«Lutter contre les idéologies identitaires à l'université est nécessaire pour préserver les libertés académiques» - Par Sami Biasoni

Jean-Michel Blanquer a affirmé le 22 juin avoir pris la mesure de l'importance de la lutte contre les idéologies identitaires à l'université. Sami Biasoni se réjouit de cette déclaration soulignant la menace que représente cette tendance pour les libertés académiques.


Lors de la séance de Questions au Gouvernement du 22 juin dernier, interpellé par le député de Vaucluse Julien Aubert au sujet du rapport établi par l'Observatoire du décolonialisme et des idéologies identitaires, Jean-Michel Blanquer a précisé «prendre la mesure» de la «lame de fond» que constitue la pensée minoritariste au sein de l'université française. Le phénomène que ledit rapport souligne et que le ministre de l'Éducation nationale confirme n'est autre que celui de la submersion de pans entiers de la recherche scientifique par les approches disciplinaires dérivées des x-studies américaines (gender studies, racial studies, subaltern studies, etc. [1]). Loin de constituer un épiphénomène, cette évolution rapide, parfois radicale, questionne fondamentalement ce que la science doit être, autant qu'elle nous invite à penser en des termes nouveaux notre rapport à la transmission des savoirs.

À une tradition rationaliste fondée sur la partition méthodologique des disciplines, on veut substituer des transversalités thématiques. Ainsi, sur la base du pseudo-concept de domination blanche on s'intéressera pêle-mêle aux mathématiques (l'arithmétique comme «convention blanche»), à l'écologie (le changement climatique comme «résidu de domination» du Nord sur le Sud), à la nutrition (le droit des Appellations d'Origine Contrôlées comme instrument d'invisibilisation des traditions culinaires des minorités raciales) ou encore à la musicologie («racisme» induit par la hiérarchie entre degrés de la gamme harmonique du fait des valeurs relatives entre notes blanches et noires). Les exemples de travaux similaires sont légion ; le rapport de l'Observatoire se contente de les recenser afin de fournir une première quantification du phénomène dans son ensemble. Quant à la qualification du «phénomène», elle ne laisse désormais plus de place au doute, tant les déclarations publiques de soutien à son endroit abondent. On se souvient notamment du texte [2] rédigé en 2019 par Antoine Petit, président-directeur général du CNRS, où il est précisé que «la "race" devient la nouvelle grille de lecture du monde sur laquelle s'intègre la grille du genre, et qui s'articule à la hiérarchie homme-femme», ou encore que «l'étude des "races" […] constitue le cœur de l'organisation de l'ordre sexuel colonial».