Régis de Castelnau, Philippe Prigent et Sébastien Cochard : Cour constitutionnelle de Karlsruhe,"Deutschland über alles" ?
Dans un article publié sur son blog le 21 avril dernier
intitulé « Euro,
le miracle ou la mort » Frédéric Lordon disait la chose suivante :
« Pour que l’euro ne termine pas cette fois, il ne reste
qu’une possibilité hors la stratégie « cierges et miracle » : que l’Allemagne,
elle aussi, soit contrainte à cette solution de l’annulation des dettes pour
éviter d’y rester comme les copains. La seule chose qui puisse sauver l’euro,
c’est que l’Allemagne se voie elle-même incapable d’accommoder le choc
titanesque dans le cadre de ses propres prescriptions. Et qu’elle aussi se
trouve en situation de devoir arbitrer entre le maintien de ses principes et la
préservation de ses intérêts essentiels — entendre : contenir la dislocation
économique et sociale. Ce dont l’Allemagne est rigoureusement incapable —
transacter sur ses principes avec les autres — peut-être le peut-elle avec
elle-même. Encore faudrait-il qu’elle rende le bon arbitrage, qu’elle le rende
suffisamment vite et suffisamment fort pour que d’autres n’y soient pas passés
avant et que tout n’ait pas explosé avant la Pentecôte allemande. Alors, et
alors seulement, l’euro aurait une dernière, une ultime chance. »
Il est plus que probable que la mort de l’euro entraînera
rapidement la désintégration de l’UE.
En pleine crise du COVID, la Cour constitutionnelle
allemande de Karlsruhe vient de rendre le 5 mai une décision extraordinaire
dans laquelle elle montre que la voie germanique sera celle du refus de la
solidarité européenne. Pour faire simple, cette juridiction a posé le principe
de la supériorité du droit allemand sur le droit européen supranational. L’arbitrage
dont parle Lordon semblent bien avoir été rendu par l’arrêt du 5 mai. En faveur
des seuls intérêts de l’Allemagne.
Et il ne faut pas se tromper, la cour suprême allemande n’a
pas pris cette décision de près de 80 pages pour des raisons d’opportunité
politique ou économique mais bien pour des raisons de principe juridique. On
dirait bien que la messe est dite.
J’ai demandé à Philippe Prigent avocat la cour de Paris et Sébastien
Cochard, conseiller de banque centrale de nous proposer un commentaire de cette
décision.
Merci à eux.
Régis de Castelnau
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