La censure engendre des monstres - Par Peggy Sastre

La répétition est mère de pédagogie et donc d'apprentissage, paraît-il. Alors, on le répète. La censure ne marche pas. Interdire des livres, des réunions, des conférences, des cours parce qu'on déteste les idées qu'ils véhiculent ne servira à rien d'autre qu'à radicaliser leur discours. Ce qui fera monter d'un cran l'hystérisation des débats, savonnera un peu plus la pente de l'effondrement démocratique et ouvrira un peu plus grand les portes d'un « retour » de la loi de la jungle dans notre quotidien jusqu'ici à peu près civilisé.


Répétons aussi que le combat pour la liberté d'expression n'est pas une affaire de personnes, mais de principes, et que ceux-ci résistent d'autant mieux qu'on les frotte à des gens qui nous déplaisent.

Deux cas d'école

Ces derniers jours nous ont offert deux cas d'école. D'abord, avec l'annulation d'une conférence de Jean-Luc Mélenchon et de Rima Hassan, septième sur la liste de la France insoumise aux élections européennes, prévue pour le jeudi 18 avril à l'université de Lille et organisée par une association étudiante propalestinienne. La veille, dans un communiqué, l'université expliquait que les conditions n'étaient « plus réunies pour garantir la sérénité des débats » et qu'elle avait ainsi « décidé de ne plus autoriser la tenue, en ses murs, de la conférence », le tout en regrettant « la pression exercée sur l'autonomie pédagogique et scientifique des établissements d'enseignement supérieur ».

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Reprogrammée dans une salle de Lille, la conférence a finalement dû se faire dans la rue à cause de son interdiction par la préfecture du Nord, justifiée par des « risques de trouble à l'ordre public », ainsi que par la mobilisation nécessaire des forces de sécurité pour d'autres événements et l'incapacité de la salle choisie à recevoir le public attendu.

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L'autre sale histoire est celle du retrait, ce même 17 avril, de la campagne promotionnelle chez JCDecaux du livre Transmania, signé des militantes et influenceuses féministes Marguerite Stern et Dora Moutot et publié aux éditions Magnus. L'entreprise de publicité s'est justifiée en ces termes : « Si JCDecaux est par conviction attaché à la liberté d'expression, nous avons procédé au retrait des affiches Transmania sur les mobiliers concernés du fait des propos véhiculés sur le visuel sur lequel la Ville de Paris nous a par ailleurs interpellés. Nous présentons nos excuses aux personnes que ces affiches ont pu heurter. »

De fait, l'annulation de cette campagne (prévue pour Paris, mais aussi Lyon, Bordeaux et Toulouse) est intervenue après même pas vingt-quatre heures de sauce – parce que la vie va si vite de nos jours – lourdement épaissie par les interventions d'élus parisiens comme Emmanuel Grégoire, premier adjoint d'Anne Hidalgo, et David Belliard, chargé de la transformation de l'espace public, des transports, des mobilités, du code de la rue et de la voirie. Le premier a déclaré que « la haine de l'autre n'a pas sa place dans notre ville. Paris n'est pas la vitrine de cette haine crasse », le second que « cette publicité pour un bouquin transphobe participe à la normalisation de la haine envers les personnes trans. Une idéologie mortifère, à mille lieues des valeurs de Paris. Cette publicité doit être retirée », et les deux sans avoir pris la peine de lire l'ouvrage.

La censure, un dopant intellectuel

Ce qui n'est pas mon cas. Raison pour laquelle je me désole de « devoir » en faire, ne serait-ce qu'expéditivement, mention tant l'ouvrage est déplorable. Ce n'est pas de la pensée, c'est de la propagande. Ce n'est pas une enquête, c'est un règlement de comptes « documenté » par le pire de ce que peuvent produire nos fonctions cognitives prétendument supérieures, entre esprit d'assiégé et confection commode d'hommes de paille pour « réduire » les acteurs et les enjeux du débat sur la transidentité à leurs formes les plus pathologiques.

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Mais ce n'est pas le sujet. À l'instar du peu d'estime (et c'est un euphémisme) que je peux porter à Mélenchon, Hassan, LFI et aux « organisations » étudiantes françaises faisant de la disparition d'Israël le scénario prioritaire de leurs rêves humides. Le sujet, c'est que les membres de sociétés se targuant d'être démocratiques n'ont pas à interdire des conférences avant qu'elles se tiennent ou des campagnes d'affichage – dûment commandées, payées et autorisées – pour des livres qu'ils n'ont pas lus. Le sujet, c'est que la censure ne marche pas, à part comme dopant intellectuel : elle rend les idées plus fortes, mais en les bourrant d'éléments toxiques. Avec des effets secondaires aussi délétères pour les cervelles où elles ont été injectées que pour les milieux ayant à écluser leurs résidus. Et nos deux exemples d'actualité sont, là encore, des cas d'école. Là où, paraît-il, l'apprentissage est le fruit de la répétition.

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