«Non, l’Allemagne n’est pas la seule responsable du sabordage du nucléaire français» - Par Samuel Furfari
Si l’Allemagne a incontestablement joué un rôle décisif dans l’affaiblissement du nucléaire en France, la responsabilité des élites françaises est indéniable, explique Samuel Furfari, ancien fonctionnaire de la Commission européenne et professeur en géopolitique de l’énergie.
Le «zèle du converti» s’est emparé de nos élites politiques et journalistiques. Il y a encore une dizaine d’années, souligner le rôle pernicieux et dangereux de nos voisins allemands dans l’affaiblissement de notre industrie nucléaire pouvait faire de vous un germanophobe primaire. Aujourd’hui, un excès en chassant un autre, il est de bon ton de relever les manœuvres diplomatiques allemandes à Bruxelles et l’influence trouble de Berlin sur les mouvements anti-nucléaires français. Au point d’oublier la responsabilité de nos propres élites.
Oui, c’est vrai, l’Allemagne s’oppose depuis longtemps à l’industrie nucléaire française, en partie pour des raisons historiques, politiques et économiques. Sa décision de sortir du nucléaire après la catastrophe de Fukushima a influencé d’autres pays européens, Berlin usant de son poids économique et diplomatique pour imposer des politiques favorisant les énergies renouvelables au détriment de l’atome. Oui, il est désormais acquis et documenté que, souvent influencée par les priorités allemandes, Bruxelles a permis que soient marginalisés les projets nucléaires français tout en soutenant l’énergie solaire et éolienne. Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, a ainsi largement soutenu une stratégie alignée avec l’EnergieWende allemande. Rappelons aussi le combat de la France pour faire rentrer l’énergie nucléaire dans la taxonomie verte de l’Union européenne, contre la volonté du néerlandais Franz Timmermans, alors vice-président exécutif de la Commission européenne et aligné sur la position allemande.
«Non, l’Allemagne n’est pas la seule responsable du sabordage du nucléaire français»
"Il s’agit d’un suicide énergétique en règle : l’UE se prive d’un atout compétitif majeur et prend le risque de se retrouver marginalisée dans la production mondiale d’électricité."
Samuel Furfari