Nicolas Baverez: «La France connaît, avec une décennie de retard, son moment populiste»

La France n’a résisté à la vague populiste qui aurait dû l’atteindre dès la décennie 2010 que par la solidité de ses institutions et par la discipline républicaine des partis de gouvernement. Mais Emmanuel Macron a démoli ces digues pour préparer méthodiquement l’arrivée du RN au pouvoir.


La France s’inscrit le plus souvent à contre-courant des évolutions des démocraties développées. Ainsi, le général de Gaulle fonda-t-il une monarchie républicaine singulière parmi les régimes parlementaires européens et conduisit-il une politique de l’offre au cœur de l’ère keynésienne. François Mitterrand étatisa l’économie et entreprit une relance en pleine récession mondiale et en opposition avec le cycle des réformes libérales, jusqu’à placer notre pays aux portes du FMI, ce qui imposa le tournant de la rigueur de 1983.

Ses successeurs financèrent par l’explosion de la dette la pérennisation du modèle d’économie administrée ainsi qu’un mode de consommation à crédit. Aujourd’hui, avec la victoire écrasante du RN lors des élections européennes qui le place en situation de force pour les législatives, la France est rattrapée par la vague populiste lancée par le Brexit et l’élection de Donald Trump, à laquelle elle avait résisté dans les années 2010.

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Les élections européennes de 2024 marquent un tournant historique puisque, même dans les années 1930, l’extrême droite n’avait jamais réuni 40 % des suffrages en France à la suite d’élections régulières. Le score réalisé par le RN est indissociable de sa transformation, réalisée par Marine Le Pen. Le RN n’est plus un parti fasciste, favorable à une révolution autoritaire, ouvertement raciste et antisémite, hostile aux institutions et aux élites, cultivant la violence.

Il se présente et il est perçu comme le parti de la stabilité et de l’ordre, ce qui lui permet d’attirer électeurs et élus, notamment LR, autour d’une stratégie d’union des droites. Il n’est plus un parti de protestation mais d’adhésion. En tête dans tous les départements sauf trois, dans 93 % des communes, dans toutes les classes d’âge et les catégories professionnelles, il occupe une position centrale. À l’instar du parti gaulliste des années 1960, il ressemble au métro des heures de pointe.
Une décennie de retard

La percée du RN est indissociable de sa mue d’une formation d’extrême droite en un parti populiste. Et ce au moment même où la vague populiste reflue en Europe orientale, qu’il s’agisse de la Pologne, de la Hongrie ou de la Slovaquie, mais aussi au Royaume-Uni avec les désillusions du Brexit et le choix de dirigeants modérés pour le Labour comme pour le Parti conservateur, libérés du radicalisme de Jeremy Corbyn et Boris Johnson. Et ce au moment même où s’affirme en Europe de l’Ouest un post-populisme, inventé en Italie par Giorgia Meloni.

La France connaît donc, avec une décennie de retard par rapport aux démocraties développées, son moment populiste. Il répond à une forme de logique car notre pays, par son refus de se moderniser qui l’a enfermé dans une interminable spirale de déclin, présente toutes les pathologies qui en constituent le terreau : stagnation économique, chômage de masse, paupérisation des classes moyennes, marginalisation de pans entiers du territoire, désarroi identitaire, explosion de l’insécurité, paralysie des institutions, défiance envers la classe politique.

La France n’a résisté à la vague populiste qui aurait dû l’atteindre dès la décennie 2010 que par la solidité des institutions de la Ve République et par la discipline républicaine qui était partagée par la droite et la gauche de gouvernement. Mais Emmanuel Macron a démoli ces digues pour préparer méthodiquement l’arrivée du RN au pouvoir.

Le président de la République a amplifié le décrochage économique en poussant à l’extrême le modèle de la décroissance à crédit, endettant le pays de plus de 1000 milliards d’euros qu’il a dilapidés en usages improductifs. Il a amplifié le sentiment de dépossession de la classe moyenne en perdant le contrôle des comptes de la nation, de l’ordre public, de l’immigration. Il a isolé et affaibli la France par ses errements et ses initiatives inconsidérées, prenant des risques diplomatiques et stratégiques démesurés sans mettre en place les moyens militaires de les garantir.

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