2 février 1836 : Mort de Laetitia Bonaparte
Figure essentielle de
l'épopée impériale, la mère de Napoléon 1er demeure une femme
méconnue. Fière, indomptable, rebelle, c'est elle qui insuffle son énergie et
sa volonté peu communes à son fils. C'est elle qui assure la cohésion d'un clan
prompt aux éclats en arbitrant d'incessantes querelles et en apaisant les
violentes turbulences qui le déchirent à tout propos. C'est elle enfin qui
amasse patiemment dans l'ombre une fortune qu'elle mettra à la disposition de
ses enfants insouciants et capricieux lorsque le vent tournera. Conseillère
souvent avisée, elle ne cesse de garder la tête froide aux heures les plus
enivrantes de l'Empire : ni les fastes du Sacre ni les ors des palais ne
parviennent à l'étourdir et à la détourner du bon sens et de la clairvoyance. Femme
courageuse et originale qui se retrouva veuve à 35 ans, fit toujours face aux
épreuves et mourut à Rome, très âgée, aïeule vénérée d'une multitude de princes
et de princesses disséminés en Europe.
1830. Dans sa retraite
romaine, Letizia R. Bonaparte reçoit deux journalistes du Magasin
Universel. La mémoire de son illustre fils, seule, a motivé son accord
pour cet entretien : elle leur dira tout. Tout de sa fierté de mère, devant la
fulgurante ascension de Napoléon. Tout de ses filles volages, brillantes ou
ambitieuses, des velléités de Joseph, de l'obstination de Lucien, de la
fragilité de Louis et de la légèreté de Jérôme.
« Qui aurait pu
prédire un avenir si glorieux ? Comment imaginer enfanter tant de rois et de
reines, de princes et de princesses ? L'envol de l'Aigle ! La campagne d'Italie
et le 18 Brumaire, le Consulat puis l'Empire, et nous, sa famille, happée dans
le sillage de son fabuleux destin. Promue Altesse Impériale par la grâce de mon
fils, je n'oublierai jamais, malgré la richesse et les honneurs que mon sigle
se limite à trois lettres : L.R.B (Letizia Ramolino Bonaparte).
Mater
Napoleonis, je l'ai été jusqu'à l'épuisement. J'ai tout vécu
: les adieux de Fontainebleau, l'île d'Elbe et les Cent- Jours puis la chute
finale, l'exil à Sainte-Hélène.
Jamais je ne me suis laissé impressionner par les ors de l'Empire, seul comptait pour moi l'avenir de mes enfants. Ceux qui souffraient le plus avaient ma préférence. Je les ai tant aimés mais j'ai tellement souffert. Ne suis-je pas la mère de toutes les douleurs ? »
Jamais je ne me suis laissé impressionner par les ors de l'Empire, seul comptait pour moi l'avenir de mes enfants. Ceux qui souffraient le plus avaient ma préférence. Je les ai tant aimés mais j'ai tellement souffert. Ne suis-je pas la mère de toutes les douleurs ? »