Monique Canto-Sperber : « Ce n’est pas la mondialisation libérale qui pose problème, ce sont les choix faits par la France pour s’y intégrer »

Atlantico : En 2019, dans un entretien que vous aviez accordé à Atlantico , vous aviez évoqué que le temps du libéralisme et de ses idéaux touchait à sa fin. À l’heure du confinement, ce constat est-il  plus important ?

Monique Canto-Sperber : Évidemment. Les situations de crise sont toujours de véritables défis pour le libéralisme car les procédures de décisions politiques pour lesquels plaident le libéralisme (consultation, adaptation, capacité d’entendre des avis opposés) exigent du temps. Aujourd’hui, beaucoup de crises sont gérées par un contrôle des individus. Ce que l’on a imposé à la totalité de la population française est maussade, c’est une contrainte de liberté colossale. Les mesures les plus efficaces ayant été mises en œuvre à l’étranger pour restreindre l’épidémie sont des mesures liées à des systèmes de surveillance et de traçage des allées et venues de la population. Or, même si cette technique est « pour la bonne cause » c’est aussi une atteinte directe à la vie privée. Au niveau politique, le Parlement ne siège plus et on légifère par ordonnance. Toutes ces choses sont très difficiles à accepter pour les libéraux.

Cette crise sanitaire nous pousse à nous interroger sur notre modèle de société. On a vu que le libéralisme économique fait l’objet de nombreuses critiques en ce moment, certains le tenant partiellement responsable de la crise. Est-ce que cela n’est pas l’illustration d’une confusion entre le libéralisme et le capitalisme ? Quels sont les dangers existant à le rendre en grande partie responsable des maux actuels ?

 Il ne faut pas donner une interprétation de calamité divine et de source de rédemption à cette crise. C’est quelque chose qui est arrivé dans plusieurs pays du monde il y a une dizaine d’années ainsi qu’en France. Un plan d’équipement et d’approfondissement avait par ailleurs été établi en France à ce moment-là. Ce n’est pas une surprise qui remet tout en cause et qui nous fait voir les choses sous un jour complètement nouveau et il est primordial de se méfier de ces interprétations messianiques. Le libéralisme n’y est pour rien dans cette crise. Il insiste beaucoup sur l’importance du rôle de l’État sur les questions sécuritaires, l’État étant le seul à pouvoir imposer des restrictions de libertés. Ce qui est en revanche mis en cause et dénoncé dans cette crise, c’est une certaine compréhension de la mondialisation - dite libérale -, celle que la France a pratiqué. Il y a d’autres pays libéraux en Europe, comme l’Allemagne, qui n’ont pas les problèmes que nous avons : de délocalisation, de production industrielle et de dépendance totale à l’égard de fournisseurs étrangers. En France, il y a non seulement un défaut de prévision car nous n’avons pas renouvelé nos réactifs, nos masques etc… mais aussi de capacité à remédier à ce type de lacunes. Les allemands qui ont une économie aussi libérale que la nôtre ont gardé des entreprises qui fabriquent des masques et qui ont été très rapidement capables de se reconvertir. Toutes les entreprises qui fabriquent les réactifs ainsi que les respirateurs nécessaires sont présents sur le territoire allemand. La stratégie industrielle de la France au sein du libéralisme mondialisé pose problème. Ce n’est pas la mondialisation qui pose problème. On peut dire qu’il y a un avantage comparatif à fabriquer ce qui est moins cher. Bien sûr, mais on doit intégrer tous les paramètres y compris le risque de dépendance.

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