Etienne Gernelle – Pourquoi la réforme des retraites est un enjeu de civilisation
Emmanuel Macron, pour construire une Europe-puissance, doit en finir avec la retraite à 60 ans, un boniment qui entrave la France depuis quarante ans.
Les retraites, ou l'histoire du plus gros et du plus coûteux mensonge de la Ve République… Tout a débuté en 1981, avec ce déni de réalité qui n'a pas grand-chose à envier à celui des antivaccins d'aujourd'hui : la retraite à 60 ans, à rebours de toutes les données démographiques. La faribole était déjà visible à l'époque : Jean-François Kahn, fondateur de L'Événement du jeudi et de Marianne, et qui n'est donc pas un suppôt de l'ultralibéralisme, comme on dit à gauche de la gauche, a raconté dans son dernier livre (1) qu'il avait refusé de voter pour François Mitterrand au premier tour en raison de sa « conviction que l'on ne se dépatouillerait pas du passage démagogique à la retraite à 60 ans ».
Depuis, le bobard a été documenté jusqu'à l'écœurement. Les rapports sur le sujet sont si nombreux et volumineux que l'on pourrait s'en servir de matériau de construction : du Livre blanc de Michel Rocard, en 1991, aux dernières prévisions du Conseil d'orientation des retraites (COR). Oh ! il y a bien eu des réformes : en 1993, 2003, 2010 et 2014 (si l'on est généreux). Sans jamais effacer la mascarade de 1981. Il est fascinant que l'on estime aujourd'hui souvent à 65 ans l'âge de départ à la retraite qui permettrait de restaurer un équilibre durable sans rogner les pensions. Soit la situation pré-1981… Par ailleurs, les régimes spéciaux, dont parlait déjà le rapport Rocard, sont toujours là. Pourquoi ? « Il est des consciences qui se soulagent comme des ventres », selon une formule attribuée à Bernanos. Macron fera-t-il exception ? Peut-être.