La démocratie, ça ne sert à rien ? Commençons par en faciliter l’exercice ! - Par Bertrand Nouel

Une fois de plus, nous avons battu un record d’abstentions à l’occasion du vote de ces régionales. Et on va encore gloser sans fin sur « les élections pièges à cons », la remise en cause de la démocratie représentative, d’ailleurs bien battue en brèche par Emmanuel Macron avec ses tentatives de démocratie directe (tour de France en réponse aux Gilets jaunes, convention citoyenne pour le climat), l’analyse de Pierre Rosanvallon sur la société de défiance etc. Mais si on commençait par faciliter, comme cela se fait dans de nombreux pays, l’exercice de cette démocratie en n’exigeant pas le passage dans l’isoloir physique provisoirement installé dans nos écoles ?

Le parti des « tous pourris », celui des « à quoi ça sert » et celui des « ça ne m’intéresse pas »

Bien sûr, il y aura toujours ceux pour qui l’abstention constitue un acte politique, une protestation contre l’ordre bourgeois de ceux qui ne s’estiment représentés par personne, qui estiment que les politiques sont tous des pourris etc. Ceux-là existeront toujours, mais ils sont extrêmement minoritaires. Bien sûr, il y a l’épouvantable complexité du mille-feuille administratif : qui connaît les compétences respectives de la commune, de l’intercommune, du département et de la région ? Que signifie le monstre territorial d’une région comme la Nouvelle Aquitaine, qui va de Poitiers à Pau ? Il n’empêche qu’environ 7 électeurs sur 10 se sont abstenus, et qu’en 2015 la participation était 20 points au-dessus. Il n’empêche aussi qu’aux municipales de 2020 la participation était également 20 points en-dessous de celles de 2014 - or la complexité administrative ne joue pas dans cette élection.
« ça ne m’intéresse pas » est la réaction la plus fréquente. Les partis sonnent la mobilisation. Si les électeurs ne se mobilisent pas, l’interprétation la plus simple n’est-elle pas qu’ils n’ont pas de motif pour le faire, ou tout au moins pas de motif assez fort pour se déplacer… autrement dit qu’ils ne sont pas foncièrement mécontents de la politique menée, osons le penser. Autrement dit encore, l’appel au « réveil » des électeurs et à la dramatisation du scrutin que sonnent les partis a toutes les chances d’être un coup d’épée dans l’eau. Dans ce cas, ne faut-il pas se tourner au contraire vers une attitude pragmatique, à savoir inciter tout simplement au vote en en facilitant matériellement l’exercice ?