mobilisés avant même de connaître l’issue du match. Dans la nuit de samedi à dimanche ont eu lieu des pillages, des forces de l’ordre et des pompiers ont été attaqués. Le terme de « barbarie » a été employé par le ministre de l’Intérieur pour décrire cette forme de violence. On peut définir ce mot comme une jouissance collective à frapper, voire tuer, casser, piller. Comment comprendre ce qui s’est passé après ce match ?

Je ne parlerai pas ici des actes individuels mais seulement de ceux accomplis collectivement. Des millions de téléspectateurs ont éprouvé une tension, des émotions - joie, colère, déception -, en regardant le match du PSG, ils pouvaient ne les exprimer que verbalement, et la plupart n’ont pas commis ensuite de délit. Alors qu’une première caractéristique des émeutiers est leur incapacité de contenir une tension en soi, les mots ne suffisent pas, l’émotion se manifeste immédiatement physiquement par une excitation qui diffuse collectivement de manière contagieuse, peu importe que l’émotion initiale soit positive ou négative, voir son équipe gagner ou perdre, le lien avec l’événement premier devient ténu, c’est un « réflexe ». Ainsi en centre éducatif renforcé, un adolescent m’a déclaré, les yeux brillants, que se battre était pour lui un immense plaisir dont il n’envisageait pas de se priver. S’il voyait d’autres jeunes se bagarrer, il se mêlait immédiatement à ce combat dont il ne connaît pas l’origine. Ces sujets éprouvent la même jubilation à détruire et ne savent jouer aux gendarmes et aux voleurs qu’en vrai. Certains d’entre eux, en échec scolaire dès le CP, n’ont aucun plaisir à apprendre et cherchent un gain rapide par prédation. Il est difficilement possible d’aller plus loin dans la compréhension de cette jouissance sans pensée.

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