Justice à deux vitesses: «avec Hollande d’abord et Macron maintenant, c’est devenu un véritable système»
Piotr Pavlenski a été interpellé en quelques heures, son statut de réfugié remis en cause ; le cambrioleur de Julie Gayet s’est retrouvé sous les verrous en trois jours. Une efficacité loin d’être vécue au quotidien par les Français. L’avocat Régis de Castelnau revient au micro de Sputnik sur cette justice à deux vitesses.
Devant la justice, serions-nous inégaux… au pays de
l’égalitarisme ? Piotr Pavlenski a été arrêté le 14 février, le jour même
du retrait de Benjamin Griveaux de la course à la mairie de Paris. Le
19 février sur France Inter, Christophe Castaner évoquait une remise en
cause du statut de réfugié politique du performer. L’expulsion manu militari,
un sort également réservé au jeune cambrioleur algérien de l’appartement de Julie
Gayet, la compagne de François Hollande, arrêté et placé en détention trois
jours seulement après les faits. Un zèle, une réactivité, que l’on ne constate
pas dans des affaires similaires –parfois criminelles– qui affectent chaque
jour les Français.
On remarquera d’ailleurs que Piotr
Pavlenski était recherché pour une autre affaire, de violences celle-ci, depuis
déjà un mois et demi, sans avoir été inquiété. Quant au cambrioleur de la
compagne de l’ex-Président, il était « déjà connu des services de police
pour des faits de vols », d’où son identification rapide par ses
empreintes, laissées sur place. Un casier judiciaire qui lui avait valu une
obligation de quitter le territoire… non exécutée.
On remarquera également que
l’appartement de Julie Gayet a été passé au peigne fin par les enquêteurs,
contactés par l’officier de sécurité de François Hollande, resté à son service,
et les analyses ont été rondement menées. Lors de cambriolages, elles peuvent
se chiffrer à « plusieurs dizaines de milliers
d’euros » en cas de recours à un labo privé. Dans d’autres cas,
comme celui d’Élisa Pilarski, cette jeune femme enceinte de six mois tuée par
une meute de chiens le 16 novembre dernier, les analyses auraient été jugées trop
onéreuses, d’après une information de France Info.
Des cas de figure sur lesquels nous avons interrogé
Régis de Castelnau, avocat spécialiste en droit public, fondateur du Syndicat
des avocats de France (SAF) et animateur du blog Vu Du Droit.
Sputnik : Est-ce la couverture médiatique qui donne cette impression ou aurait-on en France une justice à deux vitesses?
Régis de Castelnau : « La France a évidemment une justice à plusieurs
vitesses, ce n’est pas une nouveauté, cela s’est toujours passé comme ça. Il
est clair que le parquet, c’est-à-dire l’autorité de poursuite soumise
hiérarchiquement au pouvoir exécutif, déploie un zèle particulier dès lors que
l’on est en face d’affaires sensibles. Effectivement, l’actualité récente vient
de nous donner des exemples assez caricaturaux.
Récapitulons: dans la fameuse affaire
Mila, jeune fille victime de harcèlement, d’injures sexistes, homophobes et
racistes et qui avait vivement réagi en mettant en cause la religion dont ses
harceleurs se prévalaient, on se rappelle que cette réaction légitime avait déclenché
un incroyable lynchage à base d’injures publiques, d’injures racistes et de
menaces de mort. Que ce soit par le harcèlement initial ou le lynchage
postérieur aux réactions de la jeune Mila, on était en présence de milliers
d’infractions pénales graves. La jeune fille, quant à elle, n’avait rien à se
reprocher, puisqu’elle avait critiqué, certes vivement, une religion, ce qui
fait partie des libertés publiques en France. Cela n’a pas empêché le parquet,
probablement la demande du ministre de la Justice, d’ouvrir une enquête
préliminaire contre elle. La réaction très vive de l’opinion publique l’a amené
à battre en retraite.
En revanche, depuis un mois, alors que
les auteurs des délits commis à l’encontre de Mila peuvent être très facilement
identifiés grâce à leurs adresses IP, aucune arrestation, aucune garde à vue,
aucune poursuite. Il s’agit là bien évidemment d’une décision politique visant
à ménager la communauté musulmane.
Si l’on met cette affaire en regard du cambriolage
dont a été victime la compagne de François Hollande, comme des centaines de
milliers de Français par an, sans que l’on ne retrouve jamais les coupables,
l’arrestation de l’auteur dans les trois jours (!) relève de la caricature. Et
que dire de l’arrestation de Pavlenski, auteur de la diffusion de la vidéo
pornographique réalisée par Benjamin Griveaux… La violence de la réaction du
mainstream, manifestement terrifié par ce précédent, explique cette incroyable
célérité. »
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