«Les jeunes ne sont pas confrontés assez vite à leur punition» - Par Béatrice Brugère

Pour la magistrate Béatrice Brugère, la gravité de certains actes appelle à un changement de méthode : «En général, tout ce qui permet d’éloigner le jeune de son environnement criminogène fonctionne bien».

Secrétaire générale d’Unité Magistrats FO, Béatrice Brugère a publié Justice : la colère qui monte (éditions de l’Observatoire, février 2024).


Faut-il changer de logiciel sur la justice des mineurs ?

L’évolution de la délinquance juvénile n’est pas assez prise en compte. On est restés sur de vieux schémas, ceux institués par l’ordonnance de 1945 et de la primauté de l’éducatif sur le répressif. Face à une petite frange de mineurs, des 15-17 ans déjà ancrés dans la délinquance et commettant des faits très graves, il faut changer de méthode. Plus généralement, l’objectif est d’aller vite en sachant qu’un jeune n’a pas le même rapport au temps qu’un adulte, comme le montrent les travaux du pédopsychiatre Maurice Berger, spécialiste de la violence. Aller vite dans l’exécution de la sanction pour mettre un coup d’arrêt au parcours de délinquance. Or, aujourd’hui, le Code de la justice pénale des mineurs (réforme de l’ordonnance de 1945, en 2021) établit la « césure » : une première audience sur la culpabilité et une seconde sur la peine, beaucoup plus tard. Les jeunes ne sont pas confrontés assez vite à leur punition.

Vous êtes donc favorable à un système d’ultra-courtes peines prononcées rapidement ?

Jusqu’à présent, le signal que l’on envoie n’est pas le bon. Arrêtons-nous sur les émeutes. Un tiers des participants étaient mineurs, jugés pour des violences, des pillages de magasins, des destructions d’écoles... Or, ce qui a stoppé les émeutes, ce sont les comparutions immédiates des majeurs. Nous préconisons donc un système qui autoriserait la comparution immédiate pour les 16-18 ans et instaurerait de très courtes peines. En revanche, nous ne défendons pas l’abaissement de la majorité pénale à 16 ans.

En général, tout ce qui permet d’éloigner le jeune de son environnement criminogène fonctionne bien.

Vous décrivez une justice qui peine à être à la hauteur. C’est une « culture de l’excuse » qui est en cause ?

Sa grille de lecture n’a pas été réactualisée par rapport à une réalité criminologique qui a sauté aux yeux lors des émeutes. Une culture de l’excuse, loin d’être majoritaire chez les magistrats, peut faire partie de cette approche. Globalement, nous sommes en décalage avec les nouvelles formes de violences, avec la délinquance liée aux stupéfiants, avec le cyberharcèlement. Les affaires sordides des derniers jours sont venues nous le rappeler. Tout l’enjeu est de faire preuve de moins d’idéologie et de plus de pragmatisme. L’objectif n’est pas « la répression pour la répression » mais bien de tenir compte de la réalité. Dans le cas contraire, on risque d’alimenter les parcours de délinquance et, finalement, de ne pas aider les jeunes à en sortir. La détention des mineurs est souvent vue comme une chose « horrible », mais les faits qu’ils peuvent commettre sont également horribles. En général, tout ce qui permet d’éloigner le jeune de son environnement criminogène (internats, centres éducatifs fermés, etc) fonctionne bien.

Renforcer les sanctions contre les parents qui ne remplissent leurs obligations d’éducation de leur enfant est-il la bonne méthode ?

Ce qui est sûr, et on l’a encore vu avec les émeutes, c’est le délitement de la cellule familiale, des mères dépassées qui nous appellent au secours. S’y ajoute une petite frange de parents qui n’assurent pas leur rôle, voire sont dans la complicité. Le garde des Sceaux a raison de vouloir renforcer la responsabilité parentale. L’aspect pénal n’est qu’une partie de la réponse. L’article 227-17 du Code pénal, qui prévoit des sanctions pour les parents défaillants, existe, mais n’est quasiment jamais appliqué. Le fait qu’un parent se soustrait à ses obligations est difficile à caractériser.

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