Pierre Manent : "Nous souffrirons longtemps de la passivité qu’a imposé le gouvernement aux Français avec le Covid"


Ulysse Manhes : Cher Pierre Manent, les « atteintes aux libertés » motivées par une crise sanitaire et menées par un régime qui navigue à vue sont-elles identiques à des atteintes aux libertés des régimes totalitaires ?

Pierre Manent :
Non. Ni identiques ni comparables. Un régime totalitaire repose sur un parti unique et une idéologie imposée par la terreur. Où est le parti unique, où est la terreur en France ? Ce qui est vrai en revanche, c’est que, sans terreur mais non sans intolérance, une idéologie d’État s’est imposée à tous, gouvernants et gouvernés, avec la discipline de parole qui en est inséparable. Selon cette idéologie, il n’y a de règles légitimes que celles qui s’adressent à l’homme en général ; les juridictions qui administrent ces règles n’acceptent pas de responsabilité devant la communauté des citoyens puisqu’elles prétendent ne rendre de compte qu’à « l’humanité sans frontières ». La démocratie, comme gouvernement de soi de la nation – notre chose commune – non seulement a été délégitimée, mais pour ainsi dire criminalisée. Notre vie civique est donc exsangue. Ce qui frappe dans la crise sanitaire, c’est l’incapacité du gouvernement à faire autre chose qu’imposer une immobilisation générale avec l’aide des préfets et des gendarmes. Assurément les difficultés sont sérieuses, mais, à part bien sûr les efforts des hôpitaux, pouvons-nous citer une seule mesure qui signale un minimum d’initiative ou d’audace de la part du gouvernement ou du corps social ? De quelle « action commune » nous souviendrons-nous ? En tout cas, nous souffrirons longtemps de cette passivité imposée.


Que pensez-vous de la réaction relativement passive de la société civile française face aux restrictions de liberté dans un but sanitaire dont l’efficacité ne semble pas totalement établie à ce jour ?

Je vois deux explications.

D’une part, les droits strictement individuels étant seuls légitimes aujourd’hui, tous les motifs des actions sociales, des actions communes, sont suspects d’illégitimité. Voyez comment les attestations de déplacements dérogatoires refusent encore d’inclure la visite d’un lieu de culte parmi les motifs légitimes ! Au nom d’une interprétation de plus en plus extensive de la laïcité, notre société a tellement exclu la religion des motifs légitimes d’action collective qu’elle ne sait plus que la refouler aux marges ou dans une sorte de clandestinité à peine tolérée. Au bout du compte, le seul motif légitime, parce que le seul incontestable, des actions humaines, c’est la peur de mourir. Il n’y a pas de limite à la tyrannie qui peut se légitimer par la protection de la vie de chacun.

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