Hervé Moreau : « Le bon travail effectué par les policiers et les gendarmes est souvent gâché par le laxisme judiciaire »
ENTRETIEN – Hervé Moreau est un capitaine de gendarmerie à la retraite depuis le 24 mai 2021. Il est également l’auteur de Vérités d’un capitaine de gendarmerie (Magnus, novembre 2024). Dans un entretien accordé à Epoch Times, il revient sur ses trente années de carrière militaire, sur l’hyperviolence de la société et sur le laxisme judiciaire.
Epoch Times : Hervé Moreau, ces dernières semaines, le trafic de drogues a encore causé la mort de plusieurs personnes. Un adolescent de 15 ans a été tué sur un point de deal le 22 octobre à Grenoble. Le 2 novembre à Rennes, un jeune de 19 ans a été tué au couteau. Comment analysez-vous cette violence qui semble se banaliser ?
Hervé Moreau : C’est un phénomène qui est malheureusement assez ancien et qui ne cesse de s’étendre. On peut également soulever le fait que les auteurs de ces actes de violence sont de plus en plus jeunes, à l’instar des criminels sud-américains ou de ceux qui sévissent aux États-Unis.
Ce qui nous amène à la grande problématique de la justice pénale des mineurs en France. Pour ma part, j’ai commandé en second pendant quatre ans une compagnie de gendarmerie départementale à Beaune, c’est-à-dire dans une zone rurale réputée tranquille, plutôt riche en raison du patrimoine viticole et des hauts lieux touristiques qui s’y trouvent, comme les Hospices.
Mais depuis plusieurs années, ce territoire est en proie à une diffusion endémique des stupéfiants, laquelle est plus que problématique dans la mesure où elle induit une délinquance forte associée notamment au financement de ces addictions. Et c’est un phénomène que l’on retrouve dans le ressort de toutes les compagnies de France.
Dans mon ouvrage, j’informe nos concitoyens des différents types d’affaires criminelles que j’ai eu à traiter lorsque je commandais la compagnie, qu’il s’agisse des meurtres, tentatives de meurtre, des viols, des coups et blessures en développement exponentiel, de la pédophilie et bien entendu, de tout ce qui relève du trafic de drogues. J’ai pu constater au fil des années qu’il y avait toujours plus de délinquance liée à la drogue avec, encore une fois, un rajeunissement des dealers et du public touché. En termes de santé publique, c’est désastreux.
Mais il ne s’agit pas encore de trafics relevant à proprement parler d’une logique de gangs. Les territoires ruraux sont encore épargnés par ce phénomène qui demeure encore circonscrit aux grandes villes comme Marseille, Grenoble, Nantes, Rennes, etc. Mais pour combien de temps encore ?
Le trafic gagne du terrain, il s’accompagne de plus en plus de violences à la portée criminelle, cela en raison d’une logique d’appropriation de territoires. Les récents drames, hélas, ne font que le démontrer, s’il en était besoin. Les gangs ne sont plus très éloignés de nos territoires ruraux.